Actualité
Appels à contributions
Le Road movie ou l’envers du voyage, intertextes et réécritures

Le Road movie ou l’envers du voyage, intertextes et réécritures

Publié le par Perrine Coudurier (Source : LABORIE Jean-Claude)

Appel à communications

 19-20 septembre 2014

Paris Ouest Nanterre la Défense

 

Le Road movie ou l’envers du voyage,

intertextes et réécritures

 

Le terme de road movie apparaît au début des années 70 pour désigner un ensemble de productions cinématographiques dont Easy rider de Dennis Hopper (1969) reste l’archétype. Néanmoins, on étend aujourd’hui ce paradigme, essentiellement lié au contexte culturel des seventies aux États-Unis, à de très nombreuses œuvres cinématographiques venues du monde entier. De fait, si le « film de route » parvient à se constituer en paradigme, c’est parce qu’il réactualise des éléments structurels, thématiques et idéologiques très anciens qu’il reconfigure de manière originale dans le contexte contemporain. Ainsi, lorsqu’il commente son travail, le cinéaste Jim Jarmusch avoue-t-il qu’il a trouvé son inspiration dans la littérature et notamment dans l’Odyssée et l’Énéïde. Il n’hésite, par ailleurs, pas à caractériser Stranger than paradise  (1984), qui est indéniablement un road movie, comme « un film picaresque », renvoyant ainsi explicitement aux origines de la littérature narrative européenne.

Ce parallèle invite à mettre en relation le film de route avec les modes d’écriture du voyage, avec lesquels il joue jusqu’à apparaître comme un mode singulier, mais cohérent, de réécriture littérale et/ou métaphorique, impliquant à la fois des stratégies (intertextualité, parodie, ironie, usage critique, démythification…), et des modèles, qu’ils soient cinématographiques (le western) ou littéraires (le roman d’apprentissage, le récit d’errance…).

L’extension de la comparaison à l’ensemble du corpus viatique, au-delà des limites génériques, à partir d’une configuration spécifique du voyage autorise de très nombreux questionnements laissés le plus souvent de côté par une critique, surtout soucieuse de légitimer son propre objet. Ainsi en est-il par exemple de la conjonction relativement paradoxale, dans le road movie, d’un éloge du mouvement (idéologiquement constitué comme une contestation des valeurs sédentaires) et de la confrontation violente et sans issue d’un individu et du monde réel, dans lequel il se déplace pour prendre conscience progressivement de son étrangeté et de son hostilité. Le déplacement y apparaît comme la mesure d’une disjonction croissante entre les deux instances (le voyageur et le monde) que tout voyage et récit de voyage semblent au contraire vouloir rapprocher.

Une première série de questions émerge donc autour de l’usage, ou du sens du voyage dans ce type d’œuvres. La comparaison avec les modèles et les dispositifs traditionnels, constitués dans le champ du texte écrit ou du cinéma, permet peut-être de dégager ou d’esquisser de manière plus précise les spécificités du road movie. Est-ce un récit de voyage ? Que nous dit-il sur le voyage lui-même ? Faut-il le comprendre comme un anti-voyage ? Suffit-il, comme on le fait souvent, de privilégier en fait l’expérience spirituelle et temporelle effectuée par le voyageur sur son expérience spatiale pour statuer une fois pour toute sur la spécificité du road movie ?

Cependant la comparaison fonctionne également dans l’autre sens, à partir de ce qui peut apparaître comme un paradigme singulier. Est-ce que le même type d’usage du voyage existe dans le champ littéraire ? Est-ce que, par exemple, le Voyage au bout de la nuit de L. F. Céline, ou bien le Don Quichotte de Cervantès peuvent être rapprochés opportunément du road movie parce qu’ils attesteraient eux aussi d’un parcours déceptif à l’intérieur d’une série de mythes qu’il s’agirait de questionner, voire de jeter à bas, et qu’ils feraient l’éloge désenchanté du mouvement sans retour et d’une subjectivité impossible à figer. Est-ce qu’il serait possible, au-delà des frontières entre le texte et l’image, de reconnaître des paradigmes communs ? Nous pourrons être également amenés à nous poser la question des adaptations, qui pourraient peut-être ne pas se borner à une traduction dans un langage différent…

Notre colloque privilégiera les comparaisons, à l’intérieur du champ des productions cinématographiques ou bien entre littérature et cinéma. Nous pouvons suggérer trois axes de réflexion. 

 

I - Problème de caractérisation 

Que faut-il pour faire un road movie ? Est-ce un genre, une structure, une thématique ?

Est-ce qu’il existe plusieurs types de road movie ? Que dire par exemple d’un film comme Duel (1973) de Steven Spielberg, où parcourir une route bascule dans un combat mortel, aux dimensions fantasmatiques et fantastiques. Doit-on y voir un autre paradigme ?

Est-ce que le road movie est un genre essentiellement parodique ?

Est-ce que le voyage est une structure nécessaire ? Quel est le degré de nécessité de la mythologie de la route ?

 

II - Road movie et voyage

La question soulevée par l’usage du voyage dans ce type de films met l’accent sur le type de relation instaurée entre l’individu et le monde, sur la confrontation des valeurs.

Peut-on le comprendre comme un voyage moderne qui serait un éloge de l’individualisme et de la déprise de soi ?

Est-ce que nous avons affaire à un sous-genre du récit de voyage ?

Mais dans la mesure où il n’y a pas de retour, s’agit-il d’un voyage tronqué, d’un anti-voyage, ou peut-être d’un envers du voyage ?

 

III - Comparaison texte et cinéma

Y a-t-il des récits comparables ou bien est-ce que nous avons là un modèle spécifique au cinéma ?

N’y a-t-il pas de « road roman » ? Et si oui, quelle place réserver à ce type de textes dans le corpus des récits de voyage ?

La question des adaptations permet-elle une approche de la spécificité du film de route ?

 

Les projets de communication sont à adresser, sous la forme d’un titre et d’un court résumé de quelques lignes, avant le 30 novembre 2013, à :

Jean-Claude Laborie (Paris Ouest Nanterre La Défense) : jc.laborie@wanadoo.fr