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Appels à contributions
Le Mystère dans les lettres

Le Mystère dans les lettres

Publié le par Camille Esmein (Source : Christelle Reggiani)

Appel à contribution : Colloque « Le Mystère dans les lettres » : Formes contemporaines de l'énigme (université Paris IV-Sorbonne, 28, 29 et 30 septembre 2006)


« Tout écrit, extérieurement à son trésor, doit, par égard envers ceux dont il emprunte, après tout, pour un objet autre, le langage, présenter, avec les mots, un sens même indifférent : on gagne de détourner l'oisif, charmé que rien ne l'y concerne, à première vue.
Salut, exact, de part et d'autre
Si, tout de même, n'inquiétait je ne sais quel miroitement, en dessous, peu séparable de la surface concédée à la rétine il attire le soupçon : les malins, entre le public, réclamant de couper court, opinent, avec sérieux, que, juste, la teneur est inintelligible. »

Cette injonction qu'adresse Mallarmé, avec toute la fermeté requise, à la Littérature, entre ruse apotropaïque (pour « détourner l'oisif ») et prudente économie herméneutique la provocation de l' « inintelligible » devant susciter la lecture « soupçonneuse » des « malins » décrit assez justement tout un pan de la littérature française du siècle écoulé.

Nous choisirons cependant de ne pas aborder frontalement la question fondamentale, au sens où elle porte sur la définition même des concepts en cause, de l' « énigmaticité » de la littérature à quelles conditions historiques l'énigme pourrait-elle définir la littérarité ? Pour restreindre notre perspective à un objet précisément circonscrit : la manière dont l'oeuvre littéraire choisit, le cas échéant, de donner forme à une énigme qui tient alors volontiers le discours, plus familier, du secret.

De fait, le goût des formes structures, contraintes, figures qui caractérise toute une part de la littérature française du XXe siècle (prose et vers), loin de renoncer à la définition subjective que l'esthétique romantique avait proposée de l'oeuvre d'art, donne à la subjectivité auctoriale une existence précisément formelle, telle structure énonçant énigmatiquement un discours intime. À l'imaginaire vertical du texte bien décrit par Mallarmé le « soupçon » d'un « trésor » mystérieux naît de la perception incertaine d'un « miroitement, en dessous » s'associent alors quelques figures architecturales : celles du mémorial, de la crypte, ou du tombeau.

Ces questions de poétique impliquent, plus largement, le problème, historique, de la définition de différents régimes de littérarité. La littérature contemporaine apparaîtrait ainsi, dans une perspective pragmatique, comme un discours fondamentalement paradoxal, une adresse toujours problématique engageant une rhétorique véritablement, et radicalement, « restreinte » : le texte énigmatique ne suppose en effet une connivence confiant son secret au « suffisant lecteur » capable de l'entendre que pour prononcer ce faisant l'exclusion, complémentaire, des lecteurs moins « malins » (pour reprendre le terme de Mallarmé), jusqu'à risquer, parfois, de refermer l'oeuvre sur le cercle intime d'une communauté absolument privée.

Il s'agit en somme, en interrogeant les conditions de possibilité historiques, les modalités esthétiques aussi bien que les conséquences théoriques de cette alliance de la forme et de l'énigme intime, de reprendre à nouveaux frais la réflexion sur le formalisme du siècle dernier les oeuvres de Raymond Queneau, de Georges Perec et de Jacques Roubaud pouvant représenter alors des points de repère commodes, sans que ces exemples privilégiés constituent pour autant une liste limitative.

Les propositions doivent parvenir, sous la forme d'un résumé (une page au maximum), par voie électronique ou postale avant le 15 décembre 2005 à Christelle Reggiani.