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Le Langage du corps dans A la recherche du temps perdu de Marcel Proust 

Le Langage du corps dans A la recherche du temps perdu de Marcel Proust

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Liza Gabaston)

Liza Gabaston soutiendra sa thèse "Le Langage du corps dans À la recherche du temps perdu de Marcel Proust" le 12 juin 2008 à 14h en Sorbonne.  Directeur de thèse : M. le Professeur Antoine Compagnon (Collège de France) Jury Mme le Professeur Annick Bouillaguet (Université Paris-Est Marne-la-Vallée) Mme le Professeur Sophie Basch (Université Paris IV-Sorbonne) M. le Professeur Pierre-Louis Rey (Université Paris III- Sorbonne nouvelle) Position de thèse Le corps constitue un objet privilégié de la recherche proustienne depuis une vingtaine d'années. Il a été étudié de points de vue multiples, dont la phénoménologie, la psychanalyse et la médecine sont les plus représentés. Mais il n'a jamais été abordé comme une simple composante du récit, une technique narrative qui emprunte beaucoup au roman « réaliste » tel qu'il a été défini par Balzac, mais que Proust redéfinit en profondeur. La thèse a pour objet de combler cette lacune. Une lecture minutieuse de la Recherche révèle en effet tout un ensemble de gestes, regards, sourires, mimiques, intonations, qui ne se contentent pas de caractériser, de manière plus ou moins imagée, des personnages définis avant tout par leurs paroles, mais constituent un véritable système de signes, soumis à un déchiffrement permanent. Par « langage du corps », on désigne ainsi l'ensemble des manifestations physionomiques, gestuelles ou vocales qui font l'objet d'une activité herméneutique interne au récit. Il existe d'autres formes d'existence du corps dans le roman de Proust, mais la notion de « langage » permet de se limiter aux cas où cet objet est clairement présenté comme porteur d'une signification, et alimente des interprétations, de la part du narrateur ou d'autres personnages. La plupart des grandes scènes mondaines de la Recherche, comme la majeure partie de l'intrigue amoureuse et de l'intrigue homosexuelle, reposent sur une gestuelle dont le narrateur essaie de comprendre le sens et les enjeux cachés. Le geste de Gilberte sur le raidillon de Tansonville, les rougeurs d'Albertine, l'étrange « regard profond » du baron de Charlus, les coups d'oeil fuyants de Legrandin, sont autant d'exemples célèbres d'une pratique bien plus systématique. La thèse a d'abord pour ambition de faire apparaître ce corpus considérable, mais longtemps négligé. Il s'agit de montrer que les signes corporels, loin de se déployer seulement dans les marges du récit, conformément au modèle établi par la narratologie, sont au principe même de la dynamique narrative, dans un roman où l'« action » demeure problématique. C'est donc un double chapitre de la recherche proustienne, et de la théorie du récit, que ce travail essaie de compléter. L'histoire et la théorie du roman réservent une place limitée aux signes corporels, qui n'ont jamais fait l'objet, en France, d'une étude synthétique. Ce silence s'explique en partie par la difficulté de définir le corps comme objet littéraire. S'il reste toujours possible de l'aborder comme un thème, les choses se compliquent lorsque l'on tente de le circonscrire comme partie du récit. Les signes corporels chevauchent les grandes catégories traditionnelles de la narratologie, avec lesquelles ils ne se confondent pas. Protéiformes, ils circulent dans le roman, sans place ni identité clairement assignables. Ils sont partout, mais demeurent insaisissables. Tout ce que l'on peut dire, c'est que le personnage existe, dans le roman, à travers ses paroles et ses actes. Distinguer le « langage corporel » de la « parole » revient donc à isoler d'une part le corps narrativisé, faisant l'objet d'un discours de type herméneutique, et d'autre part le dialogue. Tandis que le dialogue, déjà verbal, ne subit aucune transposition sémiotique lorsqu'il apparaît dans un contexte verbal, les détails corporels doivent faire l'objet d'une traduction. Dans le récit, le corps existe uniquement sous la forme d'une description et d'une interprétation. Ce déchiffrement des gestes et des mimiques est omniprésent dans la Recherche, mais le phénomène n'est jamais analysé par le narrateur, qui demeure silencieux sur cette question. Dans cette oeuvre en partie réflexive, et parfois si bavarde sur son propre fonctionnement, ce point ne fait jamais l'objet d'un discours théorique, et les signes du corps ne sont pas inclus dans la dissertation finale du Temps retrouvé, qui définit pourtant l'écriture comme « traduction ». C'est autour de cette rupture entre l'omniprésence d'un procédé narratif, et le silence théorique qui l'entoure, que s'est organisée la réflexion. Proust se refuse très clairement à entrer dans les détails de la fabrique du récit, réservant ses discours esthétiques à l'aspect poétique et philosophique de son oeuvre. Mais ce vide théorique permet précisément de préserver la liberté du récit, de garantir sa réussite pratique. « Le roman proustien est plus hardi que Proust théoricien », note Vincent Descombes. C'est là le point de départ de la thèse, qui s'organise autour du postulat suivant : dans un récit d'où a disparu l'« intrigue » traditionnelle, les signes corporels sont l'un des critères essentiels qui font de la Recherche un roman. S'ils passent inaperçus à première lecture, ils constituent une partie fondamentale de la trame narrative, à laquelle ils sont intégrés si fortement qu'ils semblent naturels, et qu'on ne les voit pas. Cette invisibilité explique sans doute le silence critique qui entoure cette question, mais elle permet de comprendre également pourquoi Proust n'a pas jugé bon de s'appesantir sur cet élément très technique, dont l'utilisation est sans doute en partie inconsciente. Le « langage du corps » semble aller de soi, sans doute parce qu'il s'agit d'un instrument consubstantiel à la narration du XIXe siècle, dont la Recherche est l'héritière directe. Le recours aux détails corporels pour « camper » un personnage, l'interprétation des signes comme instrument de la progression du récit, l'herméneutique et le déchiffrement comme compléments inévitables de la description, tels sont les ressorts essentiels du roman réaliste, que Proust fait servir à de nouveaux enjeux. Le portrait a disparu de son oeuvre, de même que la description exhaustive des traits fixes du visage et de l'anatomie, au profit d'une véritable sémiologie des gestes, des mimiques, de tous les signes mobiles du corps. L'interprétation des signes corporels est bien plus systématique dans la Recherche que dans les grands romans du XIXe siècle, qui recourent abondamment à cette technique. Mais en conduisant l'herméneutique du corps jusque dans ses dernières extrémités, Proust menace de la dissoudre. L'étude du « langage du corps », à ce titre, apparaît comme un poste d'observation privilégié pour analyser la situation charnière, « entre deux siècles », de l'oeuvre de Proust, qui radicalise, mais pour mieux le détruire, le discours herméneutique caractéristique des romans du XIXe siècle, et ouvre ainsi la voie à la crise de la narration omnisciente. Ce détournement de l'herméneutique corporelle se fait sur deux niveaux. En premier lieu, Proust frappe d'un doute très paradoxal la possibilité même d'interpréter les corps. Contrairement au modèle de La Comédie humaine, où, à quelques nuances près, le corps était parfaitement lisible, la Recherche préfère les situations où le déchiffrement est incertain, voire se solde par un échec. Deux tendances cohabitent en permanence dans le roman : d'un côté, la position d'un observateur sagace doublé d'un moraliste, capable de deviner un caractère à partir de l'étude des mimiques et des gestes ; de l'autre, la posture d'un narrateur incapable de remonter jusqu'aux causes des comportements qu'il observe, et qui ne croit pas à l'expression directe de la vie intérieure dans les corps. Un balancement permanent s'instaure entre ignorance et connaissance, la psychologie des personnages étant frappée alternativement du sceau de la certitude ou du doute. Dans ces conditions, l'herméneutique elle-même devient l'objet d'une interrogation sur son propre fonctionnement : comment remonter de l'effet à la cause ? comment interpréter les signes, quand ils se chevauchent et se contredisent ? Cette question n'est jamais exposée de manière abstraite ou théorique, mais elle est intégrée aux structures mêmes du récit, sous la forme d'épisodes amoureux ou mondains qui viennent mettre en doute les pouvoirs de l'observation, et ruiner les prétentions de l'esprit d'analyse. Proust laisse les mobiles dans une obscurité qui alimente à la fois la progression narrative, et la réflexion sur les conditions mêmes de l'interprétation. Il s'agit à la fois de comprendre pourquoi tel personnage agit de telle façon, et de mettre à l'épreuve les principes fondamentaux de la déduction, qui ne permettent pas toujours de remonter jusqu'à la cause de ces comportements. Instrument de la progression narrative, le « langage du corps » est donc aussi l'objet d'une théorie du signe, mais il est également le lieu d'une recherche stylistique. La quête, toujours problématique, d'une correspondance entre le physique et le moral, n'est qu'un reflet de l'interrogation qui porte sur la relation entre les causes cachées d'un phénomène, et leurs manifestations extérieures. Il s'agit toujours d'étudier l'articulation d'une matière et d'un sens, que cette recherche soit au service de l'analyse psychologique, ou qu'elle alimente un discours de nature esthétique. Le corps est à la psychologie du personnage ce que l'oeuvre est à l'idée de l'artiste : Proust ne cesse de filer cette analogie, mais sans jamais l'exposer de manière aussi claire, puisque le corps est précisément ce qui permet d'intégrer la réflexion sur la littérature à la trame romanesque. Les signes corporels apparaissent donc comme un instrument de cohésion narrative à deux titres : d'une part, leur interprétation permanente et fautive, faite d'interrogations et de corrections successives, permet de creuser le mystère des personnages, et d'alimenter une logique de l'énigme ; d'autre part, ils permettent de narrativiser le discours esthétique, et préparent ainsi, de l'intérieur, l'émergence de la vocation du héros, tout en sauvant le roman de la tentation didactique. La thèse se compose de trois parties. La première partie examine les sources de l'herméneutiquecorporelle dans la Recherche. Le chapitre I rappelle le vide théorique qui a longtemps entouré la description du corps, en accord avec une pratique narrative très discrète sur ce point jusqu'au xviiie siècle. Il examine ensuite la rupture introduite par l'oeuvre de Balzac, qui généralise la pratique du portrait physique et de l'herméneutique du corps dans le roman français. Influencé par Lavater, l'auteur de La Comédie humaine se fonde aussi sur des modèles descriptifs plus savants, et il introduit dans le roman une double référence à la physiognomonie et à la médecine, qui structure l'ensemble de la production narrative du xixe siècle. Après cette présentation générale, les chapitres suivants se penchent sur quelques auteurs qui ont fourni à Proust des modèles plus immédiats. Le chapitre II est consacré à des sources plus éloignées dans l'espace et le temps. Du côté du xviie siècle, La Bruyère propose des exemples d'utilisation de la gestuelle au service du projet moraliste, tandis que Saint-Simon offre un modèle évident d'herméneutique mondaine. Du côté du roman européen, l'analyse doit se faire plus prudente, car les phénomènes de filiation ne sont pas explicites. Mais les auteurs favoris de Proust accordent tous, pour des raisons différentes, une place importante au langage corporel. Tolstoï a pu fournir un exemple d'interprétation systématique des gestes, en particulier pour l'intrigue amoureuse. Stevenson, salué dans Le Temps retrouvé pour son art de la « méprise pathologique », introduit aux techniques du roman d'aventures, fondé sur la surprise et la reconnaissance. Thomas Hardy, mentionné aux côtés de Tolstoï dans La Prisonnière, exploite le corps des personnages féminins à des fins d'architecture narrative. George Eliot, enfin, a pu donner l'exemple d'un sens de la nuance et de la contradiction dans le déchiffrement des signes corporels. Le chapitre III aborde les deux références les plus immédiates de Proust, à savoir Balzac et Barbey d'Aurevilly, que l'auteur de la Recherche associe explicitement lorsqu'il évoque la « physiologie » et le langage du corps. De La Comédie humaine, Proust n'a pas tant retenu un modèle de physiognomonie — discipline qu'il met à mal et dont il ébranle les fondements, — qu'un traitement plus subtil de l'homosexualité, telle qu'elle s'incarne dans les corps. C'est cette utilisation du signe révélateur qui l'intéresse également chez Barbey, dont l'art est explicitement identifié, dans La Prisonnière, à l'incarnation physique de réalités abstraites. Les rougeurs d'Albertine s'inspirent directement de celle des héroïnes de Barbey, et c'est plus généralement le traitement de Gomorrhe qui emprunte beaucoup à l'auteur des Diaboliques, mais la Recherche radicalise le mystère des corps et les difficultés de l'interprétation. Le chapitre IV examine les principales modifications que Proust a fait subir au modèle « réaliste » de l'herméneutique corporelle, à travers la question du portrait. L'étude des premiers écrits de l'auteur fait apparaître un refus très précoce du portrait en pied et de la physiognomonie traditionnelle, au profit d'une lecture plus problématique des signes corporels. Une tendance au traitement physique de la psychologie se manifeste dès les premiers brouillons de la Recherche, qui témoignent déjà d'une crise de la description, au profit d'une caractérisation en mouvement, sensible aux tics des personnages. Cette crise est à mettre en rapport avec le traitement ambigu du détail corporel, qui invite à réexaminer la critique de la « littérature de notations ». La deuxième partie, dont la fonction est avant tout descriptive, étudie le « langage du corps » comme technique narrative. Le chapitre V fait apparaître le rôle fonctionnel des signes corporels, dont l'interprétation fautive ou différée est l'un des facteurs essentiels du suspense et de la logique romanesque de l'énigme. Le traitement du corps des personnages révèle de manière particulièrement frappante les bouleversements majeurs que Proust fait subir aux structures temporelles du récit, et invite à remettre en cause certaines catégories traditionnelles de la narratologie. Le corps, dans la Recherche, n'est pas un simple « indice » chargé de renseigner immédiatement sur l'intériorité des personnages. Son déchiffrement problématique est au contraire au principe d'une série de relectures et de réinterprétations qui garantissent la progression narrative, dans un roman où l'« action » reste problématique. Le chapitre VI examine les conséquences du choix de la « première personne » dans le traitement des signes corporels. Les ruptures constantes du contrat narratif, de l'ignorance du héros à l'omniscience du narrateur, produisent une herméneutique ambiguë, constamment tiraillée entre la transparence et l'opacité. Cette oscillation fait apparaître le régime narratif très particulier de la Recherche, qui synthétise les techniques du roman du xixe siècle, mais pour les faire servir à une psychologie nouvelle. Loin de pénétrer de plain-pied dans l'intériorité des divers personnages, le narrateur met en scène la difficulté d'entrer dans les consciences, via l'interprétation problématique des signes corporels. Les deux chapitres suivants sont consacrés aux relations du langage verbal et du langage corporel. Le chapitre VII analyse les formes du dialogue, et le rôle des signes non verbaux dans les grandes « scènes » de la Recherche. Si Proust s'inspire largement sur ce point de la technique du roman « réaliste », qui utilise les gestes comme complément de la caractérisation verbale des personnages et de la vie sociale, il radicalise le procédé en démultipliant les interprétations, qui finissent par acquérir une vie autonome. Le « langage du corps », dans ces conditions, ne se limite plus à un instrument de construction du personnage et d'animation du dialogue. Il devient le support d'une réflexion strictement linguistique, qui interroge les relations de la parole et du silence. Le chapitre VIII examine cette fonction linguistique du « langage muet ». L'étude des personnages d'Albertine et de Françoise, qui incarnent chacune, dans le roman, un univers silencieux qui menace le règne du langage articulé, permet de faire apparaître les enjeux littéraires du langage corporel. La présence constante, dans la Recherche, de référents non verbaux, tels que l'animalité, l'élégance ou encore la musique, dévoile la présence d'une interrogation souterraine sur les limites du langage, sans cesse confronté à ce qui n'est pas lui. Cette confrontation alimente une recherche stylistique, où l'écriture est paradoxalement définie comme incarnation de ce qui échappe au discours.  La troisième partie approfondit cet enjeu esthétique du « langage du corps », d'autant plus important qu'il ne fait pas l'objet d'un retour théorique. Le chapitre IX étudie les formes de l'apprentissage littéraire dont l'herméneutique corporelle est l'instrument. Les corps, dans la Recherche, font l'objet d'une recherche de « motivation » signifiante aussi importante que les Noms. Ils font apparaître la quête d'une adéquation entre la matière et le sens, telle qu'elle s'exprime également dans les réflexions consacrées à l'art de la Berma et à la voix de Bergotte. Ces deux grandes leçons esthétiques ne se fondent pas sur un objet purement linguistique, mais sur les relations de la chair et des mots. À ce titre, elles manifestent les enjeux proprement littéraires attachés à la question du langage corporel. Le chapitre X aborde cette réflexion littéraire du point de vue du déchiffrement et de ses mécanismes. L'étude du discours sur la médecine et la stratégie militaire, deux disciplines explicitement présentées comme exercices herméneutiques, permet de faire apparaître la crise de l'interprétation qui structure la Recherche. Cette crise trouve à s'incarner directement dans le traitement des signes corporels, comme le montre l'exemple des marques physiques de l'hérédité. Un discours à tonalité scientifique, qui exalte la découverte des « lois », entre un conflit avec une conscience très aiguë des limites de l'observation et du déchiffrement. La relation entre les effets et les causes est problématique dans la Recherche, et ce problème est au principe même du romanesque tel que Proust le conçoit. Mais si le corps est un instrument essentiel de cette réflexion herméneutique, il ne fait jamais l'objet d'un retour théorique. Le chapitre XI explore les manifestations et les enjeux de ce silence. Dans la dissertation esthétique du Temps retrouvé, le narrateur ne mentionne pas directement les signes corporels, et seules les réminiscences apparaissent comme le véritable fondement de l'oeuvre qui s'annonce. De la même manière, bien que le narrateur s'apprête à écrire un récit, rien n'est dit sur le genre romanesque. Seul le « Bal de têtes » fait apparaître le rôle considérable du corps dans le livre à venir, mais ce point n'est pas ressaisi de manière théorique, et n'est pas associé directement à l'identité générique de l'oeuvre. La réflexion sur le roman n'est pas absente dans la Recherche, qui développe des micro-théories du quiproquo et de la reconnaissance. Mais Proust ne précise jamais, en revanche, que le corps est l'instrument privilégié de ces procédés. Le chapitre XII est consacré à la leçon de La Prisonnière sur Dostoïevski. La réflexion sur le « visage double » des héroïnes du romancier russe y est prise au pied de la lettre, comme une invitation à chercher, dans le corps des personnages, les marques de l'ambiguïté morale. La fameuse formule du « côté Dostoïevski de Mme de Sévigné », dont le troisième terme se réfère à la peinture d'Elstir, est analysée, elle aussi, en des termes strictement visuels. Si Proust conçoit le roman comme un récit des erreurs, l'association d'un peintre et d'un romancier suggère que les erreurs en question sont avant tout visuelles et corporelles. Le narrateur, toutefois, n'est jamais explicite sur ce procédé, qui se trouve réalisé dans la pratique même du récit.  La conclusion récapitule les aspects contradictoires et mouvants du « langage du corps » dans la Recherche, en examinant l'héritage de l'herméneutique corporelle dans le roman du XXe siècle.