Questions de société
Le futur des enseignants du supérieur ? Témoignage d'un enseignant en situation précaire

Le futur des enseignants du supérieur ? Témoignage d'un enseignant en situation précaire

Publié le par Vincent Ferré

[témoignage d'un enseignant exerçant dans une université française, diffusé sur la liste de la coordination nationale]


Je souhaiterais apporter  quelques précisions concernant la situation actuelle des enseignants non titulaires des universités, situation qui est le reflet de l'université de demain si on n'y prend garde.

Les universités recrutent aujourd'hui de plus en plus d'enseignants non titulaires en CDD ou en CDI. Ces enseignants sont majoritairement rémunérés sur fonds propres de l'université.

Cette démarche existe dans mon université, dans le département pour lequel je travaille. Ce département ne peut acheter du matériel, ne peut payer ses enseignants non titulaires et assurer le fonctionnement quotidien que s'il dispose de suffisamment de rentrées d'argent. Tout tourne autour des fonds propres, fonds qui correspondent dans ce cas aux frais pays par les étudiants. Nos étudiants (étrangers) paient donc autour de 1500 euros par an pour nous permettre en définitive de tout juste équilibrer le budget.

Les enseignants sont rémunérés 1500 euros net par mois pour 576h de cours par an (sans compter les tâches annexes). Certains vivent dans la crainte du non renouvellement de leur contrat. Les CDI mis en place depuis la loi de juillet 2005 et la LRU améliorent un peu la situation mais la loi est faite de telle sorte que très peu d'enseignants en France répondent aux critères pour obtenir ce type de contrat.

Concernant l'évolution des salaires, mon département vivant sur budget propre, s'il désire nous augmenter, il ne pourra le faire que si les frais d'inscription augmentent. Ceci entrainerait une fuite des étudiants vers d'autres départements équivalents, moins chers puisque nous sommes dans une dynamique de concurrence exacerbée (c'est au département qui attirera le plus d'étudiants, sachant que leur nombre baisse suite à la politique migratoire actuelle).

De façon plus générale, les universités emploient les non titulaires deux ou trois ans avec un statut précaire, payés au minimum et du jour au lendemain, on les met dehors. C'est humiliant. Ils donnent tout, travaillent souvent sans compter... Sans aucune perspective.

Voilà le type de fonctionnement qui attend les universités avec les compétences élargies.

William Charton