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Le choix de la langue dans la construction des publics à la Renaissance en France

Le choix de la langue dans la construction des publics à la Renaissance en France

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Tristan Vigliano)

Le choix de la langue
dans la construction des publics
à la Renaissance en France

Colloque organisé à l'Université Brock, St. Catharines (24-25 juin 2011), en collaboration avec l'Université de Lyon (GRAC, UMR 5037).

Responsables : Renée-Claude Breitenstein (Université Brock) et Tristan Vigliano (Université Lyon 2).

Comité scientifique : Mawy Bouchard (Université d'Ottawa), Michèle Clément (Université Lyon 2), Perrine Galand (EPHE) et François Rouget (Université Queen's, Kingston).

APPEL À COMMUNICATIONS

C'est au hasard d'une promenade hors de Paris, avec ses compagnons et assistants, que Pantagruel fait la rencontre de Panurge. Les premiers mots qu'il lui adresse seront pour le connaître : « pourtant mon amy dictes moy qui estes vous, dont venez vous, ou allez vous, que querez, et quel est vostre nom ? » Et Panurge de répondre dans treize langues différentes, sans se faire comprendre. Puis il en vient au français, qu'il suffisait qu'on lui demande de parler. Ses interlocuteurs, soulagés, saisissent enfin le sens de ses propos. Choisir sa langue, c'est trouver son public : l'allemand, l'utopien, l'italien, le latin, et autre baragouin, n'étaient manifestement pas faits pour créer les conditions d'un authentique échange. Mais choisir sa langue, c'est plus encore construire ce public. L'affaire, à cet égard, est tout de suite mieux engagée. Le décor est posé, les tréteaux sont montés, le show Panurge peut commencer : Pantagruel et les siens sont installés dans une position particulière, celle de spectateurs, qu'ils retrouveront bien souvent par la suite, et qui résulte directement de ce multilinguisme originaire. Encore n'est-il pas facile d'expliquer le pourquoi d'une telle scène ni de savoir dans quelle mesure elle signale, de la part de Panurge, une intention délibérée.

Nous voudrions justement nous interroger sur les raisons qui poussent un auteur, un imprimeur, un commanditaire, peut-être même un personnage, à choisir une langue plutôt qu'une autre : comment ce choix s'articule-t-il avec la construction, par les textes, de différents publics ? La Renaissance paraît une période particulièrement propice à ce questionnement. La circulation des discours, lorsqu'elle s'accélère, la diffusion des livres, lorsqu'elle s'élargit, permettent un accroissement du savoir, et son déploiement auprès d'une plus large communauté. Il faut cependant s'interroger sur la composition de cette communauté : est-elle vraiment homogène et universelle, comme une image un peu naïve de l'humanisme le laisserait accroire ? L'invention de l'imprimerie semble plutôt aller de pair avec un éclatement des auditoires : le groupe relativement homogène que formait la communauté des savants, unifiée par l'usage du latin, est désormais entouré par de nouveaux publics, qui sont fragmentés à leur tour par les différences d'éducation, de sexe, d'appartenance sociale. Ne peut-on pas imaginer alors que le choix de la langue, ou de langues différentes, permet de juxtaposer ou de superposer les appels à des publics eux-mêmes différents ? Et que ces publics parfois se complètent, parfois se contredisent, parfois se concurrencent ?

Les quelques pistes de réflexion qu'on ouvre ici ne sont sans doute pas exhaustives, mais elles pourraient s'organiser de cette façon :

L'inscription textuelle : les auditoires visés et les langues employées font-il l'objet de commentaires, de réflexions, que ce soit à l'intérieur des oeuvres ou dans leurs encadrements ? La construction des publics : quelles sont les stratégies discursives et matérielles de cette construction, et dans quelle mesure sont-elles déterminées par le choix de la langue ? comment ce choix s'articule-t-il avec les considérations de genre littéraire ? Les textes plurilingues et les traductions : quels transferts culturels impliquent-ils ? quels sont ici les auditoires visés ? le processus de publication et la distribution de ses acteurs (auteur, traducteur, imprimeur, libraire, commanditaire) obéissent-ils à des lois spécifiques ? La question du choix : choisit-on toujours sa langue ? ne peut-on pas parler de publics obligés, auxquels un écrivain gêné par l'insuffisance de son bagage linguistique serait contraint de s'adresser ? et par ailleurs, certains composites polyglottes ne signalent-ils pas un refus de choisir leur auditoire ? ce refus peut-il aller, chez un auteur, jusqu'au péril de perdre tout public ?

Les propositions de communication, de 300 mots environ et rédigées en français, concerneront des textes de la Renaissance publiés en France, ou des auteurs dont une langue d'usage au moins est le français. Elles seront soumises électroniquement avant le 31 mai 2010 à l'adresse du colloque : https://www.brocku.ca/colloque-langue-et-publics. Pour tout renseignement, merci de contacter les organisateurs, Renée-Claude Breitenstein et Tristan Vigliano à l'adresse suivante : colloquelangueetpublics@gmail.com. Le colloque sera suivi, pour les participant(e)s qui le souhaiteront, d'une visite des chutes du Niagara et des vignobles de l'Ontario.

https://www.brocku.ca/colloque-langue-et-publics

  • Responsable :
    Renée-Claude Breitenstein (Université Brock) et Tristan Vigliano (Université Lyon 2)