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La Suisse, entre consensus et conflits : enjeux et représentations

La Suisse, entre consensus et conflits : enjeux et représentations

Publié le par Marc Escola (Source : Anne-Sophie Gomez)

La journée d’études intitulée « La Suisse, entre consensus et conflits : enjeux et représentations » s’inscrit dans la continuité de la réflexion amorcée en 2013 par le groupe de travail interdisciplinaire « Germanosphères », basé à Clermont-Ferrand et dont les recherches ont conduit, en 2013, à l’organisation d’une première journée d’études sur le thème : « L’Allemagne en recto-verso – portraits d'un voisin (mé)connu », suivie à l’automne 2014 d’une journée consacrée à l’Autriche (« L’Autriche en perspective : centre(s) et marges »). Soucieux de prolonger et d’approfondir cette réflexion tout en l’élargissant, notre groupe de travail, composé d’enseignants-chercheurs en lettres, langues, sciences humaines et sociales, organisera, le 19 novembre 2015, une troisième journée d’études qui concernera, cette fois, la Suisse. L’objectif de cette rencontre est d’apporter un éclairage transdisciplinaire et diachronique sur un pays dont la singularité offre des perspectives de recherche encore largement inexploitées.

Depuis les guerres de religion, à l’époque des Lumières et avec une intensité plus marquée au cours des XIXe et XXe siècles, la Suisse a accueilli des réfugiés en provenance de la plupart des pays européens, permettant ainsi la circulation des idées religieuses, philosophiques et politiques, mais aussi artistiques. Terre d’accueil par excellence, la Suisse neutre est également depuis le XIXe siècle une plaque tournante de la diplomatie internationale, le carrefour de l’humanitaire, « marqueurs d’identité » qui, par la suite, ont pu être détournés de leur fonction d’origine. Sur le plan intérieur, la politique de la Suisse répond, quant à elle, à la nécessité de recherche de consensus liée aux diversités régionales et linguistiques. Le pays se présente ainsi comme une « démocratie de concordance »[1]. Cependant, ce système est souvent rendu responsable de l’immobilisme de la politique et de la faiblesse idéologique des partis suisses, avec pour conséquence la naissance de mouvements politiques temporaires, créés à l’occasion de votations sur un sujet, et des dissidences dans les grands partis. La prégnance du consensus a parfois pour corollaire un déplacement des conflits au niveau individuel. Enfin, la question se pose de savoir si le consensus n’étouffe ou ne dissimule pas les aspects conflictuels, s’il n’est pas « en réalité, la forme réussie de la coercition »[2]. Ceci explique que, dans la seconde moitié du XXe siècle, la Suisse a pu être perçue par certains de ses artistes comme un étau à fuir[3]. À l’inverse, elle a vu récemment éclore une talentueuse  génération de jeunes écrivains et cinéastes, comme si la créativité, après s’être déployée ailleurs, loin des frontières helvétiques, se nourrissait désormais avec profit − faute de pouvoir la résorber − de la tension entre un type de discours servant la cause identitaire, isolationniste, et l’ancrage fondamentalement multiculturel et plurilinguistique du pays.

Les contributions pourront s’interroger sur les aspects suivants :

Quelles pratiques découlent de la neutralité et du consensus (hier et aujourd’hui) ? Quels décalages peut-on observer entre la neutralité et le consensus affichés et les pratiques effectives ? Ces modèles sont-ils encore opérants et ces positions toujours tenables aujourd’hui ?
Une autre perspective pourra consister à étudier la perception de la Suisse par ses écrivains, artistes, intellectuels. Comment ces derniers représentent-ils leur pays, chroniquement soumis à la tentation du repli sur soi et de la crispation identitaire, mais aussi pays-pivot et terre d’échanges ? Et dans quelle mesure cette tension a-t-elle pu devenir une source de créativité ?

 

Notre projet étant partie prenante des travaux menés par le groupe de travail « Germanosphères », la Suisse alémanique constituera un champ d’études privilégié. Il va néanmoins de soi que les propositions portant un regard perspectif sur la Suisse romande, italophone et/ou romanche seront les bienvenues.  Afin de favoriser une approche interdisciplinaire, les collègues intéressés sont invités à proposer des communications portant sur des champs scientifiques aussi diversifiés que l’histoire, la géographie, les sciences politiques, l’histoire des idées, la littérature, la linguistique, l’histoire de l’art, la musicologie. Par cette initiative de coopération scientifique, les organisateurs souhaitent promouvoir les échanges entre chercheurs de disciplines voisines travaillant sur une même aire.

 

Les propositions de communication (environ 300 mots), assorties d’une brève notice bio-bibliographique, sont à adresser conjointement à Landry CHARRIER (landry.charrier@univ-bpclermont.fr), Anne-Sophie GOMEZ (a-sophie.gomez@univ-bpclermont.fr) et Fanny PLATELLE (fanny.platelle@univ-bpclermont.fr) jusqu’au 31 mai 2015. Vous serez notifié de l’acceptation de votre proposition au 30 juin 2015.

Langues de travail : français et allemand.

Les communications prononcées au cours de cette journée d’études feront l’objet d’une publication ultérieure.

 

[1] Pietro Morandi, « Démocratie de concordance » dans le Dictionnaire historique de la Suisse, http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F10095.php Consulté le 8/04/2015.

[2] François Masnata, Claire Rubattel, Le pouvoir suisse. Séduction démocratique et répression suave, Lausanne 1995 (1ère éd. 1975), 82, 245.

[3] Ainsi que l’a dénoncé Paul Nizon dans son Discours à l’étroit / Diskurs in der Enge (1970).