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L'objet peut-il faire la méthode ? Penser les objets artistiques à partir de méthodologies trandisciplinaires

L'objet peut-il faire la méthode ? Penser les objets artistiques à partir de méthodologies trandisciplinaires

Publié le par Vincent Ferré (Source : Quentin Rioual)

En partant des Études théâtrales et de l’Histoire de l’art, cette journée d’étude se propose d’interroger les vertus et les difficultés de la comparaison, du déplacement, de la circulation méthodologiques, et ce dans une perspective transdisciplinaire.

Alors qu’elles ont définitivement légitimé leur intérêt scientifique et leur place universitaire jusque dans les plus grandes institutions, les Études théâtrales sont traversées au début du XXIe siècle par des questionnements pluridisciplinaires variés. En outre, du fait d’une internationalisation accrue de la recherche, elles sont au cœur d’un système scientifique vaste qui les place tantôt près de la littérature (courant classique voire classiciste), tantôt près des arts vivants et numériques (courant moderne), ou qui ne les a pas encore intégrées. Dans ce dernier cas, l’accueil des Études théâtrales peut se faire dans le cadre de la recherche en Histoire de l’art. Mais cela oblige alors à redéfinir, dans le contexte français, le cloisonnement existant entre la discipline et les méthodologies historiennes appliquées aux Beaux-Arts en Histoire de l’art et aux arts vivants en Histoire culturelle ; isolement méthodologique facilité par un enseignement post-bac +2 clivant, et entériné à l’échelon post-doctoral par les sections du Conseil National des Universités.

Si un tel constat peut être dressé pour les Études théâtrales et l’ensemble des disciplines entendues comme « Arts du spectacle », un autre constat de clivage peut être établi chez les Historiens de l’art, dont certains cherchent à décloisonner leurs méthodologies et intégrer des perspectives extradisciplinaires qu’ils pensent fondamentales pour le traitement intègre de leurs sujets. Le clivage entre l’Histoire et l’Art chez les chercheurs en Histoire de l’Art est bien connu et reste sensible malgré des évolutions. On connaît les réserves de cette partie des chercheurs qui considère ne devoir écrire l’Histoire de l’art qu’à partir des œuvres elles-mêmes et qui est souvent très critique vis-à-vis de l’autre partie, qui trouve dans la sociologie ou dans les méthodes de quantification, par exemple, des perspectives permettant de penser, se défendent-ils, autant le contexte global de ces œuvres que les œuvres elles-mêmes.

Dans ces deux cas, il est permis de se demander s’il ne s’agit in fine que d’une question de perspectives, ou si cela engage plus spécifiquement les objets pensés, la tradition disciplinaire, les structures universitaires...

 

La journée d’étude ici proposée présente ainsi un double caractère : d’une part poursuivre la structuration respective de disciplines en intégrant dans leurs méthodologies des outils qui fondent les approches d’autres disciplines ; d’autre part, faire reconnaître, sur certains objets de recherche, l’interdépendance fondamentale d’arts (théâtre et peinture, par exemple) encore méthodologiquement et institutionnellement cloisonnés.

Il s’agit d’inviter à l’occasion de cette journée les doctorant.e.s et chercheur.e.s à contribuer à ce débat par l’intermédiaire de communications s’intéressant à des objets d’étude faisant appel à cette pluralité méthodologique. Les discussions porteront sur la nécessité de recourir à des méthodologies ou perspectives, a priori ou de fait, extérieures à la discipline d’inscription.

 

De cette manière, on questionnera la possibilité du dépassement de la qualification d’un objet selon sa nature (théâtre, peinture, danse) par l’étude, par exemple, de phénomènes artistiques transdisciplinaires non cloisonnés se présentant davantage comme une épistémé ou un courant de pensée (ex. : le symbolisme), comme un art intégré (ex. : l’architecture dans la scénographie des salles de théâtre), ou comme une pratique d’artiste (ex. : Tadeusz Kantor comme metteur en scène plasticien). Entrevoir la possibilité de réfléchir non en termes de disciplines mais en termes d’idées partagées et de champ intellectuel, tout en ayant en tête les relations aux différents champs artistiques propres, permettrait ainsi d’ajuster la méthodologie à l’objet, et non l’objet à la méthodologie. En outre, une attention particulière sera apportée à la dimension transnationale des objets d’étude, souvent trop aisément cantonnés au territoire français par un postulat méthodologique abusif. Il sera en effet considéré comment le détour par l’étranger est parfois concomitant d’une réception décloisonnée, du fait d’une structuration différente des institutions, et donc des champs.

 

Axes

La période historique de cette journée d’étude s’étend de la fin-de-siècle aux premières années d’après Seconde guerre mondiale. En plus des enjeux disciplinaires propres que les avant-gardes artistiques laissent à penser à partir de la fin du XIXème, cette circonscription doit permettre d’identifier l’extension « disciplinaire » et transnationale des disciplines, depuis la fin d’une époque de pratiques institutionnalisées et codifiées, jusqu’à une période d’après-guerre qui voit notamment se développer, sur le fondement des hybridations artistiques du premier XXème siècle, la performance, objet pleinement à cheval sur les disciplines et déjà accueilli par l’Histoire de l’art.

Les communications pourront s’inscrire dans les axes de réflexion suivants :

 

Axe 1 : Les apports des sciences humaines et sociales à la recherche en art

Plusieurs disciplines pourront ici être convoquées, mais nous accueillerons volontiers des communications traitant par exemple de l’apport des méthodes historiennes en Histoire de l’art (quantification, prosopographie) et de ses applications envisageables en Études théâtrales. Seront également bienvenues les réflexions portant sur l’intérêt des outils et de la perspective de la sociologie pour étudier l’événement théâtral comme les logiques circulatoires et économiques dans les champs artistiques. Les outils que sont la cartographie ou encore la statistique, venues des disciplines géographique et mathématique, pourront également faire l’objet des discussions.

À l’inverse, on pourra aussi choisir d’identifier à quels endroits les sciences humaines et sociales peuvent tirer parti des approches de la recherche en art.

 

Axe 2 : La transdisciplinarité et l’internationalisation de la recherche

Qu’on y trouve un modèle ou simplement un détour, l’étranger peut aider à décloisonner les formations disciplinaires françaises dans la mesure où les formations qu’il propose ne recoupe pas celles proposées en France. On pourra alors s’intéresser, tant en termes historiques qu’en termes prospectifs, à des cas de croisements transdisciplinaires légitimés hors de France. En observant à la fois à quelle échelle ces croisements ont été entérinés (équipe de recherche, école doctorale, unité de formation et de recherche, …), et sous quelles formes ils se sont concrétisés, on réfléchira aux expériences ou modèles possiblement importables. On aura à cœur d’identifier tant les raisons de cette légitimation des cursus et perspectives de recherche croisés que les résistances qu’elle aura pu connaître.

 

Axe 3 : Des outils numériques complexes transversaux

Les outils numériques complexes et la recherche dans le domaine des digital humanities sont sans aucun doute amenés à rapprocher techniquement et méthodologiquement certaines disciplines, grâce d’une part à une formation technologique des chercheurs de plus en plus importante, et d’autre part aux possibilités que les nouveaux moyens de recherche, de compilation systématique et de spatialisation intelligente laissent entrevoir. Ici encore, il s’agira à la fois de faire un point sur les outils numériques sollicités dans diverses disciplines et d’envisager des applications extra-disciplinaires possibles, mais aussi d’imaginer l’intérêt que pourraient revêtir des collaborations numériques transdisciplinaires dans la formation d’un savoir plus global.

 

Précautions

Si nous partons de l’Histoire de l’art et des Études théâtrales, et de leurs rencontres possibles, nous n’excluons ici nullement les autres disciplines de la recherche en art, et accueillerons volontiers des propositions de communication questionnant, dans une perspective transdisciplinaire, le cinéma, la danse, les arts du cirque, les arts de la rue, la musique, notamment.

Nous attirons l’attention sur le fait que la question de l’intermédialité des objets d’art ne sera pas traitée lors de cette journée d’étude, sauf si elle s’attache à la spécificité des croisements méthodologiques qu’elle requiert.

En outre, il nous paraît utile de bien distinguer ici l’extension de l’extra-disciplinaire, et donc de distinguer le domaine transdisciplinaire, dans lequel se croisent de mêmes idées de manière transversale ; celui du multidisciplinaire ou du pluridisciplinaire, où l’on fait se juxtaposer plusieurs disciplines (dans un but notamment comparatiste) ; et celui de l’interdisciplinaire, qui part d’une discipline de focalisation mais sollicite du contenu ou des méthodes dans une autre discipline.

 

Perspectives

En somme, il s’agira avec cette journée d’étude d’imaginer un retournement méthodique non plus en adaptant les sujets aux disciplines existantes, mais en adaptant les méthodologies éventuellement extra-disciplinaires, aux objets de recherche.

À la fin de la journée, un bilan sera fait des acquis méthodologiques éprouvés par les chercheur.e.s et, au vu des résultats, nous pourrons envisager de créer un laboratoire de recherche axé sur les problématiques et les promesses du transdisciplinaire dans le cadre de la recherche en art.

 

 

Comité d’organisation

Margot Degoutte, doctorante en Histoire de l’art

Nicolas Laurent, doctorant en Histoire de l’art

Géraldine Prévot, doctorante en Études théâtrales

Quentin Rioual, doctorant en Études théâtrales

 

Équipe d’accueil

Laboratoire Histoire des Arts et des Représentations (EA 4414) ;

Université Paris-Ouest Nanterre

Le comité scientifique sera présenté lors de l’annonce du programme de la journée.

Modalités de soumission des communications

Les propositions de communication, de 300 mots maximum, devront nous être adressées,  accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique, avant le 1er février 2016, à l’adresse suivante : transdisciplinarite@gmail.com

 

Calendrier

Date limite de remise des propositions

1er février 2016

Notification de la décision du comité organisateur

1er mars 2016

Journée d’étude

Début juin 2016 - Paris