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L'invention du

L'invention du "mauvais goût" à l'âge classique (XVIIe-XVIIIe siècles)

Publié le par Camille Esmein (Source : Carine Barbafieri)

L'invention du « mauvais goût »

à l'âge classique (XVIIe-XVIIIe siècles)

Colloque international (Valenciennes, 10-11 déc. 2009)

Org. Carine Barbafieri, Jean-Christophe Abramovici

            Si la métaphore du goût par laquelle on attribue à l'esprit la faculté de la langue et du palais apparaît déjà chez Ronsard ou chez Montaigne, pour s'imposer ensuite dans la première moitié du XVIIe siècle, l'expression figée de « mauvais goût » semble dater de la fin du XVIIe siècle (dans les Femmes savantes, il est question de ceux que « le mauvais goût du siècle a su mettre en crédit »), pour désigner autant la défectueuse faculté de juger que la mauvaise saveur de la chose elle-même. Cette idée qu'un type de forme, de sujet, de langage ou de style constitue une forme d'écriture déplacée, dégradée ou inférieure traverse toute l'époque classique. Mais selon quels critères juge-t-on mauvais un texte, un style ou une forme ? À côté de la convenance poétique apparaissent des critères moraux, politiques, sociologiques. Un certain burlesque peut être de mauvais goût, mais le mauvais goût peut aussi désigner ce qui heurte la bienséance (il a alors à voir avec la violence et l'obscénité), sans compter qu'il a aussi partie liée avec le « génie des nations » (au XVIIe siècle, le goût espagnol devient l'emblème du mauvais goût) ou encore l'opposition noblesse-bourgeoisie, et l'antagonisme Paris-Province (mauvais goût bourgeois et provincial). Si le goût en devenant mauvais paraît s'être éloigné de ses origines sensibles, il convient de rappeler que l'âge classique connut aussi de nombreuses révolutions culinaires, qu'on rejeta au travers des « pernicieux ragoûts » les anciennes habitudes du mélange et de l'épicé, et qu'une « nouvelle cuisine », plus simple et diététique, vit le jour sur les cendres de l'ancienne…

            Sans nous limiter au seul champ littéraire, voici quelques-uns des axes que pourrait suivre notre réflexion, la présente liste ne se voulant pas exhaustive :

-         une généalogie de la notion de mauvais goût : le mauvais goût est-il au départ la saveur amère ? quelles sont les racines rhétoriques, culinaires et médicales de la notion ?

-         le corpus de la littérature de mauvais goût : quels textes ou quels types de texte ont été réellement qualifiés de « mauvais goût », ont été considérés comme illégitimes ou déplacés ? Les pratiques sociales de la littérature expliquent-elles cette relégation ?

-         le mauvais goût culinaire : apparaît-il dans les livres de recette ou simplement dans les discours nombreux sur la cuisine ? de quoi se compose-t-il ?

-         une distinction des critères du mauvais goût : les genres mineurs sont-ils, en poétique ou en histoire de l'art (voir le cas de la peinture de genre), nécessairement de mauvais goût ? Le mauvais goût recoupe-t-il la notion de disconvenance ? En quoi le mauvais goût se confond-il  avec le goût populaire, le goût provincial, le goût bourgeois, le goût du vieux, le goût du faux et du “toc” ?

-         une revendication du mauvais goût : le mauvais goût est-il erreur de jugement ou trouve-t-on une proclamation glorieuse de certains écrivains ou artistes qui mettent en avant leur mauvais goût ?

-         Un usage du mauvais goût : l'utilisation dans le discours critique, en particulier dans les polémiques et querelles littéraires ou esthétiques, de l'accusation de mauvais goût, etc.

Les propositions de communication sont à envoyer jusqu'au 15 juin 2009 aux deux organisateurs (CBarbafieri@aol.com, jean-christophe.abramovici@univ-valenciennes.fr).