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L'inscription du monument (XVIe-XVIIIe s.) (1)

L'inscription du monument (XVIe-XVIIIe s.) (1)

Publié le par Julia Peslier (Source : Jean-Philippe Grosperrin)


Jeudi 9 juin 2011
Journée d'études
L'inscription du monument (XVIe-XVIIIe s.) (1)


organisée par Jean-Philippe Grosperrin
dans le cadre des travaux de l'équipe ELH / PLH
10h00-17h00
Université de Toulouse - Le Mirail
Maison de la Recherche
Salle D 29 (salle des Actes, rez-de-chaussée)


10h : Ouverture de la journée
par Jean-Fr. Courouau et Jean-Ph. Grosperrin (Université de Toulouse - Le Mirail)

10h15 : Pascale Chiron (maître de conférences à l'Université de Toulouse) :
« Sermons et pompe funèbres » ou comment publier le monument du prince après la mort de François Ier

11h : Laurent Susini (maître de conférences à l'Université de Paris IV - Sorbonne) :
Le "Mémorial" de Pascal, texte monument

Pause déjeuner

14h : Pauline Decarne (doctorante à l'Université de Paris IV - Sorbonne) :
« Si de la croix on fait une lyre... » Les aménagements des Temples fabuleux de l'immortalité du XVIe au XVIIIe siècle

14h45 : Jean-Philippe Grosperrin (maître de conférences à l'Université de Toulouse) :
En ma fin est un monument : la scène ultime dans La Clemenza di Tito (Métastase, Mazzolà, Mozart)

15h30 : Thierry Favier (professeur à l'Université de Poitiers) :
Le motet à grand choeur de Louis XIV à Louis XVI : entre musique monumentale et monument de musique


N.B.

Cette journée d'études, qui doit être suivie d'une deuxième sur le même sujet en 2012, complète les travaux d'un séminaire de recherche littéraire sur l'inscription du monument (du XVIe au XVIIIe siècle), qui ont lieu à l'Université de Toulouse depuis janvier 2010. Voici quelques précisions sur ce programme qui donnera lieu à la publication d'un volume collectif en 2013-2014.

Argument
La métaphore du monument pour caractériser l'oeuvre d'art ou le geste créateur appartient aux fondements de la culture occidentale. En latin, le "monumentum" a une double fonction de mémorial et d'avertissement : « monumentum, quia monet mentem », « Monumentum, vel monimentum, quidquid nos monet » (Dictionnaire de Trévoux, 1771). Il est signe du souvenir tout en ayant valeur de discours, s'il est vrai que l'objet matériel porte une parole inscrite, pré-existante mais indéfiniment actualisée.
Or, comme le signalent les dictionnaires de l'âge classique, la valeur testimoniale de « marque publique », inhérente au monument, s'actualise simultanément dans des édifices (« les monuments de la grandeur romaine », c'est-à-dire de ce qui n'est plus) et dans des documents écrits, comme l'indique avec force Furetière : « se dit encore des tesmoignages qui nous restent dans les Histoires & chez les Auteurs des actions passées. Bien de grands bastiments sont peris, dont il nous reste quelques monumens dans les Livres. Les Auteurs ont laissé à la posterité d'éternels monuments de la gloire des grands hommes. »
Le phénomène capital est que le monument permet de désigner non seulement l'objet d'un discours mais le discours lui-même, ouvrant ainsi la voie à l'examen des procédures qui constituent un texte en monument, en relation ou non avec un édifice visible, et sans exclusion de genre ou de forme. Ce qui semble se dégager alors, c'est un socle culturel commun qui permet la réversibilité de l'objet-monument et de l'écriture : à Athènes, disait Cicéron, on marche sur des histoires, et c'est dans les pages des livres, ou dans les discours, qu'on rencontre des monuments.

Cette signification primordiale du monument, englobante et antérieure à une conception restreinte aux arts de l'architecture, s'illustre dans l'exemple privilégié du tombeau. Le tombeau objective sur un mode esthétique et sacré une présence disparue, c'est-à-dire qui représente une absence, mais il porte également une ou plusieurs inscriptions, paroles pétrifiées, pré-écrites, mais adressées au spectateur.
En ce sens, le monument opère une interaction entre les vivants et les morts, mais engage par là même une logique particulière de destination et de temporalité où le présent porte à la fois un passé et un futur. Inscrite dans une logique complexe de représentation, l'idée de monument met aussi en oeuvre ce qu'on peut appeler une scénographie, comprise simultanément comme une certaine figuration de l'espace-temps et comme une certaine structure énonciative et rhétorique.

Il s'agira donc, sans se restreindre aux questions de l'épitaphe, du tombeau poétique ou de l'ecphrasis, à explorer « l'inscription du monument » ou si l'on préfère sa textualisation (et donc ses contextes). Cette formulation synthétique doit être comprise au moins en trois sens :

1) Le discours sur les monuments, ou l'inscription du monument dans le discours.

On se demandera en particulier en quoi ce discours sur les monuments se caractérise par la littérarité, et de quelle sorte. On s'interroger aussi sur la dimension de « marque publique » associée à la fonction de « célébration » : est-elle stable ? à quelles conditions le monument peut-il revêtir une valeur privée ? ou du moins de quelle manière fonctionne la relation du privé et du public ?
Un champ particulier : l'éloquence sacrée (l'oraison funèbre au premier chef, et son économie des « monuments de la grandeur »). Comment la parole s'inscrit-elle dans un ensemble complexe de "représentations" pour se constituer elle-même en un monument distinct du décorum de la cérémonie ?

2) Le discours constitué en monument poétique
On s'intéressera en particulier aux rapports entre une poétique du monument et une rhétorique de la voix (parénèse, prosopopée, fonctions respectives du didactique, de l'éthique et du pathétique). Comment se construisent alors des scénographies littéraires du monument, et à quelles fins ?

3) Le moment-monument, ou l'inscription du monument dans l'architecture d'ensemble de l'oeuvre littéraire : économie des genres historiographiques, de la poésie (lyrique, épique), des lieux de la fiction romanesque, des genres dramatiques (scénographies objectives ou imaginaires).