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Nouvelle parution
L'esthétique, aujourd'hui ?, Figures de l'art n°10

L'esthétique, aujourd'hui ?, Figures de l'art n°10

Publié le par Camille Esmein (Source : Amancio Tenaguillo y Cortázar)

Figures de l'Art, 10 : L'esthétique, aujourd'hui ?

Déc. 2005, Presses Universitaires de Pau.

Rédacteur en chef : Bernard Lafargue, Professeur d'histoire de l'art et d'esthétique à l'Université Michel de Montaigne-Bordeaux III, critique d'art.

L'esthétique est-elle encore possible aujourd'hui? Aujourd'hui, c'est-à-dire après la fin de l'art, que Friedrich Hegel, dans le Berlin des premières décennies du 19e siècle, diagnostique comme "romantique" ou "chrétien", et dont des philosophes aussi divergents qu'Adorno ou Danto prolongent l'agonie d'un petit siècle agonistique de téléologie moderniste théologico-politico-philosophique, pour le faire se dissoudre, cette fois-ci définitivement, dans un pluralisme cacophonique et insane, culturel et multimédiatique, racolleur et déceptif, autophagique et ludique. Et si la fin pop de l'art chrétien occidental dans les boîtes Brillo était, dans une perspective plus schellingienne ou nietzschéenne, l'aurore d'un art en son âge mondial, diffus, profus, mythologique, païen et paillettes, agité par les flux d'un "devenir mineuritaire" (Mille Plateaux), où le fait polémique majeur ne serait plus l'absence de critères mais, tout au contraire, son nombre infini?

Non seulement l'artiste d'après les ready-mades pop de Warhol peut faire de l'art avec tout, mais il peut faire l'artiste en prenant n'importe quelle figure. Il paraît même tout heureux de sortir du petit atelier aux relents de cellule monacale, où voulait le confiner un Picasso sans doute encore trop pieux. Aujourd'hui, l'artiste peut se faire balnéothérapeute comme Cai Guo Qiang, masseuse comme Marie-Ange Guilleminot, éleveur de cochons comme Rosemarie Trockel ou Carsten Höller, éleveur de larves aquatiques de trichoptères joailliers comme Hubert Duprat, éleveur d'éléphants thaïlandais peintres comme Komar & Melamid, éleveur de courges japonaises comme Anish Kapoor, cuisinier comme Daniel Spoerri ou Matthew Ngui, chirurgien esthétique en chef comme Orlan, éclairagiste comme James Turrel ou Yan Kersalé, emballeur comme Christo, charcutière comme Natacha Lesueur, femme de ménage comme Sophie Calle, truqueuse comme Annette Messager, époux christo-pornographe comme Jeff Koons, sculpture chantante dorée comme Gilbert and George, entrepreneur capitaliste comme Philippe Ramette, designer comme Gaetano Pesce ou Bertrand Lavier, paysagiste comme Reno Salvail, Chris Drury, Andy Goldworthy ou Richard Long, maître d'oeuvre en objets divers comme Wim Delvoye, Fabrice Hybert ou Philippe Ramette, couturier comme Lucy Orta, Issey Miyake, Aline Ribière, Jan Fabre ou Yinka Shonibare, tanneur comme Farid Belkahia, installateur d'ambiances comme Martine Aballéa, parfumeur comme Titus Carmel ou Maurice Maurin, maître verrier comme Antoine et Etienne Leperlier, Jeff Koons ou Jean-Michel Othoniel, homme à tout faire comme Ben, filles à tout faire comme les Postmodèles bordelaises, confectionneur de monstres en papier mâché polychrome -alebrijes- comme les frères Linares, copiste comme Elaine Strurtevant, Sherrie Levine ou Mike Bidlo, peintre du dimanche comme Jean Le Gac, etc. La liste des nouveaux métiers d'art n'en finirait pas de s'allonger; d'autant plus que la plupart des artistes postmodernes, à l'image de Warhol, un jour cinéaste le lendemain peintre, le matin en Drag Queen, le soir en Drag King, passe à l'envi d'un métier à l'autre, d'un genre à l'autre, d'une image à l'autre.

Quelle philosophie de l'art est encore possible après des expositions paradigmatiques comme Les Magiciens de la terre (Centre Georges Pompidou, Paris 1989) ou Partage d'exotismes (Halle Tony Garnier, Lyon 2000) habiles à confronter, sur la scène internationale , ces mille et un nouveaux visages de l'art et de l'artiste ? L'esthétique doit-elle devenir un répertoire de VIP, un Who's Who nominaliste, un livre des records, un cabinet télévisuel de curiosités touristiques, un patrimoine de jurisprudences exotiques, un recueil de goûts disparates, un journal intime, une confession en attente de confirmation, un centon de parures, un patchwork de performances, une poétique de parades, une anthropologie comparée des mondes de l'art, une logique anesthétique des cartes de reconnaissance et de crédit, une pragmatique des airs et stratégies qui marchent, une stylistique ubuesque où toutes les oeuvres sont blanches, un formalisme transcendantal où toutes les oeuvres sont noires, un universalisme d'empyrée où toutes les oeuvres se valent, un salon web d'exercices et régimes divers, un concerto pour mains gauches, une symphonie polyphonique, une mythologique païenne, etc. ?

 

Sommaire

AVANT-PROPOS

Bernard Lafargue (Université Bordeaux III) : Les retrouvailles de l'esthétique En ligne

- L'ESTHÉTIQUE COMME DÉFINITION DE L'ART

Arthur Danto (Université de Columbia / New York et critique d'art à The Nation) : Les significations incarnées comme Idées esthétiques

Jacques Morizot (Université Paris 8 et CNRS) : La nouvelle vitalité de la philosophie de l'art

Dominique Chateau (Université Paris I) : L'avenir de l'esthétique

Michel Guérin (Université Marseille-Aix en Provence) : De la Disparition

Thierry de Duve (Université de Lille) : La nouvelle donne. Remarques sur quelques qualifications du mot "art"

- L'ESTHÉTIQUE COMME EXPÉRIENCE

Yves Michaud (Institut Universitaire de France et Université de Rouen) : Redimensionner l'esthétique - et revisiter la philosophie de l'art

Ken-ichi Sasaki (Université de Tokyo) : Un nouvel Horizon pour la philosophie de "l'aisthêsis" et du beau

Alain Chareyre-Méjan (Université de Marseille-Aix en Provence I) : La profondeur des apparences (introduction au bonheur esthétique)

Richard Shusterman (Université de Floride / USA) : Les Pluralismes de l'esthétique : Pratiques, disciplines, histoires

- L'ESTHÉTIQUE COMME PRAGMATIQUE

Jean-Pierre Cometti (Université de Marseille-Aix en Provence) : Entre être et faire: l'esthétique à la croisée des chemins

Luciano Vinhosa (Université de Rio de Janeiro / Brésil) : Penser l'oeuvre dans son sens élargi

Carole Talon-Hugon (Université de Nice) : Pour une esthétique non formaliste

Ronald Shusterman (Université Bordeaux III) : Les Delvoye, Duchamp, et "autres" Kapoor : pour une théorie agrammaticale de l'art

- L'ESTHÉTIQUE AUX CONFINS DE L'HISTOIRE

Marc Jimenez (Université Paris I) : L'art contemporain pense le monde

Jean-Marc Lachaud (Université Paul Verlaine-Metz) : Notes pour la sauvegarde d'une réflexion esthétique critique

Bertrand Rougé (Université de Pau et des Pays de l'Adour) : L'ironie sans fin de l'art. Pour un "grand récit" du renouement

Jos de Mul (Université Erasmus Rotterdam / Pays-Bas) : Résonances de la mort de Dieu. Après les fins de l'art

Bernard Lafargue (Université Bordeaux III) : L'Idée d'une esthétique critique et polyphonique face à l'éternel retour de l'art en son âge mondial et pa(n)ïen

Contact : bernard.lafargue@univ-pau.fr

Figures de l'Art n° 10


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