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Distorsions cognitives : formes, récits, imaginaires (domaine anglophone)

Distorsions cognitives : formes, récits, imaginaires (domaine anglophone)

Publié le par Marc Escola (Source : Blandine Pennec)

Journée d'étude CAS (Cultures Anglo-Saxonnes, EA 801)

Université Toulouse-Jean Jaurès - vendredi 13 avril 2018

organisatrices : Nathalie Vincent-Arnaud & Blandine Pennec

Distorsions cognitives : formes, récits, imaginaires (domaine anglophone)

 

La notion de distorsion, comprise en tant que déformation, déséquilibre ou aliénation, suppose un écart par rapport à une norme (implicite ou explicite). Ce que le psychiatre américain Aaron T. Beck a désigné, dans les années 1960, par le terme de « cognitive distortions » est un ensemble de phénomènes relevant d'interprétations et de raisonnements erronés effectués par un individu à partir d'informations qu'il a reçues. Au nombre de ces phénomènes figurent notamment la surgénéralisation, le raisonnement émotionnel, le règne de l'arbitraire et du péremptoire, autant de manifestations d'automatismes mettant en œuvre ce que Ruth Menahem, dans Langage et folie : essai de psycho-rhétorique (1986), a décrit de manière globale comme « l'élément affectif, passionnel qui modifie la relation du sujet à la réalité et réorganise la perception du monde ».

D’un point de vue linguistique, il s’agira d’examiner les formes que peuvent engendrer de telles distorsions, qu’il s’agisse d’inadéquations, de ratés, de variations par rapport à un standard. Les non-coïncidences du dire, mises en évidence par Jacqueline Authier-Revuz (« Les non-coïncidences du dire et leur représentation méta-énonciative », Linguisticae Investigationes, 1993), sont ici particulièrement pertinentes, qu’elles concernent le dire par rapport à lui-même (affecté d’autres sens, par le jeu de l’homonymie ou de la polysémie notamment), le rapport au référent visé (correspondant principalement à des défauts de nomination, ou encore les non-coïncidences entre interlocuteurs). Le constat d’une distorsion peut alors mener à des procédés d’ajustement ou de réajustement. Ces derniers constituent le prolongement des phénomènes de distorsion, qui révèlent eux-mêmes du « jeu » dans la langue et dans le discours – au sens de béance, d’écart (voir notamment Antoine Culioli, Pour une linguistique de l'énonciation : domaine notionnel, 1999, et Michel Picard, La Lecture comme jeu, 1986). On pourra également s’intéresser aux phénomènes de sur-détermination du sens, selon la dénomination de Catherine Fuchs, qui examine particulièrement les ambiguïtés (« L’ambiguïté : du fait de langue aux stratégies interlocutives », L’ambiguïté, 2009), autrement dit les cas dans lesquels l’interprétation peut faire l’objet d’un dédoublement. Si les ambiguïtés sont souvent involontaires, elles peuvent également être produites à dessein, correspondant à diverses formes de stratégies énonciatives. C’est ce qu’illustrent notamment de nombreuses œuvres littéraires –  romanesques, théâtrales, poétiques, autobiographiques –qui jouent sur l’existence de plusieurs niveaux de réception.

Un certain nombre de figures rhétoriques peuvent également être rattachées à cette notion de distorsion, au rang desquelles la métaphore, la métonymie, ou encore l’euphémisme. Il se produit en effet un écart, une distorsion entre le sens littéral et le sens qui est donné à entendre, dont peut résulter une modification perceptuelle susceptible de « remplacer notre conception antérieure de la réalité » (Denis Jamet et Manuel Jobert (dir.), Empreintes de l'euphémisme. Tours et détours, 2010). Les implications de telles figures, ainsi que leurs traductions, pourront donc trouver toute leur place au sein de cette étude des formes de la distorsion, permettant d'envisager les divers phénomènes à la lumière de ce que Jean-Jacques Lecercle a appelé « stylistique des singularités » (Bulletin de la Société de Stylistique Anglaise, 2008).

D'une manière générale, le vertige suscité, chez le lecteur ou le récepteur d'un texte donné, par certaines manifestations particulières de la distance énonciative pourra conduire à une mise en question des notions d'aliénation et d'étrangeté. Qu'est-ce que l'« étrangeté » d'un texte ou d'un produit de l'imagination, qu'est-ce qui relève d'une perspective « aliénante », voire pathologique, du point de vue tout à la fois de son inscription et de son identification ?

Ces pistes ne sont bien sûr qu'indicatives, et toute autre perspective, quels que soient le domaine (littérature, art, politique, etc.) et l'aire géographique anglophone considérés, sera la bienvenue.

Les propositions de communication, en français ou en anglais, d'environ 300 mots et accompagnées d'une courte notice biographique, devront parvenir simultanément à Blandine Pennec (pennec.blandine@wanadoo.fr) et Nathalie Vincent-Arnaud (nathalie.vincent-arnaud@univ-tlse2.fr) pour le 31 octobre 2017