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Image(s), imaginaire(s) et réalité(s) de la bibliothèque

Image(s), imaginaire(s) et réalité(s) de la bibliothèque

Publié le par Alexandre Gefen (Source : laboratoire LIS (Université de Lorraine))

Image(s), imaginaire(s) et réalité(s) de la bibliothèque

Colloque international et interdisciplinaire jeunes chercheurs du centre

Littératures, Imaginaire et Sociétés (LIS)

21-22 octobre 2014 Université de Lorraine – Nancy – France

 

La bibliothèque relève d’un champ de réflexion à part entière qu’écrivains et artistes ne cessent d’explorer. Ses représentations permettent de s’interroger sur le rapport des hommes ou d’un individu à un lieu (le cabinet, la bibliothèque en tant qu’espace ou institution), à une pratique (la lecture, le travail), à un contenu (les savoirs), à un objet (le livre). La bibliothèque génère tout un  imaginaire et se conçoit, à travers différentes époques, selon des réalités et des évolutions tangibles. 

Les images et les conceptions de la bibliothèque font de cette dernière un motif particulièrement riche, exploité sous des formes diverses et suscitant bon nombre de réflexions. Nombreuses sont les œuvres qui témoignent de cette singularité et certaines vont même jusqu’à faire de la bibliothèque un lieu de possibles grâce aux savoirs qu’elle renferme. Nous songeons par exemple à la célèbre « Bibliothèque de Babel » (Borges, 1941) conçue comme un univers total et infini, que l’on retrouve dans la bande dessinée Omnopolis (Lainé, Geyser, 2006-2009). Nous pensons également aux nombreux récits qui évoquent l’autodafé : « A qui la faute ? » (Hugo, 1871), Fahrenheit 451 (Bradbury, 1953), pour n’en citer que deux, qui rappellent l’importance de la liberté d’expression et de diffusion littéraires et semblent ainsi élaborer une pensée critique sur notre rapport à la connaissance et à la mémoire. Nous pouvons enfin observer les nombreuses représentations plastiques ou imagées de la bibliothèque, qu’elle soit le sujet principal de la composition ou un élément de décor. 

Réelle ou idéale, la bibliothèque est cet espace sacré où l’on archive la pensée et l’imaginaire pour les préserver de l’oubli. Si elle est tournée vers le passé (fonds anciens, patrimoine, conservation), la bibliothèque est également conçue comme un lieu en devenir et en constante évolution, en témoigne le projet de biblio-connexion qui offre à un large lectorat un accès ludique et interactif à son contenu. La bibliothèque est sans cesse repensée et redéfinie au fil des œuvres et des époques, et est incontournable pour tout chercheur, quelle que soit l’étude dans laquelle il se lance. En faisant dialoguer les disciplines, ce lieu inspire savants, auteurs et artistes, tout comme il attire lecteurs et bibliophiles en quête de références ou d’inédits.

Les quelques exemples cités nous permettent d’ores et déjà d’envisager la bibliothèque dans ses rapports dynamiques, étroits et complexes avec le réel et l’imaginaire, l’écriture et la représentation. Nous invitons donc les jeunes chercheurs à aborder de manière transversale et pluridisciplinaire la bibliothèque en tant qu’objet de réflexion et de représentation. Dans cette perspective, les propositions d’intervention pourront être dirigées selon les trois axes suivants :

Bibliothèques et auteurs : un lien matériel et idéel

Qu’elle soit physique, numérique ou intérieure, qu’il s’agisse du lieu où sont compilées les œuvres qu’il a écrites ou qui l’ont inspiré, ou encore celle qu’il met en scène dans son récit, le lien entre l’auteur et la bibliothèque peut se concevoir comme une représentation de l’imaginaire de l’artiste qui oscille sans cesse entre l’intime et le public. En effet, la bibliothèque peut illustrer la notion d’intertextualité, comme elle peut aussi symboliser plus généralement la matière transmise par un auteur à un lecteur plus ou moins défini, consciemment ou non. Conçue comme un espace où l’on hiérarchise (en les classant et archivant) des ouvrages et les idées qu’ils développent, la bibliothèque pose la question de la légitimité des sources de l’artiste et soulève la problématique de la réception de l’œuvre. Certains des enjeux de cette relation entre écrivain et bibliothèque sont perceptibles dans les Essais (1595) où Montaigne nous présente sa « librairie » comme un lieu de lecture, d’écriture, de promenade et de rêverie : « Là, je feuillette à cette heure un livre, à cette heure un autre, sans ordre et sans dessein, à pièces décousues : Tantôt je rêve, tantôt j’enregistre et dicte, en me promenant, mes songes, que voici. »[1] La similitude du rapport de Montaigne à sa bibliothèque avec le projet d’écrire « à sauts et à gambades » est ici frappante.

 

Regards sur la bibliothèque : représentations entre réel et invention

Il s’agit ici d’interroger les formes diverses des images de la bibliothèque, réelle ou fictive, dans les lettres et dans les arts. (Re)créée par l’imaginaire et par le discours, elle peut devenir un lieu propice à l’action, à la méditation et aux découvertes en tous genres. Pensons ici au roman Pauline (1838) d’Alexandre Dumas dans lequel l’héroïne éponyme découvre dans la bibliothèque de sa demeure l’entrée d’un terrible souterrain… Cette mystérieuse bibliothèque de fiction est le lieu de passage qui fait basculer le sort de la protagoniste tout comme elle participe pleinement de l’esthétique gothique du roman. Aussi, lorsqu’elle est représentée dans une œuvre, la bibliothèque transcende sa fonction de simple décor. Par exemple, dans les Lettres Persanes (1721) de Montesquieu[2], Rica raconte sa visite guidée de la bibliothèque du couvent Saint-Victor où il découvre, jour après jour, les livres religieux, les œuvres des poètes et les textes de sciences. La bibliothèque parisienne et ses ouvrages sont ici soumis aux commentaires du guide et aux jeux de points de vue du roman épistolaire. Les valeurs, les formes et les buts des représentations de la bibliothèque nous renvoient à des images multiples du savoir et nous interrogent sur les liens qui unissent le livre aux auteurs, aux lecteurs, et plus largement aux artistes et aux spectateurs.

 

Lire et travailler en bibliothèque : figures de chercheurs et bibliophiles

Le Dictionnaire de l’Académie française de 1762 définit ainsi la bibliothèque : « le lieu où l'on tient un grand nombre de Livres rangés en ordre. » Cette définition, aussi évidente semble-t-elle, est à considérer au regard de l’apparition de nouveaux supports, formats et lieux, parfois numériques et dématérialisés. L’apparente permanence de cette définition, ainsi que ses récentes métamorphoses, nous invitent à nous pencher sur les usagers mêmes de la bibliothèque. Qu’il s’agisse d’une bibliothèque d’étude ou de lecture publique, de ressources numériques ou de fonds privés, notre réflexion ne saurait ignorer les rapports du lecteur aux bibliothèques aujourd’hui plurielles. Nous nous intéresserons donc aux figures du bibliophile et du chercheur, d’hier et d’aujourd’hui, réelles ou imaginaires, à l’instar du personnage de L’Archiviste dans la bande dessinée éponyme (Peeters, Schuiten, 1987). Face au développement des technologies de l’information et de la communication, le chercheur doit s’adapter aux nouvelles techniques de recherche, ainsi qu’aux bibliothèques virtuelles, portatives, etc. Qu’il soit spécialisé dans les fonds anciens ou contemporains, il a désormais la possibilité de travailler sur les sources à distance. Si le lecteur se rend toujours à la bibliothèque, la bibliothèque vient désormais à lui et s’invite sur son écran. De ces nouvelles configurations émergent certainement pour le chercheur et le bibliophile d’autres manières de lire et de travailler.

 

Ce colloque interdisciplinaire accueillera les jeunes chercheurs (étudiants de master ainsi que doctorants et postdoctorants) en sciences humaines. Il se tiendra les 21 et 22 octobre 2014 sur le campus Lettres et Sciences Humaine de l’Université de Lorraine à Nancy. Les propositions de communication (titre et résumé de 300 mots, accompagnés d’une courte notice bio/bibliographique), rédigées en français devront être envisagées pour une communication de 20 minutes et devront être soumises par courriel au comité organisateur (jeuneschercheursLIS2014@gmail.com) avant le 15 août 2014.

 

Comité organisateur :

 

Bénédicte Prot

Fanny Lacôte

Noémie Budin