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Habiter la contradiction : usages et colportages de la pensée de Geneviève Fraisse (Paris)

Habiter la contradiction : usages et colportages de la pensée de Geneviève Fraisse (Paris)

Publié le par Marc Escola (Source : Géraldine Gourbe, chercheur)

Habiter la contradiction : usages et colportages de la pensée de Geneviève Fraisse

Deux journées d’étude à Paris – 29 et 30 mars 2018

Le Centre d’Etudes du Vivant, Université Paris Diderot

et la Fondation Entreprise Ricard, Paris

En la présence et avec la participation de Geneviève Fraisse

Conçues par : le collectif Les Vagues[1]

 

Geneviève Fraisse, directrice de recherche émérite au CNRS, produit une œuvre philosophique à partir du matériau historique. Faisant apparaître de nouvelles généalogies du féminisme, elle ouvre la voie d’un dialogue avec des pensées isolées ou canoniques de Poullain de la Barre à Simone de Beauvoir en passant par Germaine de Staël. Elle postule que la Révolution française, issue de l’universalisme, est paradoxalement le point de départ de la théorisation de la place des femmes dans les affaires publiques et en même temps de leur exclusion de la sphère politique ce qu’elle appelle la « démocratie exclusive ».

Depuis plusieurs années, la pensée de Geneviève Fraisse s’est aussi diffusée en dehors du monde académique. C’est le signe d’une nouvelle perspective francophone sur les études de genre alors que les vingt dernières années ont été marquées par l’apport des modèles états-uniens.

 Intellectuelle engagée, elle est une figure incontournable du Mouvement de Libération des Femmes. Elle a aussi été déléguée interministérielle aux droits des femmes (1997-1998) et députée au Parlement européen (1999-2004). Chercheure, femme et  militante, elle a développé une pensée libertaire réactivée par les questionnements politiques actuels.
Ces journées d’étude Habiter la contradiction : usages et colportages de la pensée de Geneviève Fraisse seront l’occasion de revenir sur l’apport philosophique des études de genre développées en France, d’assumer la réappropriation des discours comme pratique émancipatrice à partir de la logique non dogmatique et de l’exigence de remise en question permanente des concepts.

Nous proposons trois axes principaux pour orienter les contributions des participant·e·s :

Historicité : contretemps dans le féminisme

La pensée généalogique de Geneviève Fraisse, son travail sur les débats intellectuels concernant les femmes au XVIIe, XVIIIe, XIXe siècles, montrent que repousser les femmes de l’activité intellectuelle et politique a été un assaut long, lent, soutenu et surtout acharné. Dans Muse de la raison, la philosophe souligne qu’il s’est agi dans ces combats d’idées de construire la femme comme un être fondamentalement anhistorique. Faire un travail d’historien·ne permet d’œuvrer contre l’idée de la femme comme catégorie anachronique.

Une attention particulière sera donc portée aux propositions mettant en avant des travaux à l’épreuve de l’Histoire.

Lignée : construction de généalogies, jeu d’appropriation et de réappropriation des concepts, des discours

Forte de ses appuis foucaldiens, Geneviève Fraisse pose la question de savoir ce qui, de l’archive, parvient jusqu’à nous. Son travail permet ainsi d’examiner des sujets d’actualité comme le voile, la prostitution, la parité, etc., au prisme d’une perspective historique. Avant de s’emparer de sujets de débat, l’intellectuelle examine la terminologie qui les traverse, éprouvant la pertinence historique et philosophique des mots qui circulent, avant de les considérer comme des concepts.

Nous souhaitons discuter en profondeur les concepts majeurs de la pensée de Fraisse : la sexuation, le consentement, l’émancipation, la jouissance etc.[2], et leur application. Les communications à caractère dialectique et/ou généalogiques seront donc examinées avec beaucoup d’intérêt.

Émancipation :

Déconstruire les représentations et les systèmes aliénants, excluants et marginalisants est une étape importante de la transformation sociale, politique et culturelle. Mais la déconstruction ne permet pas d’agir ou de penser autrement, puisqu’elle prend le modèle dominant comme référent.

Au côté de Jacques Rancière dans la revue Les Révoltes Logiques, Geneviève Fraisse a initié une pensée alternative à l’histoire institutionnalisée du féminisme et des genres. Son féminisme refuse l’individualisme et le capitalisme. La généalogie fraissienne nous permet de sortir de l’isolat et nous oblige à vivre les contradictions qui animent  l’engagement et la vie collective. Genevière Fraisse se décrit elle-même comme une colporteuse : sa méthode de modestie philosophique consiste à apporter avec soi des problèmes et à les éprouver dans différentes situations, dans différents lieux.

 

Les communications sont ouvertes aux artistes, aux militant·e·s et aux chercheur·e·s de toutes disciplines, avec une attention particulière apportée à la philosophie, aux études féministes, à l’histoire de l’art et aux études visuelles.

Les propositions de communication de 3000 signes maximum doivent être envoyées en anglais ou en français à groupe.les.vagues@gmail.com avant le 15 janvier 2018.

 

Bibliographie sélective de Geneviève Fraisse :

- Service ou servitude, essai sur les femmes toutes mains (1979), nouvelle édition augmentée, Le Bord de l'eau, Lormont, 2009.

- Muse de la raison, démocratie et exclusion des femmes en France (1989), édition augmentée d’un avant-propos « Une histoire française ? » et d’une postface « Démocratie exclusive, république masculine », Folio/Histoire-Gallimard, Paris, 1995.

- Du consentement (2007), édition augmentée d’une postface « Et le refus de consentir ? », Seuil, Paris, 2017.

 - L’Europe des idées, suivi de « Touriste en démocratie, chronique d’une élue au Parlement européen, 1999-2004 » avec la collaboration de Christine Guedj, France Culture/ L’Harmattan, Paris, 2008.

- La Fabrique du féminisme, textes et entretiens, le Passager clandestin, Neuvy-en-Champagne, 2012.

- Les Excès du genre, concept, image, nudité, éditions Lignes, Paris, 2014.

- La Sexuation du monde, réflexions sur l'émancipation, Presses de Sciences Po, Paris, 2016.

 

Nous souhaitons aborder le travail de Geneviève Fraisse à partir des usages que nous en avons, dans les différents espaces que nous occupons : artistiques, militants, pédagogiques, intimes, domestiques, épistémologiques.
Nous nous inscrivons dans la continuité de cette approche dans les modalités d’organisation de ces journées d’études. Nous profitons d’une actualité éditoriale riche (réédition de Muse de la Raison (Folio Gallimard), Du Consentement (Le Seuil) et de La Fabrique du féminisme (Passager clandestin)) pour présenter avec elle ces deux journées d’études.

 

 

[1] Le groupe de travail Les Vagues est un collectif féministe. Composé de professionnelles des arts visuels, il se réunit pour penser et mettre en œuvre les articulations entre le monde de l’art, l’histoire de l’art, la culture politique et le militantisme d’un point de vue situé. Le collectif recense, donne de la visibilité aux outils du changement positifs et porte des pratiques professionnelles féministes égalitaires, soucieuses de la justice sociale.

Pratiquer une épistémologie féministe intersectionnelle au sein du champ de l’art revient à mettre au travail les formats, les discours, les outils des sciences sociales (histoire de l’art, sciences politiques, philosophie, cultural studies) du milieu militant (décolonial, LGBTQI+, queer, féminisme noir/afroféminisme ?) avec et dans les écritures et des modalités de l’art.

 

 

 

[2] Ces exemples sont indicatifs.

  • Responsable :
    Les Vagues
  • Adresse :
    Université Paris Diderot/Fondation d'Entreprise Ricard