Essai
Nouvelle parution
G. Guillaume, Leçons de linguistique 1939-1940. Théorie des parties du discours

G. Guillaume, Leçons de linguistique 1939-1940. Théorie des parties du discours

Publié le par Gabriel Marcoux-Chabot (Source : Site web de la maison d'édition)

Leçons de linguistique de Gustave Guillaume 1939-1940. Théorie des parties du discours, publiées sous la direction de Ronald LOWE, Québec, Presses de l'Université Laval (Leçons de linguistique de Gustave Guillaume), 2009, 306 p.

ISBN 978-2-7637-8891-3

EXTRAIT

Les langues, au premier examen, quand on en aborde l'étude en vued'en concevoir la systématique, laissent, chacune et toutes, uneimpression de multiplicité, de complication sans fin. Puis, à lalongue, un regard attentif surprend sous cette complication qui paraîtinfinie, une sorte de simplicité, elle aussi infinie en ce sens qu'onla devine, qu'on la pressent, qu'on l'entrevoit sans pouvoir la saisirà plein, d'une manière ferme. Car lorsqu'on croit avoir atteint lesimple, aussitôt, par un certain renouvellement de pensée, le plussimple encore se découvre. Et cette marche à la simplicité ne se faitpas sans bien des détours. Ce n'est pas un cheminement aisé. C'est pardes voies sinueuses et compliquées que de la multiplicité desconséquences visibles, le linguiste remonte à l'unité fondamentale desconditions, on pourrait presque dire, de la condition. Cartout ce qui se voit dans les langues, tout, absolument tout procède, entoute dernière analyse, de la double sollicitation à laquelle l'esprithumain est incessamment soumis, et qui lui vient par un côté, del'universel, par l'autre côté, du singulier.

Un être linguistique, quel qu'il soit, est toujours, par toutes lesfaces de lui-même, le résultat d'un équilibre qui s'est établi dans lapensée entre la propension à particulariser et la propension àgénéraliser… Le même double mouvement, si nettement saisissable quandil s'agit de la signification comparée de deux sémantèmes, se retrouvedans le plan formel. Le mot est, conceptuellement, dans la langue,avant tout emploi, plus extensif et moins compréhensif que n'importelequel de ses emplois… Plus généralement encore, tout ce qui ressortità la grammaticalisation du mot – et, qu'on le remarque bien, toutelangue est appelée à grammaticaliser le mot, le mot ne pouvant entrersystématiquement, organiquement en phrase que par son côté grammatical– tout ce qui ressortit à la grammaticalisation du mot consiste àprendre une position de définition du mot entre le singulier etl'universel. De même que pour la sémantèse du mot, toutes positionspeuvent être occupées entre l'universel et le singulier, de même, pourla grammaticalisation du mot, toutes positions peuvent aussi êtreoccupées entre l'universel et le singulier.

(Extrait de la leçon du 4 avril 1940)

BIOGRAPHIE

Ronald Lowe est professeur au Département de langues, linguistique ettraduction de l'Université Laval depuis 1986 et directeur du FondsGustave Guillaume depuis 1995. Son enseignement a couvert à ce jour lalinguistique générale, la linguistique française (morphologie etsyntaxe), la langue et la linguistique inuites et la psychomécanique dulangage. Depuis 2001, il est intervenu à titre de conférencier ­invitédans la formation continue d'orthophonistes oeuvrant en rééducation dessourds à Montpellier, Paris et Nantes. Il a été invité en 2006 commeconférencier dans des séminaires de psychomécanique du langage tenus àl'Université d'état pédagogique Herzen de St-Pétersbourg et àl'Université d'état pédagogique des Sciences humaines de Moscou.

Auteurde plusieurs ouvrages sur les dialectes inuits de l'Arctique canadienoccidental, il dirige depuis 1995 le travail d'édition des manuscritsdu linguiste français Gustave Guillaume.