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Formules, Sentences, Maximes : les énoncés philosophiques détachés

Formules, Sentences, Maximes : les énoncés philosophiques détachés

Publié le par Marielle Macé (Source : Frédéric Cossutta)


Université de la Sorbonne nouvelle-Paris III
Ecole doctorale « Langage et langues : description, théorisation, transmission »


Journée d'étude du GRADPhi
(Groupe de Recherche sur l'Analyse du Discours philosophique)


FORMULES, SENTENCES, MAXIMES : Détachement, transmission et recontextualisation des énoncés philosophiques


Vendredi 4 juin 2004, de 9h-15 à 18 h
UFR DIFLE, 46 rue St. Jacques, 75005 Paris
3ème étage, salle M


Participation de : Jean-François Bordron (Université Paris III), Francine Cicurel (Université Paris III), Frédéric Cossutta (CEDITEC-Paris XII), Khodayar Fotouhi (Professeur de philosophie), Dominique Maingueneau (Université Paris XII), Alain Rabatel (IUFM de Lyon, ICAR, Université de Lyon 2), Malika Temmar (Université de Picardie)


Journée organisée par F. Cicurel et F. Cossutta dans le cadre du GRADPhi,
du Centre de recherches DELCA-SYLED et de la
Formation doctorale « Didactologie des langues et des cultures »
Courriel : frederic.cossutta@belgacom.net


On se contente trop souvent d'identifier la philosophie à une doctrine caractérisée par des choix théoriques (les « ismes »), à une oeuvre associéee à un nom propre, à des monuments que conserve une tradition. Mais n'est-elle pas tout autant présente et active « entre » les oeuvres, dans ce tissus interdiscursif et institutionnel qui relie entre elles les doctrines et les pratiques qui s'y rapportent ? Conservation, transmission, enseignement, commentaire, déterminent des genres textuels, souvent considérés comme seconds ou mineurs, s'inscrivent dans des pratiques par lesquelles la philosophie devient forme de vie.
Entre la singularité d'une position doctrinale et la visée d'universalité à laquelle l'astreint sa prétention à la vérité, entre la dimension « dogmatique » des énoncés d'un système et les visées pragmatiques de préceptes ordonnés à la recherche d'une sagesse, les formes détachées (formules, thèses, sentences, maximes, aphorismes, ensemble des formes parémiques) jouent un rôle important. Elles stylisent et condensent la doctrine, tout en se présentant sous la forme générale d'une sagesse partagée, elles participent de l'efficacité de la parole philosophique, lui servent d'ambassadeur et fonctionnent comme des bannières ou des mots d'ordre : « Pas plus », « L'homme est la mesure de toute chose », « Connais-toi toi-même », « La mort n'est pas à craindre », « Le réel est le rationnel » « L'existentialisme est un humanisme », « l'existence précède l'essence ».
Les participants s'efforceront de mettre au jour certains mécanismes discursifs liés à la formation de ces énoncés remarquables, à leur mode de détachement du tissu argumentatif ou analytique, à leur mode de transmission, à leur recontextualisation dans des ensembles doctrinaux ou idéologiques variés.
- Comment un auteur fabrique-t-il de nouveaux énoncés généralisants qui se détachent comme autant de signaux indiquant la présence d'une idée forte, d'une thèse ? Comment retravaille-t-il ceux que la tradition lui procure ?
- Peut-on relever des traits caractéristiques qui attesteraient l'existence de règles de détachabilité qui, permettant de les décontextualiser, en feraient comme les représentants condensés d'une identité doctrinale ?
- Qu'est-ce qui leur permet de se situer dans un contexte dogmatique fort tout en valant comme énoncé doxique. Peut-on relever des caractéristiques linguistiques qui en structurent la construction, quel rapport entretiennent-ils avec les opérations de généralisation, avec les formes brèves et proverbiales ?
- Une fois « détachés », comment essaiment ces énoncés, comment sont-il cités, redistribués, mentionnés, réinscrits dans des cadres génériques ad hoc (florilèges, doxographies) ou repris dans des contextes doctrinaux qui les revendiquent ou les critiquent ?
On rencontre ainsi un ensemble de questions essentielles pour l'analyse du discours ou la linguistique textuelle : l'articulation entre généralisatation, généricité, stéréotypes, le problème d'une typologie des formes parémiques, les questions liées aux dimensions énonciatives de la citation et du discours rapporté, la question du rapport entre savoir, transmission du savoir et didacticité. Questions essentielles aussi pour la compréhension de l'activité philosophique : comment les schèmes spéculatifs d'une doctrine se déploient-ils à travers des séquences textuelles longues, mais aussi se condensent dans des philosophèmes emblématiques, pourquoi une philosophie se définit-elle comme discours savant spécialisé mais ne peut manquer de se vouloir populaire et réformatrice, comment se construit l'unité d'une discipline qui s'offre comme un champ conflictuel en brassant et recyclant en permanence sa propre archive ?
Ces questions seront abordées dans un cadre interdisciplinaire permettant de croiser une réflexion méthodologique (dans le cadre de la sémiotique, de la linguistique textuelle ou de l'analyse du discours) et une étude de corpus issus non seulement de la tradition « noble » mais également des formes quotidiennes de la pratique philosophique.


Programme de la journée


FORMULES, SENTENCES, MAXIMES :
Détachement, transmission et recontextualisation des énoncés philosophiques


9h30-10h15
Frédéric Cossutta : Détachabilité et recontextualisation des maximes philosophiques : les « diatribes » d'Epictète
10h15-11h
Malika Temmar : Les formes de reprise chez Merleau-Ponty
Pause
11h15-12h
Jean-François Bordron : Détachement et modélisation. Comment le discours théorise-t-il sa propre énonciation ?
12h-12h45
Francine Cicurel : Mot d'ordre ou mot de passe : quelques réflexions sur la transmissibilité du texte philosophique


Déjeuner


14h30-15h15
Alain Rabatel : Coénonciation, surénonciation et sousénonciation dans les énoncés détachés parémiques : le Dictionnaire philosophique de Comte Sponville
15h15-16h
Khodayar Fotouhi : Entre Foucault et Derrida: le sort d'un énoncé cartésien
16h-16h45
Dominique Maingueneau : Détachement et surassertion. La formule philosophique et son commentaire professoral


Pas de frais d'inscription. Une attestation sera délivrée aux participants ayant suivi l'ensemble des travaux de la journée d'étude.


GRADPhi
Le Groupe de Recherche sur le Discours Philosophique (GRADPhi), fondé par F. Cossutta en 1993, rassemble des spécialistes d'analyse du discours, des linguistes, des philosophes ou historiens de la philosophie soucieux d'appréhender les oeuvres philosophiques par l'analyse de leurs dimensions discursives. Ce petit groupe fonctionne comme un laboratoire où chacun confronte dans une libre discussion ses options méthodologiques initiales, et surtout les soumet à l'épreuve d'une lecture collective de fragments de textes ou d'oeuvres suivies étudiés dans leur détail. Il ne s'agit pas de dégager artificiellement une unanimité théorique, ses membres n'ayant pas nécessairement le même point de vue sur le statut de la philosophie ni sur les méthodes de lecture (linguistique des opérations, sémiotique, Ecole française d'analyse du discours peuvent s'y côtoyer). Cependant ils partagent au moins deux convictions fondamentales qui suffisent à assurer les conditions d'un travail collectif : tout d'abord l'idée que, sans nécessairement s'y réduire, la philosophie dépend d'un procès discursif d'instauration du sens. Et deuxièmement qu'il est possible d'appréhender objectivement une part importante des supports langagiers de l'activité spéculative. Cela suppose un accord sur l'autonomie relative du moment de la lecture méthodique, qu'on ne saurait rabattre sur une herméneutique, ni sur une approche déconstructive. L'investigation permet de mettre en évidence certaines des grandes opérations discursives à l'oeuvre dans le philosophique (l'argumentation, le régime de l'image et de la fiction, le statut du dialogue comme genre ou de la polémique, la question du style des philosophes, celle du rapport entre vie et écriture...) et l'étude détaillée et suivie d'oeuvres de la tradition (Platon, Descartes, Bergson...). Ces travaux ne tendent pas seulement à mettre en évidence d'un point de vue descriptif certaines constantes ou régularités de l'écriture et des textes des philosophes, (statut des genres, modalités d'énonciation ou registres sémiotiques), mais se proposent une portée heuristique en s'efforçant de renouveler la lecture de certaines oeuvres, les outils utilisés ne trouvant leur justification ultime que dans l'intelligibilité accrue qu'ils nous en procurent.
Dans le prolongement de cette dimension publique, le Groupe de recherche sur l'analyse du discours philosophique à noué des relations de travail et a instauré des protocoles de collaboration, ponctuels ou durables, avec d'autres centres de recherche qui fondent leurs programmes et leurs projets sur l'idée que l'étude des doctrines, des systèmes et des oeuvres ne saurait être dissociée de celle de leurs formes expressives et langagières. (CEDISCOR-ParisIII, CEDITEC-ParisXII, IASC-Université de Tel-Aviv, Société Philosophique italienne (SFI), UMR « Savoirs et Textes »-LilleIII, Centre G. Bachelard de recherches sur l'imaginaire et la rationalité et l'UFR de Lettes et Philosophie de Dijon, CERPHI-ENS Lyon, Séminaire « Littérature et philosophie », Paris IV, IRIACD-Lausanne, ULB-Bruxelles)


PUBLICATIONS COLLECTIVES TRADUISANT LES ACTIVITES DU GROUPE


1995 L'Analyse du discours philosophique, F. Cossutta, éd., Langages, N° 119, sept. 1995, Paris, Larousse.
1996 Descartes et l'argumentation philosophique, F. Cossutta, éd., coll. L'interrogation philosophique, dirigée par Michel Meyer. Paris, PUF.
1998 Lire Bergson : le possible et le réel. F. Cossutta, éd., collectif du Groupe de Recherche sur l'analyse du discours philosophique, coll. La Librairie du Collège International de Philosophie, Paris, P U F.
Le discours philosophique. Encyclopédie Philosophique Universelle, tome IV, sous la direction de J.F. Mattéi, Paris, PUF. 7 Contributions dans la partie 3 : Les formes de la philosophie.
2000 La polémique en philosophie (la polémicité philosophique et ses mises en discours), M. Ali Bouacha, F. Cossutta, éds., avec le concours du Centre Bachelard de Recherches sur l'Imaginaire et la Rationalité, Editions Universitaires de Dijon, Dijon.
2004 (publication automne 2004) Le dialogue : introduction à un genre philosophique, F. Cossutta, éd., Lille, Presses du Septentrion.
2005 La fiction des philosophes, M. Ali Bouacha, F. Cossutta, éds.