Questions de société

"Formation bradée, élèves en danger!" (collectif étudiants IUFM)

Publié le par Vincent Ferré (Source : Coordination Nationale des Universités, CNFDE, SLU)

enseigner, un métier qui s'apprend: sauvons la formation des enseignants_collectif étudiant de [l'IUFM de] villeneuve d'ascq

URL Courte : http://6041.lapetition.be/


Formation bradée, élèves en danger!

Nous, étudiants de l'IUFM Nord-Pas-De-Calais, et d'ailleurs, dénonçonsla situation intolérable à laquelle nous sommes confrontés du fait dela mise en oeuvre de la réforme de la formation des enseignants imposéeunilatéralement par le gouvernement.

1. Notre situation est d'abord intolérable du fait des modalitéspratiques d'organisation de cette année universitaire dite de «transition » : que nous ayons ou non le concours, nous sommes à ce jourdans la plus totale incertitude quant à notre devenir à la prochainerentrée...
Si nous avons le concours, tout indique que nous serons en charge d'uneclasse en pleine responsabilité, mais sans formation pratiquepréalable. On annonce que nous bénéficierons alors d'une « formationcontinuée » à hauteur d'1/3 temps (de classe? de temps global detravail?), mais nous n'en connaissons toujours ni le cadre, ni lecontenu, ni le calendrier, ni les acteurs... Or, précisons que ce sontbien des fonctions identiques à celles d'un enseignant titulaire encharge de vrais élèves que nous devrons assurer.
Si nous échouons au concours, nous ignorons complètement ce vers quoinous pourrons nous tourner: pourrons-nous nous représenter au concoursl'année prochaine alors qu'il faudra désormais être inscrit en Master 2et que la plupart d'entre nous ne possède qu'une Licence? Quelle serala reconnaissance de cette année? Quelles seront les possibilitéséventuelles de réorientation? Comment pouvons-nous encore en être làplus de quatre mois après la rentrée universitaire?
A ces préoccupations majeures liées à l'année prochaine vient s'ajouterle fiasco actuel des mises en stage dans les écoles dont l'organisationa été retirée aux IUFM. Qui est responsable de cette situation? Qui esten mesure de lever ces incertitudes? Nous avons besoin de conditions detravail beaucoup plus sereines pour nous préparer dignement au concourset à notre futur métier!
Les professeurs-stagiaires (PE2, PLC2, etc.) méritent également demeilleures conditions de travail. Ceux-ci pâtissent en effetindirectement du surcroît de travail que les incohérences de la réformeimposent aux équipes pédagogiques pour le suivi des candidats auxconcours.

2. Les perspectives qui se dessinent en matière de formation auxmétiers de l'enseignement sont ensuite intolérables. Les formesactuelles envisagées pour la Mastérisation de la formation sontqualifiées d'aberrantes et de destructrices par la plupart des expertsde la formation des enseignants. La qualification des enseignants etl'adéquation entre leur formation initiale et les réalités de leurmétier sont en jeu. La réforme du Gouvernement fait totalementl'impasse sur la nécessaire polyvalence de la formation disciplinairedes enseignants du 1er degré, et relègue les aspects réellementpédagogiques et professionnels de la formation de l'ensemble desenseignants à une véritable peau de chagrin.

Cette réforme placera en outre les futurs étudiants inscrits en Masters2, et se destinant aux métiers de l'enseignement, au coeur decalendriers et d'exigences complètement inconciliables: validationd'unités d'enseignement universitaires; rédaction et soutenance d'unmémoire scientifique; préparation aux épreuves d'admissibilité etd'admission des concours de recrutement; anticipation de voies deréorientation en cas d'échec; 108h de stages de terrain, certesfacultatifs (!), mais totalement indispensables (tout en restantlargement insuffisants) s'agissant d'assumer la pleine responsabilitéd'une classe à la rentrée scolaire suivante. Cherchez l'erreur!!!...

3. La situation est intolérable enfin, et surtout, pour le projet desociété que cette réforme révèle et pour son coût social. Devenirenseignant supposera en effet désormais d'être en mesure de financer aumoins cinq années d'études supérieures, contre quatre à l'heureactuelle (les lauréats aux concours accédaient précédemment au statutde fonctionnaire-stagiaire durant leur année de formationprofessionnelle selon le schéma suivant: obtention d'une Licence-annéede préparation au concours-année de formation professionnellerémunérée). C'est ni plus ni moins qu'une sélection par l'argent quis'annonce. Des mesures de compensation ont été promises par legouvernement (notamment des bourses au « mérite »), mais les chosesrestent, de ce côté, très très floues (nombre, montants, pérennité,etc.).
Autre conséquence directe: un accroissement sensible du fossé entre lesélèves et les enseignants qu'ils auront face à eux; accroissement qui,c'est le cas de le dire, va à l'encontre du projet de réduction desinégalités sociales qu'est censée promouvoir l'école républicainefrançaise.
Il est par ailleurs avéré que les étudiants mastérisés ayant échoué auconcours auront vocation à intégrer une « Agence nationale deRemplacement », c'est-à-dire à se trouver en situation d'emploiprécaire et sous-rémunéré (sans qu'il soit dit nulle part si ces «mastérisés-remplaçants » bénéficieront d'une quelconque formationpratique)…

Constatant donc au quotidien les impasses de la réforme de la formationdes enseignants et inquiets des risques éducatifs et sociaux qu'ellefait encourir à la société française toute entière:
- nous demandons aux différents responsables ministériels, académiqueset universitaires la levée immédiate des incertitudes concernant notredevenir à la prochaine rentrée scolaire ;
- nous demandons plus généralement la remise à plat complète duprocessus de réforme en cours et appelons l'ensemble des étudiants,parents d'élèves, acteurs éducatifs et responsables politiques... ànous rejoindre, à travers la défense de la formation des enseignants,dans la lutte pour la préservation et l'amélioration de la qualité del'éducation qui sera dispensée aux futures générations d'enfants.