Essai
Nouvelle parution
Filiations. Anne Hébert et Hector de Saint-Denys Garneau (Les Cahiers Anne Hébert, no. 7)

Filiations. Anne Hébert et Hector de Saint-Denys Garneau (Les Cahiers Anne Hébert, no. 7)

Publié le par Julien Desrochers

 

LES CAHIERS ANNE HÉBERT, Numéro 7:

Filiations. Anne Hébert et Hector de Saint-Denys Garneau

 

Contenu :

 

Présentation par Nathalie Watteyne

 

DOSSIER:

 

Les parents de Saint-Denys Garneau par Benoît LACROIX

Trois sources s'imposent quand il s'agit de connaître un auteur, une auteure : la source visuelle, la source orale, la source écrite. Ici, pour diverses raisons, nous privilégions les sources visuelles et orales. Dans les années 1948-1950, Benoît Lacroix fréquente les parents d'Hector de Saint-Denys Garneau à Montréal et au Manoir familial de Ste-Catherine de Fossambault. Il y note aussi le passage d'Anne Hébert. Témoin de l'époque, un nonagénaire raconte ses souvenirs...

 

Généalogie d'Anne Hébert : des familles marquantes dans l'histoire du Québec par Frédéric BROCHU

L'article de Frédéric Brochu présente les premiers résultats de ses recherches en cours sur la généalogie d'Anne Hébert portant plus spécifiquement sur les familles Hébert, Taché, Juchereau Duchesnay, Prévost et Garneau auxquelles l'écrivaine est directement rattachée. L'article montre sommairement le rôle marquant de plusieurs membres de ces familles dans l'histoire politique, sociale, économique, militaire, administrative et culturelle du Québec, aux 18e et 19e siècles principalement.

 

La meilleure part. L'influence de Maurice Hébert et de Saint-Denys Garneau durant les années chrysalides d'Anne Hébert par Marie-Andrée LAMONTAGNE

Parmi les influences littéraires qui ont compté pour Anne Hébert, celles de son père, le critique Maurice Hébert et de son cousin, le poète Saint-Denys Garneau, ont sans contredit été déterminantes. Or ces derniers, bien que de manière différente pour chacun, ont formé leur goût sur la lecture de bon nombre d'écrivains français importants de l'entre-deux-guerres, catholiques pour la plupart, qui ont, par ricochet, informé l'horizon esthétique de la jeune Anne Hébert. En outre, à ses débuts, dans les années 1950, celle-ci a pu bénéficier du parrainage bienveillant de quelques écrivains français alors en vue, comme le poète Pierre Emmanuel et le critique Albert Béguin, catholiques eux aussi, et qui seront bientôt détrônés par des écrivains appartenant à d'autres générations littéraires. Le présent article veut montrer dans quelle mesure la réception de l'œuvre d'Anne Hébert est tributaire de son appartenance à cette famille esthétique des débuts et en quoi cette réception se distingue de celle de l'œuvre du poète de Saint-Denys Garneau, demeurée enfermée dans la référence québécoise.

 

De l'appel des mots à l'appel du monde. L'expérience poétique chez Saint-Denys Garneau et Anne Hébert par Karim LAROSE

Il y a quelques années, l'essayiste Jean Larose, dans L'Amour du pauvre, a voulu synthétiser en une formule lapidaire, sur laquelle il glisse rapidement, l'un des enjeux importants de l'expérience poétique de Saint-Denys Garneau, qui aurait, d'après lui, « irrémédiablement perdu foi en la valeur du symbole ». J'aimerais revenir sur cette intuition en me penchant ici sur le « Monologue fantaisiste sur le mot », article important mais de lecture difficile, publié par le poète en 1937. Cet « essai » ne porte pas sur le français, langue menacée ; il ne porte même pas sur la langue à proprement parler. Il s'intéresse au mot lui-même, en tant que moteur de tout symbolisme. Sans la moindre référence au Canada français, il introduit une sorte de fantaisie dans l'une des chasses gardées du nationalisme culturel des années 1930. J'essaierai dans cet article de faire ressortir la conception de la parole qui en constitue le cœur et qui vient bouleverser l'ancienne rhétorique du « chant » poétique. Dans un deuxième temps, je mettrai cet essai en relation avec « Poésie, solitude rompue », qui ouvre Mystère de la parole d'Anne Hébert, un texte clé dans l'histoire littéraire québécoise, par ailleurs en dialogue manifeste avec l'œuvre de Garneau. Malgré une évidente parenté littéraire, Hébert emprunte une voie tout à fait différente de celle de Garneau en favorisant une poétique de la communion où, arrachée au silence, la parole inépuisable, mais parfois confuse, des choses et des êtres est donnée à déchiffrer au poète.

 

De Saint-Denys Garneau à Anne Hébert : la métaphore du passage dans la réception critique de la poésie d'Anne Hébert jusqu'en 1970 par Claire HITROP

Les études de la réception critique de la poésie d'Anne Hébert, jusqu'en 1970 environ, mettent en avant la métaphore du passage : passage du silence à la parole et de la nuit à la lumière. L'installation de cette figure s'accompagne de celle du dépassement, entrevue dans le lien esthétique et poétique entre de Saint-Denys Garneau et Anne Hébert. La lecture communautaire qui émerge en 1953, à la parution du Tombeau des rois, et qui se poursuit dans les années 1960, à la suite de la publication de Poèmes, développe la métaphore du passage dans l'œuvre hébertienne. Cela marque simultanément la confirmation de l'idée du dépassement de Garneau par Anne Hébert, laquelle semble cautionner ce discours critique. Il s'agit de remettre en cause la notion de « dépassement », à partir de lectures comme celle de Pierre Nepveu, et d'engager une autre forme d'analyse comparative.

 

De quelques similitudes , différences et influences : de Saint-Denys Garneau – Anne Hébert par Giselle HUOT

Il y a chez Hector de Saint-Denys Garneau et Anne Hébert plusieurs similitudes ou points de confluences dans leur parenté de sang ou d'esprit ou d'âme, mais aussi des différences comme le veulent toutes les fortes personnalités qui s'affirment, chacune en leur art et conscience, et puis, forcément, des influences.

 

Le masculin chez Hector de Saint-Denys Garneau et Anne Hébert : de l'impuissance du regard à la perte de soi par Daniel MARCHEIX

L'œuvre d'Anne Hébert est, on le sait, profondément marquée par celle de son cousin Hector de Saint-Denys Garneau. Ce dialogue intertextuel se nourrit de la complicité de deux imaginaires et de deux sensibilités dont la proximité tient notamment à la présence de préoccupations communes. Nous avons choisi de nous pencher, parmi celles-ci, sur la propension du Journal de Garneau et des romans d'Hébert à mettre le masculin aux prises avec une expérience perceptive singulière, où le regard apparaît comme le vecteur essentiel d'un rapport problématique au monde, à l'Autre et à soi. L'activité spéculaire masculine s'y décline sur le mode de l'impuissance et de l'échec, et cette débâcle esthésique sert d'arrière-plan à des « formes de vie » auxquelles préside une survalorisation du voir. Le champ de présence du sujet se trouve alors parcouru d'une tension centrifuge qui décentre le flux perceptif dans une tentative d'extraction de soi et de maîtrise de la relation sensible. Mais cette passion de voir induit un renoncement à la sensorialité de la chair, à la corporéité du sentir. L'impasse de ce « dépouillement sensible » prend les dehors figuratifs et métaphoriques d'une violente mutilation : dessèchement somatique chez Garneau et abandon régressif et mortifère au grand principe féminin-maternel originaire chez Hébert.

 

Usages de l'essai chez Anne Hébert et Saint-Denys Garneau par Andrée-Anne GIGUÈRE

En marge de leur œuvre poétique ou romanesque, Anne Hébert et Hector de Saint-Denys Garneau ont produit chacun un petit nombre d'essais épars publiés pour la plupart en revue. Cette étude fait des rapprochements et distinctions entre la pratique de l'essai de Saint-Denys Garneau et celle d'Anne Hébert, notamment en ce qui concerne leur usage de ce genre littéraire. Si Garneau utilise davantage l'essai comme un lieu d'interrogation esthétique et spirituelle, Anne Hébert intègre à cette pratique des éléments propres à l'écriture romanesque.

 

HORS DOSSIER :

 

L'identité poétique de la prose d'Anne Hébert par Adela GLIGOR

L'œuvre d'Anne Hébert témoigne, comme nombre d'œuvres littéraires modernes, d'un effacement des limites génériques entre la poésie et la prose. Les textes poétiques et les écrits narratifs hébertiens se rapprochent les uns et les autres grâce à leur qualité rythmique et à leur densité métaphorique. En outre, l'influence des mythes et des textes bibliques sur cette écriture contribue à créer la dimension métaphorique et poétique de l'œuvre.

La maternité dans l'œuvre d'Anne Hébert par Stéphanie VIAU

Dans les romans d'Anne Hébert, la mère évolue au sein d'une société patriarcale particulièrement oppressante. En tant que mère, elle est rarement épanouie : elle souhaite vivre alors sa féminité autrement que par la maternité. Mais cela ne se vérifie par toujours. Trois figures maternelles sont à dégager chez l'auteure : la femme enceinte, la mauvaise mère et la mère rêvée. Les mères ont différents visages mais la déviance n'est jamais loin. Elles oscillent entre la tentation d'aimer et l'empêchement de vivre. Elles représentent une société en mutation qui cherche la place des femmes dans un monde pensé par les hommes. La maternité dans l'œuvre d'Anne Hébert ne se réduit pas aux stéréotypes. Elle est entière même si sa violence est indiscutable.

 

Un habit de lumière : vêtement et désir chez Anne Hébert par Annabelle M. RÉA

Depuis ses premières oeuvres (comme « La robe corail »), Anne Hébert médite sur les questions sociales suggérées par les relations étymologiques habit/habitude et costume/coutume. Prenant comme point de départ de nombreuses études, provenant de disciplines différentes, sur le rôle du vêtement dans la société, ainsi que des travaux sur la théorie du désir. Annabelle Rea examine ici le dernier roman d'Anne Hébert, publié en 1999. Un code vestimentaire rigide en conformité avec l'ordre social ; la soif de métamorphose qui représente un désir mimétique et la consommation effrénée ; l'authenticité reflétée par un adolescent habillé en fille ; le leurre d'un « danseur étoile », quasi nu au « Paradis Perdu », qui semble d'abord promettre la réalisation des désirs : voilà quelques-unes des attitudes vestimentaires dépeintes par Hébert qui sont analysées dans cet article.

 

COMPTE RENDU :

 

Claire HITROP