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Fictions de l’origine (1650-1800)

Fictions de l’origine (1650-1800)

Publié le par Marc Escola (Source : C. Martin)

Fictions de l’origine (1650-1800)

Université Paris X - Nanterre

(4-6 juin 2009)

On sait à quel point, depuis le milieu du XVIIe siècle et durant tout le XVIIIe siècle, la littérature et la philosophie ont été hantées par la question de l’origine (origines du monde, de l’individu, de l’humanité, de la société, des fables, de la religion, des langues, des connaissances, des idées, de l’amour, de l’inconstance, etc.). Que ces interrogations et ces enquêtes soient contemporaines de lectures critiques de la Bible (on songera notamment aux théories de La Peyrère sur les préadamites) ne doit évidemment rien au hasard, et il est aisé d’y voir le signe d’une insatisfaction à l’égard des réponses théologiques apportées à ces questions. Pour penser l’état présent des choses, il s’agit désormais de restituer leur en-deçà, ce qui était ab initio, de retrouver les premiers commencements, identifiés à un hypothétique état de nature.

Or, cette réflexion sur l’origine a partie liée avec la fiction, au moins de deux manières. D’une part parce que, comme le montre Fontenelle, le temps des origines est par définition le lieu de l’élaboration fictionnelle (voir De l’origine des fables, mais aussi les réflexions de Nicolas-Antoine Boulanger). D’autre part, parce que les premiers commencements étant par définition inaccessibles à l’enquête historique, il s’agit de concevoir des équivalents de la situation originaire : en forgeant des modèles théoriques qui ont une valeur exploratoire, la fiction devient un laboratoire de l’origine (Condillac, Maupertuis, Rousseau, et tant d’autres, s’inscrivent ici dans le sillage de Locke). Mais si ce passage par la fiction est l’accomplissement d’un geste critique fondamental dans la pensée du XVIIIe siècle sur l’origine (on songera au fameux « commençons par écarter tous les faits » du second Discours de Rousseau, et à ses implications théologiques), il peut être aussi le signe d’une libération de l’imaginaire et du fantasme dont témoignent, sur des modes divers, les spéculations de Fontenelle dans les Entretiens sur la pluralité des mondes, celles de Benoît de Maillet dans le Telliamed, celles de Diderot dans Le Rêve de d’Alembert, voire les pages de Buffon consacrées à la fiction du premier homme.

Que les fictions de l’origine soient les lieux par excellence où se croisent fantasmes et théories, c’est ce dont témoigne aussi, de façon complémentaire, mais non pas équivalente, les fictions littéraires (théâtre, contes, romans) contemporaines qui se livrent à un intense travail de réflexion et d’élaboration imaginaire autour de la question de l’origine : figures incarnant l’origine sous les espèces de l’ingénuité (de l’Agnès de Molière ou l’Arlequin sauvage de Delisle de la Drevetière à Paul et Virgine de Bernardin de Saint-Pierre, en passant par Arlequin poli par l’amour de Marivaux, etc.) ; recréations expérimentales de l’origine (La Dispute de Marivaux ; Imirce de Dulaurens, etc.) ; romans de la naissance obscure (la Marianne de Marivaux, la Suzanne de Diderot, etc.) ; fictions et fantasmes de l’origine dans l’invention d’une écriture autobiographique (Rousseau, Rétif)….

Plusieurs axes d’étude peuvent donc être envisagés :
−    Le temps des origines et l’activité fabulatrice.
−    Usages théoriques et philosophiques des fictions sur l’origine.
−    Figurations théâtrales et romanesques de l’origine.
−    Hybridations des discours sur l’origine : fictions, fantasmes, théories.

Les projets de communication (titre provisoire et quelques lignes de problématique) sont à envoyer à Christophe Martin (christophe.wmartin@orange.fr) avant le 31 octobre 2008.