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Entre gloire et désastre: les figures mythiques du savoir chez les tragiques grecs et leur postérité

Entre gloire et désastre: les figures mythiques du savoir chez les tragiques grecs et leur postérité

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Hélène Vial)

Entre gloire et désastre : les figures mythiques du savoir chez les tragiques grecs et leur postérité

Journées d’étude et d’agrégation organisées par Hélène Vial les jeudi 4 et vendredi 5 avril 2013 à la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand


Ces journées constituent le volet 2a du projet « Mythologies des savoirs : de l’ivresse aux dangers » que nous développons au sein de l’axe transversal « Les enjeux des savoirs. Héritage, transmission, pouvoirs », coordonné par Philippe Mesnard au sein du CELIS (Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique, EA 1002). La présentation générale et le calendrier prévisionnel de ce projet peuvent être consultés à l’adresse suivante : http://celis.univ-bpclermont.fr/spip.php?article633. Si vous êtes intéressé par une ou plusieurs des séquences 1, 3, 4, 5 et 6, merci d’écrire à Hélène Vial (cf. adresse électronique infra) ; pour 2b, l’appel à contribution peut être consulté sur le site de Fabula (http://www.fabula.org/actualites/cassandre-figure-mythique-du-temoignage-et-de-la-transmission-memorielle_51822.php).

La tragédie est par nature un lieu privilégié de mise en oeuvre des conflits intérieurs et extérieurs suscités par le savoir : les personnages d’Eschyle, de Sophocle et d’Euripide sont confrontés de manière récurrente à l’ambivalence de leur propre savoir, susceptible d’apporter à son détenteur, mais aussi aux siens, à la cité, à l’humanité voire à l’univers entier la prospérité, la puissance, la renommée, mais aussi la destruction, le malheur, l’opprobre. L’usage du savoir par celui qui le possède est évidemment en jeu, quand cet usage est détourné, voire perverti (ainsi Médée transforme-t-elle sa maîtrise de la magie en instrument de vengeance) ou quand, paradoxalement, aucun usage n’est fait d’une connaissance dont la révélation suscite incrédulité et agressivité (nous pensons ici à Cassandre). Mais, très souvent, c’est aussi le fait même de savoir qui est en soi dangereux, soit qu’accède à la connaissance quelqu’un qui, pour telle ou telle raison, ne devrait pas y accéder (« Malheureux ! Puisses-tu ne jamais apprendre qui tu es ! », dit Jocaste à Oedipe dans l’Oedipe roi de Sophocle ; trad. de V.-H. Debidour, Paris, Le Livre de Poche, « La Pochothèque », 1999), soit que cette connaissance passe quantitativement, si l’on peut dire, les bornes de ce que les dieux jugent acceptable (c’est le cas de la « trop savante » Cassandre, mais aussi de Prométhée).

Nous nous proposons d’étudier ici, dans ses formes et ses effets, la spécificité de l’écriture tragique dans l’articulation entre savoir et danger. Cette réflexion, si elle s’enracine dans la tragédie grecque, est aussi ouverte à tous les remodelages littéraires, théâtraux ou non, qu’elle a connus de l’Antiquité — pensons, bien sûr, à Sénèque — à nos jours et qui ont infléchi, métamorphosé, décalé voire inversé les configurations symboliques et narratives héritées du Ve siècle avant J.-C.

Le programme de l’agrégation de lettres classiques 2013 et 2014 comportant à la fois l’Oedipe à Colone de Sophocle et l’Oedipe de Sénèque, nous nous pencherons tout particulièrement sur ce personnage, incarnation superlative des ravages du savoir puisqu’en lui l’aveuglement — au sens figuré — va de pair avec l’acharnement à aller jusqu’au bout d’une enquête dont le résultat le fera passer de la gloire au désastre, ce qu’il pressent avec angoisse quand il dit : « Je frémis d’horreur, craignant de voir où vont pencher nos destins, mon coeur tremblant chancelle sous un double choc : quand joie et douleur se trouvent mêlées dans une confusion ambiguë, l’âme incertaine, malgré son désir, craint de savoir. » (traduction de F.-R. Chaumartin, Paris, Les Belles Lettres, « Collection des Universités de France », 2011 [1999]) Nous observerons ce qui, dans le rapport au savoir, change entre l’Oedipe grec et l’Oedipe romain, sans oublier les autres personnages ni le rôle du Choeur qui, chez Sénèque, dit l’impossibilité désespérante de trouver dans l’univers la moindre certitude.

Mais d’autres grandes figures tragiques des périls de la connaissance seront abordées : Cassandre, la prophétesse au savoir méprisé (également sujet, sous un autre angle, du volume Cassandre, figure mythique du témoignage et de la transmission mémorielle coordonné par Véronique Léonard-Roques et Philippe Mesnard) ; Prométhée qui, dans le Prométhée enchaîné d’Eschyle, oppose devant le Choeur l’immensité des connaissances qu’il a apportées à l’humanité et les tourments dont il est incapable de se libérer ; Médée, dont la science, mise au service de la rage vengeresse, est porteuse de supplice et de mort ; Philoctète, condamné à la souffrance physique en même temps qu’à la torture de l’abandon pour avoir partiellement révélé ce qu’il sait ; etc. Le Choeur pourra, lui aussi, être pris comme objet d’étude, lui qui chante souvent la grandeur et la beauté du savoir et, tout aussi souvent, la terreur qu’il inspire : « j’ai mille désirs de t’interroger, désirs de savoir, désirs de sonder… mais c’est un tel frisson qui me glace à ta vue… » dit-il à Oedipe dans l’Oedipe roi de Sophocle.

Les communications seront mises en ligne très rapidement afin que les candidats à l’agrégation puissent en bénéficier ; une publication papier aura lieu par la suite.

Les propositions de communication, composées d’un titre et d’un argumentaire d’une dizaine de lignes et accompagnées d’une courte bio-bibliographie, seront envoyées avant le 15 novembre 2012 à Hélène Vial à l’adresse suivante : Helene.VIAL@univ-bpclermont.fr.