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Écrire le mariage des lendemains de la Révolution à la Belle Époque : discours, idéologies, représentations  

Écrire le mariage des lendemains de la Révolution à la Belle Époque : discours, idéologies, représentations

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Stéphane Gougelmann)

Écrire le mariage des lendemains de la Révolution à la Belle Époque : discours, idéologies, représentations 

colloque du 3 au 5 octobre 2013 à Lyon et Saint-Étienne

Ce colloque international est organisé par l’Unité mixte de recherche LIRE (Littérature, Idéologies, Représentations) 5611 (CNRS), l’Université Jean-Monnet (Saint-Étienne) et l’Université Lumière-Lyon 2, dans le cadre de l’axe « masculin / féminin » dirigé par Christine PLANTÉ.

Comité scientifique : Béatrice Didier (ENS Ulm), Anne-Marie Sohn (ENS Lyon), Jean-Louis Cabanès (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), Jean-Marie Roulin (Université Jean Monnet–Saint-Étienne).

Organisateurs: Stéphane Gougelmann (U. de Saint-Étienne) et François Kerlouégan (U. Lyon2)

Le colloque donnera lieu à publication après décision d’un comité de lecture.

I. Argumentaire

« Il est convenu qu’il n’y a que deux sortes de dénouements, le mariage ou la mort », note Nerval dans le Voyage en Orient. Au xixe siècle, dans tous les milieux et dans toutes les régions de France, existe-t-il convention plus répandue, point de doctrine moins incontesté, ambition mieux partagée que la nécessité absolue de se marier ?

Tout concourt à la noce. Mais que cache cet unanimisme nuptial ? Sans doute, la littérature fournit-elle la mise à l’épreuve la plus radicale et la plus complète de ce paradigme d’une conjugalité officielle et nous en révèle-t-elle les soubassements. Si le xixe siècle n’invente pas la littérature du mariage, il l’érige cependant, plus que jamais, en témoin du temps, miroir concentrique de certains grands faits sociaux. En effet, soit porteuses, soit contemptrices des idéologies prégnantes, bien des oeuvres, quels qu’en soient le genre, le style et le ton, nous aident à dénuder les fils économiques, sociaux, moraux et psychologiques qui servent de trame à l’expérience matrimoniale. Une lecture critique, ne négligeant pas les apports  parfois très récents des sciences humaines et sociales, permettrait donc non seulement de questionner le point de vue des écrivains sur l’institution du mariage, mais aussi de discerner, d’un côté, la doxa, de l’autre, les realia et, in fine, de comprendre une certaine vérité du siècle. À moins qu’on ne trouve aussi, dans la déconstruction du modèle, l’émergence d’autres clichés.

Au vu de l’importance du sujet, la tenue d’un colloque consacré au mariage dans la littérature française – le mariage compris comme cérémonie et/ou comme mode de vie –, des lendemains de la Révolution à la Belle Époque, permettrait de présenter un panorama raisonné et renouvelé des connaissances et d’ouvrir des perspectives de recherche.

L’une des premières ambitions de ce projet est de questionner la sociologie littéraire du mariage. Du mariage grand-bourgeois à la noce paysanne, comment les représentations littéraires contribuent-elles à se faire l’écho de pratiques sociales et géographiques, tout en les façonnant aussi en retour ? La dimension économique ne pourra pas non plus être négligée : le mariage constitue l’un des maillons forts d’un capitalisme fondé sur la constitution, la transmission et l’accumulation d’un patrimoine.

En second lieu, il conviendra de considérer comment le mariage fonde un imaginaire collectif et d’en ausculter les modalités d’imprégnation sociale, telles du moins que la littérature les décrit ou les instaure. En effet, le mariage s’impose, idéalement, comme une possible clef du bonheur intime et, réellement, comme une condition d’intégration sociale. C’est l’avenir que les parents souhaitent à leurs enfants. C’est aussi le rêve que nourrissent certains jeunes gens et, surtout, bien des jeunes filles. Dans ce façonnement imaginaire du mariage comme idéal de vie, on pourra en particulier s’intéresser aux rôles que jouent certaines formes de la littérature édifiantes (oeuvres pour la jeunesse, romans sentimentaux destinés à un lectorat féminin, etc.). Dans le même ordre d’idées, on pourra montrer comment s’énoncent ou se dénoncent, à travers le récit des conjugalités légitimes, une certaine idéologie de la famille et de la répartition genrée des rôles au sein du couple. De Mme de Staël à Léon Blum, la mise en cause d’une iniquité constitutive, vécue comme une incarnation de la contrainte sociale contre laquelle s’insurge la volonté individuelle, donne naissance à nombre d’essais, pamphlets ou manifestes critiques. Sur ce point, il sera profitable d’entendre la voix des opposants. Que nous dit la littérature sur les célibataires et les concubins ? Qu’en est-il en particulier de l’image du mariage chez les Bohèmes et dans les milieux artistes ?

Étudier le mariage, c’est également se pencher sur l’état matrimonial, la conjugalité. Cet aspect pourra constituer un troisième angle d’étude. Nul n’ignore que, du Lys dans la vallée à Madame Bovary, de Volupté à En rade, nombre de « grands romans » du siècle sont des romans du mariage malheureux, restituant dans le détail la lassitude et l’insatisfaction de la vie conjugale. Ainsi est-ce dans l’écart entre les prescriptions matrimoniales et le quotidien trivial de la conjugalité, entre les rêves de jeunesse et l’amertume des jours vécus que s’insère et se déploie la littérature. Le colloque envisage d’interroger la manière dont le quotidien du couple marié est mis à distance par la satire grinçante ou amusée, ou bien est exhibé dans sa noirceur poignante. Il arrive cependant qu’il soit conté aux lecteurs quelques unions réussies. Certaines communications pourront englober des considérations psychologiques et physiologiques sur la nature et l’évolution des sentiments et des désirs, dans le mariage ou hors mariage. Le mariage, qui relève du domaine des moeurs, induit, en particulier, une discipline du corps (qu’en est-il, par exemple, de la virginité de la fiancée ?) et la gestion d’une économie libidinale. On ne dénombre plus les histoires où surgissent l’amant du placard, la maîtresse de la garçonnière et la fille du lupanar ! Qu’advient-il de la fidélité ? Y a-t-il une représentation figée de la sexualité ? Qu’en est-il de l’amour en régime matrimonial? Ces questions et d’autres devront être prises en compte.

En dernier lieu, on devra questionner l’écriture du mariage. Au-delà des genres dans lesquels il s’inscrit, en quoi convoque-t-il une écriture particulière ? En quoi s’offre-t-il comme un signe ou un facteur de poéticité ? Il serait, par exemple, intéressant d’évaluer comment différentes configurations conjugales entraînent des formes romanesques distinctes, ou bien encore comment elles fournissent aux dramaturges un puissant ressort théâtral, tant dans le registre comique que pathétique. Enfin, il paraît important de réfléchir à une stéréotypie du mariage : le motif appelle des lieux communs, que les écrivains soit reconduisent, soit retournent.

Le choix des oeuvres analysées par les intervenants n’est pas génériquement limité. Les investigations seront principalement poussées dans l’univers de la fiction en prose et celui du théâtre. Elles peuvent éventuellement concerner la poésie, mais aussi l’opéra et les arts graphiques. Enfin, pour l’intérêt de l’enquête, il est souhaitable d’évaluer également le champ théorique des discours sur le mariage et, pour ce faire, de s’appuyer sur des textes d’idées.

Un argumentaire légèrement plus développé et des indications bibliographiques sont disponibles dans l'annonce du colloque disponible sur le site de l’UMR LIRE.

II. Axes de réflexion

Les travaux permettant une diversification des approches et une vision synthétique des problèmes sont particulièrement précieux. Seront donc privilégiées les propositions non monographiques et les propositions transdisciplinaires.

Les communications pourront prendre place dans l’un des quatre axes d’étude suivants.

Penser le mariage (discours sur le mariage ; textes polémiques de dénonciation du mariage ; apologies du mariage ; place du mariage dans le discours idéologique ; mariage et utopies politiques ; mariage et condition des femmes ; sociologie du mariage ; mariage d’intérêt, mariage d’amour ; mariage vs. célibat ; mariage religieux vs. mariage civil.) Anthropologie du mariage (la demande en mariage ; le contrat de mariage ; la dot ; le folklore nuptial ; la cérémonie ; la nuit de noces ; le voyage de noces ; la lune de miel ; les obstacles au mariage ; la virginité ; les figures matrimoniales : le prétendant, la demoiselle d’honneur, etc. ; les métiers du mariage : le notaire, la marieuse, etc. ; mariages consanguins et endogames ; mésalliances ; l’artiste et le mariage la promotion sociale par le mariage ; les configurations matrimoniales marginales, les mariages d’ailleurs - le mariage dans les récits de voyage.) Splendeurs et misères de la vie conjugale (l’idéal matrimonial – les rêves de jeune fille, par exemple dans le roman sentimental, le conte, la littérature enfantine, le comique de la vie conjugale – ; mariage et parodie ; mariage vs. ménage ; La fidélité et l’adultère ; les mal mariés ; la sexualité conjugale ; rôles de l’homme et de la femme dans le mariage : confirmation et subversion de la norme ; vieilles filles et vieux garçons ; divorce, veuvage et remariage ; le mariage à l’épreuve du temps.) Poétiques du mariage (lieux communs et isotopies de la scène de mariage ; le mariage, ressort dramatique au théâtre ; mariage et registres littéraires, le mariage comme configuration romanesque ; stéréotypes, lieux communs, clichés, mariage et poésie – épithalames, etc. – ; le mariage dans la peinture et la caricature ; le mariage dans la musique et à l’opéra.)

III. Envoi de propositions

Nous vous prions de bien vouloir faire parvenir vos propositions de communication d'une page maximum, accompagnées d'une brève bio- et bibliographie,  avant le 31 octobre 2012, conjointement aux deux adresses suivantes:

stephane.gougelmann@univ-st-etienne.fr

francois.kerlouegan@univ-lyon2.fr