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Écrire la Révolution Constructions, projections, postures (Univ. du Luxembourg)

Écrire la Révolution Constructions, projections, postures (Univ. du Luxembourg)

Publié le par Marc Escola (Source : Emilie Goin)

Écrire la Révolution. Constructions, projections, postures

Université du Luxembourg, 27-28 mai 2016

Conférencier invité : François Cusset (Université Paris X Nanterre) 

 

Révolution d’Octobre, Révolution allemande (1918-1919), Prises de pouvoir fascistes (Italie, Troisième Reich), Été anarchiste (Espagne, 1936), Révolutions chinoises, Mai 68, Chute du mur de Berlin, Printemps arabe… Ces divers bouleversements qui ébranlent l’ordre politico-social établi ont inspiré d’innombrables écrivains. Au XXe siècle, la Russie ouvre à la fois le bal des révolutions et, à travers l’ouvrage célèbre de L. Trotski, la réflexion sur les rapports entre Littérature et Révolution (1934).

Dans le sillage de la critique marxiste, la mise en fiction de l’évènement révolutionnaire a été discutée par différents penseurs qui se fondent (de façon plus ou moins implicite) sur une série d’antinomies : production intellectuelle vs action radicale, écrivain individuel vs peuple anonyme, institution littéraire établie vs bouleversement politique. Sans déprécier la pertinence heuristique de ce mode d’interrogation, nous voudrions opérer un déplacement de perspective en questionnant la dynamique représentationnelle par laquelle une révolution est mise en récit en tant qu’expérience vécue, épisode historique ou moment à venir. Cette dynamique articule au moins trois aspects interdépendants :

  • Construction. Le récit reconfigure l’évènement révolutionnaire sur un mode fictionnel, ce qui suppose un ensemble de choix de construction : une temporalité différente, une esthétisation, une multiplicité de voix et de points de vue, une éventuelle interdiscursivité (avec les discours médiatiques, par exemple), etc. (cf. Ricoeur 1983, 1984, 1985, Rabatel 2008).
  • Projection. En faisant « naître un monde » (Jauss, 1978), la littérature ouvre des possibles potentiellement subversifs. Seront questionnés ici les effets pragmatiques (toujours plurivoques) de la mise en récit : véhiculer une idéologie, informer ou sensibiliser un public, « faire communauté », encourager une pratique, etc.
  • Posture. À travers l’écriture d’une révolution, l’écrivain construit une image particulière de lui-même (rebelle, réactionnaire, sympathisant détaché,…). Cet « éthos » (Amossy 2010) généralement composite, qui émane du récit, peut être mis en relation avec le positionnement institutionnel et politico-social de l’écrivain (Meizoz 2007). On pourra, entre autres, interroger les différentes formes de « paratopies » (Maingueneau 2004) qui nourrissent la construction du récit, en particulier la difficile négociation entre l’image de l’intellectuel et celle du révolutionnaire.

Les contributions porteront sur un ou sur plusieurs récits littéraires traitant d’une ou de plusieurs révolutions. Seront prises en compte les fictions des XXe et XXIe siècles qui mettent en scène des révolutions politiques et/ou sociales, réelles ou imaginaires, sans restriction géographique. Les récits qui appellent ou annoncent une révolution sont également les bienvenus.

 

Axes de recherche (à titre indicatif) :

  • La mise en récit de l’évènement révolutionnaire réclame-t-elle des mécanismes spécifiques (narratifs, énonciatifs, discursifs, rhétoriques,…) ? Par quels moyens cette thématique est-elle articulée à l’esthétique littéraire ?
  • Comment se noue le rapport entre réflexion politique et fiction ? entre argumentation et narration ? entre idéologie et histoire ?
  • Comment l’écrivain articule-t-il sa propre image à celle du révolutionnaire ? l’acte d’écriture à l’acte révolutionnaire ? Comment négocie-t-il la temporalité différée du récit par rapport à l’immédiateté de l’acte révolutionnaire ?
  • Ces récits sont-ils reçus de la même manière par les médias, les intellectuels, les révolutionnaires, les autres écrivains ?
  • Comment différents auteurs traitent-ils d’une même révolution ? En tant qu’élément fondateur de la modernité, quelle place occupe la Révolution française dans les récits qui traitent d’autres révolutions ? Est-ce une référence, un contre-modèle, est-elle passée sous silence ?

 

La durée des interventions sera de 20 minutes, suivies de 10 minutes de discussion. Les propositions, sous forme de résumé de 400 mots accompagné d’une brève bio-bibliographie, devront être envoyées pour le 22 janvier aux organisateurs. Les réponses seront notifiées pour le 10 février.

 

Organisé par IRMA (Institut d’études romanes, médias et arts) de l’Université du Luxembourg, avec le soutien de l'École doctorale IPSE (Identité, Politique, Société, Espace), le colloque se déroulera sur le campus d’Esch-Belval. Les frais d'hébergement seront pris en charge par notre université. Une publication est envisagée.

Conférencier invité : François Cusset (Université Paris X Nanterre)

Organisateurs : Julien Jeusette (julien.jeusette@uni.lu) ; Jeroen Claessen (jeroen.claessen@uni.lu) ; Emilie Goin (emilie.goin@uni.lu)

Comité scientifique : Marion Colas-Blaise (Université du Luxembourg) ; Nathalie Roelens (Université du Luxembourg) ; François Provenzano (Université de Liège) ; Dominique Rabaté (Université de Paris 7 Denis Diderot)

 

Bibliographie indicative

 

Sur les révolutions et leurs mises en récit :

Bouthillon, F. (2011), Nazisme et Révolution – Histoire théologique du national-socialisme, 1789-1989, Paris, Fayard.

Cusset, F. (2008), Contre-discours de mai. Ce qu’embaumeurs et fossoyeurs de 68 ne disent pas à ses héritiers, Paris, Actes Sud.

Jenny, L. (2008), Je suis la révolution. Histoire d'une métaphore (1830-1975), Paris, Belin.

Pessin, A. & Terrone, P. (1998), Littérature et anarchie, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail.

Trotsky, L. (1964), Littérature et révolution, Paris, Union générale d'Édition.

 

Ouvrages méthodologiques :

 

Amossy, R. (2010), La présentation de soi. Éthos et identité verbale, Paris, Presses Universitaires de France.

Jauss, H. (1978), Pour une esthétique de la réception, Paris, Gallimard.

Maingueneau, D. (2004), Le discours littéraire. Paratopie et scène d'énonciation, Paris, Colin.

Meizoz, J. (2007), Postures littéraires. Mises en scène modernes de l'auteur, Paris, Slatkine.

Rabatel, A. (2008), Homo Narrans, pour une analyse énonciative et interactionnelle du récit, Limoges, Lambert-Lucas.

Ricoeur, P. (1983, 1984, 1985), Temps et récit (I, II, III), Paris, Seuil.