Essai
Nouvelle parution
E. Van der Schueren (éd), Charles Sorel Polygraphe

E. Van der Schueren (éd), Charles Sorel Polygraphe

Publié le par Julien Desrochers

 

Charles Sorel Polygraphe, textes rassemblés par Emmanuel BURY, édités par Éric VAN DES SCHUEREN,
Sainte-Foy, Presses de l'Université Laval (Les collections de la République des Lettres), 2006, 540 p.
ISBN : 2-7637-8451-8


 

Charles Sorel est un auteur prolifique, dont l’œuvre est tout autant pléthorique, au nom d’un combat qu’il jugeait juste, que protéiforme du fait d’un réel talent. Encyclopédiste ! Certes, il n’aurait pas renié le qualificatif puisqu’il a tenu pour sa maîtresse oeuvre une vaste compilation des savoirs scientifiques passés au crible de la raison moderne – celle de Francis Bacon et de son souci de l’expérience. Mais il est avant tout un prosateur polygraphe, alors qu’il a traqué les faussetés de la poésie de son temps et du legs gréco-latin et humaniste, en même temps qu’il aura dévalué les romans épiques et pastoraux. Polygraphe, voire polyphoniste, il l’a été en divers genres, de l’historiographie royale à la critique littéraire, du roman comique à l’utopie allégorique, de la somme scientifique aux pièces galantes. On en oublierait un détail : Charles Sorel est un auteur du XVIIe siècle, mais il n’a rien de classique, dans toutes les connotations que le mot traîne après lui. C’est un polygraphe donc qui survient comme un coin porté dans l’image roide que suppose le simple terme de classicisme.

Cet auteur, décalé et incongru – sans doute oublié longtemps pour cela – au milieu des fastes glacés de la raison et de la clarté prétendument louis-quatorziennes, jouit à présent d’une réelle notoriété reconquise sur le discrédit et les anathèmes faciles, parmi les spécialistes des lettres de l’âge classique. C’est un juste retour d’intérêt.

Les actes ici rassemblés participent de cette réévaluation, mais surtout ils sont de toute évidence fondateurs des études à venir sur l’une des figures les plus originales et complexes du XVIIe siècle français, ne serait-ce que pour l’avoir saisie à l’aune du schème qui en fait toute sa variété et toute sa richesse. Charles Sorel a modulé des vérités difficiles à entendre, des impertinences inacceptables, des dysphonies irritantes dans le concert classique des Muses et des savoirs de son temps, au travers de tous les genres prosaïques ; il a réussi à faire percer cette leçon trop injustement enfouie qu’il y a une vraie raison à vouloir être toujours jeune, rieur, curieux et critique ; c’était ce que l’on appelait le libertinage érudit : toutefois cette appellation un tantinet neutralisante de vraies et encombrantes audaces risquait de faire oublier combien l’histoire entendait endormir, sinon étouffer, de telles enfances qui la condamnerait, si elles devaient dominer, à se penser autrement que comme un cénotaphe d’autorités marmoréennes et écrasantes.

 

TABLE DES MATIÈRES :

 

Présentation
Éric Van der Schueren

Situation de Charles Sorel
Jean Serroy

De la « comédie humaine » à la « perfection de l’homme » : Charles Sorel moraliste
Richard G. Hodgson

Histoire et roman : cohérence de l’œuvre sorélienne
Andrew Suozzo

Avatars d’une modernité littéraire différente : le projet historiographique de Sorel
Hartmut Stenzel

Charles Sorel et la Deffense des Catalans. Histoire et idéologie
Daniel Riou

La science universelle, ou comment « parvenir à une félicité souveraine » :
Analyse des seuils du texte — portée épistémologique et enjeux philosophiques
Isabelle Moreau

Les erreurs de Cléomède, ou La science universelle éclairée par la fiction
Michèle Rosellini

La matière et le système du monde dans La science universelle
Martine Alet

La dynamique de l’imagination dans La science universelle de Charles Sorel
Claudine Poulouin

L’histoire aux rayons de La bibliothèque françoise
Frédéric Charbonneau

Charles Sorel, entre fascination et répulsion pour le roman
Anne-Élisabeth Spica

Sorel et les narrations brèves : « Diversité, c’est ma devise »
Claudine Nédélec

Sorel et l’écriture, ou l’évolution d’une mentalité
Francis Assaf

Élitisme de Francion
Nicolas Bourdon

Le civisme dans l’Histoire comique de Francion par Charles Sorel
Orest Ranum

Le banquet des dieux, un topos burlesque revisité par Sorel, Scarron et Dassoucy
Jean Leclerc

Le roman parle du roman : critique et poétique du genre dans Le berger extravagant
Suzanne Guellouz

Entre théorie et pratique romanesque : le rôle de la rhétorique dans Le berger extravagant de
Charles Sorel
Laura Rescia

Mythic and Modern Doubt : Dreams in Don Quijote and Francion
Thomas P. Finn

Sorel romanesque et le mystère de La Polyxene
Gabrielle Verdier

Polyandre, ou la critique de l’histoire comique
Patrick Dandrey

L’animal indecrotabile, la représentation du savant et la question du savoir dans l’œuvre de Sorel
Jocelyn Royé

Charles Sorel critique théâtral
Jean-Marc Civardi

Utopie à la dérive : La description de l’isle de Portraiture
Martine Debaisieux

Charles Sorel et la topographie allégorique
Marie-Christine Pioffet

Charles Sorel et le « Parnasse galant »
Delphine Denis

Annexe
Les loix de la Galanterie

Charles Sorel arbitre de l’amitié tendre
Claire Carlin

L’honnête roman
Normand Doiron

 

Les auteurs:

 

Emmanuel Bury est professeur de littérature française classique à l’Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines.

 

Éric Van der Schueren est docteur de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université libre de Bruxelles.