Questions de société
Deuxième lettre ouverte des sociétés savantes & associations d'enseignants à X. Darcos (6/4/9).

Deuxième lettre ouverte des sociétés savantes & associations d'enseignants à X. Darcos (6/4/9).

Publié le par Marc Escola

6 avril: en l'absence de toute réponse à une première missive datée du 12 mars, le Ministre de l'Education Nationale Xavier Darcos vient de recevoir une deuxième lettre lançant un appel solennel pour un vrai moratoire (concours et conditions de stages et de recrutement conservées en l'état) sur la masterisation, signée par 33 sociétés savantes et associations (dont Fabula) représentant de nombreuses disciplines…

Lettre ouverte des sociétés savantes et des associations d'enseignants
au Ministre de l'Education Nationale



Paris, le 6 avril 2009

À Monsieur le Ministre de l'Éducation Nationale



Monsieur le Ministre,

Bien que vous n'ayez pas répondu à notre lettre ouverte du 12 mars, nous nous adressons de
nouveau à vous, en réaction à votre communiqué du 31 mars. Nos sociétés réunissent la plus
grande partie des universitaires et enseignants des principales disciplines enseignées dans les
établissements dont vous avez la haute responsabilité. Nous sommes notamment les
préparateurs de « vos » concours. Toutes disciplines confondues, nous avons déjà attiré votre
attention sur les effets pervers du projet de réforme de formation des maîtres et des concours
de recrutement qu'au mépris de tous les avertissements, vous voulez mettre en oeuvre dès
septembre prochain. Nous ne reprendrons pas ici notre argumentaire.

Après avoir longtemps refusé la discussion, le 18 mars, vous avez admis la nécessité
d'un « dialogue raisonnable » et d'une « controverse argumentée », que nous réclamions en
vain depuis des mois. Puis vous avez enfin accepté de maintenir les concours en l'état pour
2010. Nous prenons acte de ce premier geste. Il est vrai qu'il n'y avait guère d'autre solution
pour tenter de sortir de l'impasse dans laquelle votre ministère s'était engagé. Mais il est
évident que cette demi-mesure ne résout rien, à la fois parce qu'elle arrive trop tard, parce
qu'elle laisse ouverts nombre de problèmes insolubles, parce qu'elle ajoute à la confusion. En
effet, avec la meilleure volonté du monde, le dispositif prévu pour l'année à venir est
impossible à appliquer. Plus le temps passe, et plus cette évidence s'impose à tous les acteurs
potentiels de la réforme, y compris les mieux disposés.

Il ressort notamment des dispositions décrites dans votre communiqué du 31 mars qu'il
faudrait assurer l'an prochain :
- un M2 avec préparation au concours (ancienne version, passé en février 2010), 
- un M1 avec préparation au concours (ancienne version), conduisant à un M2 sans
concours,
- un M1 sans concours, conduisant à un M2 avec préparation au nouveau concours qui,
d'après un communiqué précédent, se passerait en octobre, sans précision de l'année : M1
ou M2 ?

L'inscription en I.U.F.M. vaudrait également « inscription » en M1 ; mais de quel M1
s'agirait-il et quel M2 suivrait ? Les dispositifs de stages, de bourses, de formation
professionnelle et continue ne sont toujours pas précisés. Les quelques maquettes de masters
d'enseignement transmises au MESR ne correspondent à aucun de ces schémas : que va faire
l'AERES ? Va-t-il falloir composer dans l'urgence cinq ou six sortes de nouvelles
maquettes ? Que deviendront les « reçus-collés » que ce système créera ?

Si nous acceptions ce dispositif, le processus de mastérisation serait lancé, avec notre
complicité, dans des conditions d'improvisation et de confusion inacceptables, dommageables
à nos étudiants et au service public. Et tous les risques de la réforme, déjà maintes fois
rappelés, subsisteraient : objectifs inconciliables au sein du master, disparition de la 5e année
de formation rémunérée, mise en concurrence des universités, etc. Si nous avons demandé le
maintien des concours dans leur format actuel en 2010, ce n'est évidemment pas pour voir la
réforme se mettre en place dès 2009 en dépit de toutes les difficultés qui ont été soulevées ! 

Nous réitérons donc avec plus de force la demande instante que nous vous avons déjà
adressée le 12 mars : le report de la réforme dans son ensemble est la seule solution
permettant une remise à plat du dossier et une véritable concertation, à laquelle nous devrons
être associés (en ce qui concerne le contenu des futurs concours, puis l'organisation des futurs
masters).

Pour dissiper nos craintes et celles de nos étudiants, vous devez retirer le projet actuel,
rétablir l'année de stage pratique en alternance rémunérée et prise en compte dans la carrière,
et avant tout décréter un vrai moratoire d'une année afin de laisser à la commission
représentative le temps de décider du contenu scientifique des concours, de la nature des
épreuves disciplinaires, des conditions de préparation et des moyens matériels et humains à
prévoir pour assurer aux enseignants de demain une formation digne de ce nom, à la hauteur
des ambitions légitimes que vous-même mettez en avant.

Dans l'attente d'une réponse de votre part, nous vous assurons, Monsieur le Ministre,
de notre dévouement au service public de l'Education Nationale.



Premiers Signataires :

Assemblée des Directeurs d'IREM
Association des Germanistes de l'Enseignement Supérieur
Association des Historiens Modernistes des Universités Françaises
Association des Professeurs d'Histoire et de Géographie
Association des Professeurs de Langues Anciennes de l'Enseignement Supérieur
Association des Professeurs de Mathématiques de l'Enseignement Public
Association des Professeurs de Musique et Musicologie de l'Enseignement Supérieur
Association des Sciences du Langage
Association Fabula
Association Femmes et Mathématiques
Association Française des Catalanistes
Association Française des Enseignants de Français
Association Française des Russisants
Association Guillaume Budé
Association pour l'Encouragement des Etudes Grecques en France
Association pour la Recherche en Didactique des Mathématiques
Commission Française pour l'Enseignement des Mathématiques
Société Botanique de France
Société Chimique de France
Société d'Etude du XVIIe Siècle
Société de Langue et Littérature Médiévales d'Oc et d'Oïl
Société des Anglicistes de l'Enseignement Supérieur
Société des Etudes Latines
Société des Etudes Romantiques et Dix-neuviémistes
Société des Italianistes de l'Enseignement Supérieur
Société des Personnels Enseignants et Chercheurs en Informatique de France
Société Française d'Etude du XVIe Siècle
Société Française d'Etude du XVIIIe Siècle
Société Française de Littérature Générale et Comparée
Société Française de Physique
Société Française de Statistique
Société Française des Etudes Japonaises
Société Mathématique de France


Merci d'adresser tout courrier à :
Société Mathématique de France, Institut Henri Poincaré
11 rue Pierre et Marie Curie , F-75231 Paris Cedex 05
smf@dma.ens.fr