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Appels à contributions
Deleuze, Guattari, et les artistes

Deleuze, Guattari, et les artistes

Publié le par Alexandre Gefen (Source : René Lemieux)

Le présent appel à contributions provient de deux sources. La première a trait à un travail depuis longtemps engagé à la Revue Trahir, à savoir l’intérêt pour la réception et la traduction de Gilles Deleuze et de Félix Guattari, qui sont, du point de vue philosophique et sociologique, exemplaires, du fait de leur amplification considérable ces dernières années. On sait par exemple que Deleuze est l’auteur dont les livres sont les plus piratés dans le monde éditorial francophone – ce qui n’est pas peu dire sur l’étendue quantitative de la réception de sa philosophie, mais aussi sur sa nature. La deuxième source de cet appel provient de la philosophie même de Gilles Deleuze et de Félix Guattari qui définissent – mais aussi distinguent – trois manières d’affronter le chaos, respectivement chez les philosophes, les scientifiques et les artistes : tracer un plan d’immanence, tracer un plan de coordonnées ou tracer un plan de composition. Or qu’en est-il d’un art qui prétend tracer un plan de composition à partir de la pensée, ou avec la pensée d’un philosophe, et celle de Gilles Deleuze et Félix Guattari en particulier ? Dans Qu’est-ce que la philosophie ?, Deleuze et Guattari disaient pourtant que « les trois pensées se croisent, s’entrelacent, mais sans synthèse ni identification. » Comment alors penser, du point de vue de la philosophie, les nombreux artistes qui prétendent faire de l’art à partir de la philosophie de Gilles Deleuze et Félix Guattari – et ici, nous prenons la prétention d’abord au sens philosophique, à savoir l’introduction à l’agora d’une agonistique qui lui est propre et qui déterminera la philosophie depuis Platon ?

Trop souvent, cette prétention artistique qui vient directement mettre en question la vérité du concept est regardée avec condescendance par les spécialistes de Deleuze et Guattari, qui verraient là un abâtardissement de la philosophie, devenue symptôme d’une nouvelle prétention, cette fois au sens commun. En ce sens, les philosophes universitaires autorisés (parfois par Deleuze et Guattari, eux-mêmes) peuvent se permettre de refuser crûment tout dialogue avec ces artistes. Et d’un certain point de vue, n’y aurait-il pas dans ces oeuvres d’art le risque de « reconduire à l’opinion » les percepts ou « de précipiter dans le chaos » l’art ?

La Revue Trahir s’intéressera particulièrement à des enquêtes sur ce qui se passe en art quand celle-ci aborde (au sens de la piraterie) la philosophie de Gilles Deleuze et de Félix Guattari – dans les termes des auteurs : les stratégies utilisées pour former un plan de composition à partir des concepts, une transmission et une appropriation perceptuelles des concepts philosophiques –, et, réflexivement, sur la possibilité même de la philosophie à penser ces stratégies artistiques, c’est-à-dire à retracer un plan d’immanence de ces transmissions et appropriations, qui ne peut faire l’économie d’une réflexion sur la rétro-réception philosophique de ce « revenir des morts » particuliers des artistes, et ce, 1) en laissant la parole à ces artistes, 2) par des entretiens avec ces artistes accordés à des philosophes, ou encore, 3) par des contributions sur cette relation particulière de la philosophie et de l’art où ce dernier se met en scène dans le lieu même du discours philosophique. En somme, on invite la communauté des lecteurs de Deleuze et de Guattari à retraverser vainqueur, par un détour artistique, l’Achéron.

 

Date limite : 1er mai 2012. 

 

Pour information : info@revuetrahir.net