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De l'intérêt. Histoire et évolution d'une notion de la Renaissance aux Lumières

De l'intérêt. Histoire et évolution d'une notion de la Renaissance aux Lumières

Publié le par Marc Escola (Source : Virginie Yvernault)

Fabre Juliette, Yvernault Virginie

 

 

Journée d’étude des jeunes chercheurs du CELLF (Paris Sorbonne Paris IV)

 

 

« De l’intérêt.

Histoire et évolution d’une notion de la Renaissance aux Lumières »

 

 

 

Rarement interrogée dans son histoire ou dans ses enjeux, la notion d'intérêt a pourtant joué un rôle central dans le développement de la pensée morale, politique, économique et esthétique de la Renaissance aux Lumières. Cette journée d'étude se propose d'interroger la polysémie riche et ouverte du terme et d'aborder la notion à la fois dans les textes et dans les discours critiques. Comment passe-t-on d'un sens nettement péjoratif au XVIe siècle à une acception globalement positive à la fin du XVIIIe siècle ?

À l'époque médiévale comme à la Renaissance, l'« intérêt » désigne principalement les indemnités qu’on est en droit de réclamer. L’Église catholique condamnant le prêt à intérêt, le terme est largement discrédité. Le XVIIe siècle conserve le sens financier, mais la perspective morale s'enrichit, amplifiant le versant négatif du terme : l'intérêt personnel, dans la lignée des critiques de l’amour-propre, est ce vice qui fait que l'on recherche ses avantages au mépris de la justice et de la vertu. Pourtant, c'est aussi au XVIIe siècle qu'apparaît le sens moral d' « attachement » à une chose ou à une personne. On pourrait d'ailleurs s’interroger sur le clivage entre discours masculin et féminin dans l’usage du mot : l’ « intérêt » est-il réservé à l’expression d’un désir féminin (plus ou moins litotique) ? On retrouve ainsi le terme dans le discours libertin du siècle suivant qui en use comme d'une métaphore économique et joue avec les clichés du discours affectif.

Le sens politique est attesté dès la Renaissance avec l'idée d' « intérêt d’État ». Sans que le mot soit nécessairement employé, l’idée est présente chez Machiavel ou chez Montaigne, et on la retrouve dans les pièces de Corneille et de Racine. Au XVIIIe siècle avec Rousseau ou Adam Smith, un des pères de l'utilitarisme, la notion d’intérêt prend une importance et un sens nouveaux en politique comme en économie.

Mais c'est surtout l'usage poétique et esthétique de la notion qui se développe aux XVIIe et XVIIIe siècles. L’intérêt a une pertinence particulière dans les traités de poétique concernant le théâtre : comment susciter et entretenir l'intérêt du spectateur, pour éviter qu'il ne mange des confitures pendant la représentation au lieu de « s'intéresser » au sort du personnage ? En quoi l'intérêt d'une tragédie diffère-t-il de celui d'une comédie ? Mais on pourra élargir avec profit ces questions aux romans ou aux autres genres, et s’interroger sur les liens entre l'intérêt et l'intrigue.

Au XVIIIe siècle, avec l’essor du rôle dévolu à la sensibilité, l’intérêt se porte sur les sentiments du spectateur. L’adjectif « intéressant » ne fait d'ailleurs son apparition qu’au début du XVIIIe siècle, marquant ce tournant dans la conception du sujet comme centre de la perception esthétique, morale, cognitive. Les auteurs de théâtre n'hésitent pas à flatter les penchants du spectateur, de sorte que l'intérêt moral entre souvent en contradiction avec l'intérêt esthétique, ce qui fait l'objet d'un débat plus ou moins vif tout au long du siècle.

 

 

Des interventions dans différents domaines sont envisageables, et nous invitons les jeunes chercheurs à réfléchir à des pistes concernant :

 

-des études lexicologiques en diachronie ou en synchronie, envisageant l’ensemble du champ lexical (« intérêt, désintérêt, intéressant, intéressé… »)

-des analyses portant plus précisément sur les sens économique et politique du terme

-des débats en philosophie morale ou politique

-des questions de poétique et d'esthétique

-des études des représentations littéraires des passions et des intérêts

 

On pourra ainsi aborder la notion en contexte, chez tel ou tel auteur de la période classique, ou en diachronie en problématisant les évolutions sémantiques de ce terme polysémique.

 

Nous invitons donc tous les jeunes chercheurs et doctorants susceptibles d’être intéressés par cette notion à envoyer une proposition de communication pour cette journée d’étude qui aura lieu le 7 juin 2014 à la Maison de la Recherche (28 rue Serpente, 75 006 Paris).

 

Les propositions de communication (environ 300 mots) sont à envoyer avant le 5 avril 2014 aux deux adresses suivantes :

 

fabrejuliette@hotmail.fr

virginie.yvernault@laposte.net