Questions de société
Darcos: pas de diplôme pour les bloqueurs (RTL 11/05/09) +

Darcos: pas de diplôme pour les bloqueurs (RTL 11/05/09) + "À quoi joue le gouvernement?"(blog de Sylvestre Huet)

Publié le par Bérenger Boulay

De mieux en mieux ...

Le ministre de l'Education nationale répondait lundi matin (11/05/09) aux questions de Jean-Michel Aphatie sur RTL.

Darcos: "Je dis (...) à ces bloqueurs :méfiez-vous ! parce que l'opinion se retourne, les étudiants nesupportent plus, les familles non plus ; et il n'y aura pas de diplôme,il n'y aura pas de licence ès-grève, de mastère en pétition ou dedoctorat en blocage. Donc, on ne donnera pas de diplôme à ceux quiauront fait en sorte que les universités ne fonctionnent pas."

Écouter ou voir l'émission.

Rappel: Xavier Darcos est Supermenteur (Lettre ouverte, pétition etc.)

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Universités : à quoi joue le gouvernement ? (Blog de Sylestre Huet - 11/05/09) + retranscription des propos de Darcos + communiqués de SLU, Autonome Sup et QSF.

http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2009/05/universit%C3%A9s-%C3%A0-quoi-joue-le-gouvernement-.html#more

La gestion de la crise universitaire par le gouvernement devient franchement bizarre. Ce matin, sur RTL, Xavier Darcos s'est lancé dans un discours violent, réduisant la contestation à "quelques dizaines d'individus qui bloquent les établissements" qui "n'auront pas de diplômes" en grèves, blocage et pétition (lire son intervention en fin de note).

Il semble également que Valérie Pécresse et Xavier Darcos aientproposé que l'inscription aux concours du CAPES ou de professeur desécole donne automatiquement une première année de master, sans aucuncontrôle de connaissances. «Qui brade les diplômes ?», s'insurge Sauvons l'université (lire communiqué en fin de note).

De son côté Autonome Sup, tout en condamnant les blocages accuse l'UMP de jeter de l'huile sur le feu, notamment parla proposition de loi mettant la nomination des personnalitésextérieures aux Conseils d'administration des universités dans lesmains du gouvernement (lire en fin de note).
Examens et diplômes d'un côté, mastérisation de l'autre sont les points saillants de la phase actuelle de la crise. La contestation, elle, continue, sous des formes variées.

Alorsque le sentiment de gachis s'étend - gachis pour les étudiants, lesuniversitaires, les universités, mais aussi pour leur capacité à seréformer - la question de la responsabilité de cette situations'impose. Les derniers épisodes de cette crise éclairent les premiers.La léthargie du gouvernement, en janvier, alors que la Conférence desPrésidents d'Université avait sonné le tocsin dès le 5janvier. Puis lediscours provocateur de Nicolas Sarkozy le 22 janvier. Le refusd'engager de véritables discussions avec les acteurs majeurs dumouvement universitaire et les petites manoeuvres de Valérie Pécressepour éviter d'annoncer ses reculs partiels aux principaux animateurs dede mouvement. Les reculs confus sur la mastérisation et le décret surle statut des universitaires.

Tout cela pouvait sembler de la maladresse, aujourd'hui, cela ressemble plutôt à une politique du pire délibéréemêlant le calcul politicien, la volonté de briser toute résistance,mais également celle de vider les amphis des universités de SHS lesmoins bien considérées par le pouvoir, ce qui permettra de justifierpar la suite les baisses de crédits. Après tout, c'est en cohérenceavec l'analyse de l'UMP selon laquelle ces formations généralistes nedébouchent pas sur l'emploi et sont inutiles

Sans partager nécessairement cette critique radicale, même certains des acteurs les plus modérés de cette crise, Lionel Collet, le président de la CPU , le syndicat Autonome Sup, le collectif Défense de l'Université ou Qualité de la Science Française (lire communiqué en fin de note) le reconnaissent : le gouvernement porte la lourde responsabilité de sa durée, de ses conséquences.


Voici les propos de Xavier Darcos, ce matin sur RTL, consacrés à l'Université

J-M Aphatie: Certaines universités françaises vont entrer dans leur quinzièmesemaine de désordre. Parmi les causes de ces désordres, le décret quiréorganise la formation des futurs professeurs ; et une rumeur dit,Xavier Darcos, que vous pourriez modifier ce décret cette semaine. Vraiou faux ?
Xavier Darcos : Non. Nous sommes en discussion.L'affaire est compliquée à comprendre du grand public, n'est-ce-pas. Ils'agit de savoir si oui ou non on va recruter les professeurs à bac +5. Tout le monde est d'accord. C'est comme ça dans tous les paysdéveloppés et ça permettra surtout d'améliorer les débuts de carrièredes enseignants. Ils seront mieux payés. Or, aujourd'hui, ils sontrecrutés pour la plupart d'entre eux à bac + 3. Comment passe-t-on debac + 3 à bac + 5.Bac + 3 en 2009 ; Bac + 5 en 2011. Comment fait-on entre les deux ?Donc, c'est la question que nous posons aujourd'hui. Nous avons déjàdécidé de maintenir les épreuves, les mêmes que celles de naguère pouréviter que les préparations soient troublées. Maintenant, nous essayonsde voir comment ceux qui seront dans l'intermédiaire en M1,c'est-à-dire en quatrième année, comment nous pourrons ou pas lesrecruter. Ce sont des questions qui sont aujourd'hui en discussion.Mais ça a toujours été l'objet de la discussion de fond.

J-M Aphatie : Mais vous espérez sortir quandmême de tous ces troubles, cette semaine, en proposant des choses ouvous n'en proposerez pas de nouvelles aux partenaires syndicaux ?

Xavier Darcos : Mais nous ne faisons que cela.Il y a une commission même qui a été mise en place, qui est présidéepar le recteur de Bordeaux, monsieur Marois et le président de ToulouseMirail, monsieur Fillastre qui accompagnent les suivis de la réforme.La discussion n'a pas cessée. De toute façon, vous voyez bien,Jean-Michel Aphatie, ne tournons pas autour du pot, que dans les vingtuniversités qui sont -pour partie- encore troublées sur 85, il nes'agit pas de savoir si on est pour ou contre ceci ou cela, il s'agitde quelques dizaines d'individus qui bloquent les établissements et quifont que les élèves les plus modestes, ceux qui financent leurs études,ceux qui ont besoin d'avoir leur diplôme avant l'été, ceux dont lesfamilles se saignent aux quatre veines pour leur payer des études, ehbien ceux-là, ils seront dans une difficulté énorme. Ils ne pourrontpas peut-être valider leur semestre.Les blocages qui persistent ne sont pas légitimes, selon vousaujourd'hui, Xavier Darcos ?Les blocages qui persistent nuisent aux étudiants les plus fragiles. Etpensez aux étudiants étrangers ! Aujourd'hui, il y a des étudiants quivont avoir des diplômes partout, des diplômes prestigieux. Ils sont àPrinceton, ils sont à Cambridge, ils sont à Law Down School ofEconomics, ils sont à Madrid's, ils sont à Hambourg et ils ne sont plusdans certaines de nos universités et tout cela est extrêmement grave.Je dis d'ailleurs à ces bloqueurs : méfiez-vous ! parce que l'opinionse retourne, les étudiants ne supportent plus, les familles non plus ;et il n'y aura pas de diplôme, il n'y aura pas de licence ès-grève, demastère en pétition ou de doctorat en blocage. Donc, on ne donnera pasde diplôme à ceux qui auront fait en sorte que les universités nefonctionnent pas.

Voici le communiqué publié ce jour d'Autonome Sup, qui demande : Qui est pyromane à l'université ?

AUTONOMESUPattire l'attention sur la gravité de la situation de nombreusesuniversités bloquées ou perturbées par des minorités violentes. Si ceblocage continue, la valeur des diplômes ne pourra pas être garantie etle choix sera entre la suppression de la session de juin et ladévalorisation des diplômes. Les blocages sont une atteinte à laliberté d'expression et d'enseignement. Ils prennent en otage lesétudiants, notamment les plus modestes qui n'ont que la qualité de leurdiplôme pour entrer dans la vie professionnelle et qui voient anéantisleurs projets et les efforts financiers consentis durant l'année.Enfin, ils portent atteinte à l'image de l'université française. Cettesituation est particulièrement grave dans le contexte européen : desmilliers d'étudiants européens sont en train de perdre le semestrequ'ils sont venus passer chez nous. Quelle sera la crédibilitéinternationale de l'Université française ? Déjà, des milliersd'étudiants se détournent de l'université pour aller versl'enseignement supérieur privé qui, depuis la réforme du L. M. D,délivre les mêmes grades universitaires.

En jouant le pourrissement et la diversion, le ministère del'enseignement supérieur porte la lourde responsabilité de laradicalisation du mouvement des universitaires. Mais ceux qui bloquentaujourd'hui les universités sont en train de tuer l'Université.Particulièrement attachée au service public universitaire, AUTONOMESUPestime que la défense de celui-ci passe par un très haut niveau dequalité, ce qui est le devoir des universitaires. AUTONOMESUP appelledonc tous les universitaires à leurs responsabilités et invite lesétudiants à reprendre les cours sans tarder : avec celui del'Université française, c'est leur avenir qui est menacé.

Mais le pouvoir doit s'abstenir de toute provocation : le dépôtpar B. Apparu, rapporteur de la loi LRU, d'un projet de modification decette loi pour faire nommer par les recteurs les personnalitésextérieures non élues du Conseil d'administration et leur permettre departiciper à l'élection du président est particulièrement scandaleux.AUTONOMESUP affirme depuis longtemps que la loi LRU doit être modifiéesur des points capitaux (mode d'élection du CA, limitation des pouvoirsdes présidents, place des composantes, rôle du CS, respect du statutnational des universitaires…). Mais, alors que l'université françaiseest dans le chaos (nous l'annoncions en janvier !) et que le travail deréflexion sur la modification de la LRU initié par le député D.Fasquelle est au point mort, la seule modification de la loi LRU qu'onpropose consiste à faire nommer par les recteurs, représentants desministres, les personnalités extérieures non élues du CA (seront-ellesindépendantes si elles sont nommées par le pouvoir ?) pour peser surl'élection des présidents, ce qui ne saurait être légitime que si cespersonnalités étaient désignées par les organismes qu'elles doiventreprésenter.

Une telle proposition ne peut apparaître que commeune volonté de reprise en main des universités et donc comme uneprovocation inacceptable dont les effets seront dévastateurs dans lecontexte actuel. B. Apparu jette de l'huile sur le feu et, apparemment,« on » le laisse faire : quel est le but poursuivi ? Qui est pyromane àl'université ? Cette proposition doit être immédiatement retirée sil'on veut ramener le calme, ce que nous demandons dans la premièrepartie de ce communiqué. Nous en appelons aux plus hautes autorités del'Etat pour faire cesser les provocations de ce genre.

Michel GAY Jean-Louis CHARLETSecrétaire général et Présidentd'AUTONOMESUP

Voicile communiqué de Sauvons l'Université sur la mastérisation et l'annonceque l'inscription au concours de recrutement vaudra première année demaster :

La volonté des ministères de mettre en place àtout prix la réforme de la formation et du recrutement des enseignantsdu primaire et du secondaire (« masterisation ») alors que toutes lesuniversités publiques ont refusé de mettre en place des maquettes demaster pour ces nouvelles formations conduit à desdécisions extravagantes et met en cause l'équilibre et la diversité del'offre de formation au niveau master dans les universités françaises.En effet, dans le cadre des discussions en cours entre des syndicats etles ministères de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieuret de la recherche, une proposition curieuse vient d'être avancée :attribuer une première année de master (M1) à tout étudiant qui seserait inscrit à une préparation à un concours de recrutement, mêmes'il ne réussit pas ce dernier !
Une telle décision est susceptible d'avoir des conséquences graves à court terme.

 1.Mécaniquement, elle produira une disparition de nombreux masters,notamment dans certaines disciplines comme les mathématiques ou leslettres et sciences humaines puisqu'il suffira de s'inscrire dans unepréparation à un concours pour décrocher un M1.
 2. Mécaniquement,elle affaiblira encore plus, de la sorte, le secteur de la recherchedans les universités de taille moyenne qui pourraient ainsi tendre à se« spécialiser » dans la seule formation des enseignants au niveaumaster et perdre leurs écoles doctorales.
 3. Mécaniquement, elle rendra immédiatement visible et effectivel'existence d'un contingent important de « reçus-collés » qui aurontleur M1 sans avoir été reçus au concours de recrutement.

En outre, si on ajoute que cette mesure « transitoire »catastrophique pourrait bien être reconduite faute d'élaboration àtemps de maquettes de masters d'enseignement, elle revient à inventerun nouveau moyen de pression pour obliger les universités à préparerdes maquettes de master pour la formation des enseignants alorsqu'elles ont refusé de le faire.

Le prix à payer pour la reconnaissance légitime d'un niveau deformation plus élevé pour les étudiants qui auront échoué au concoursne saurait être d'imposer la mastérisation des formations telle quel'entend le gouvernement actuel. Cette mesure apparemment limitéerelève donc d'une manipulation et illustre les effets néfastes del'opacité et de la précipitation qui marquent encore et toujoursl'action des ministères concernés.

Un autre exemple de ce type de manoeuvres est la mise en placedes « groupes de travail » et de la commission ad hoc créés par legouvernement. Un petit nombre de réunions a été prévu dont la durée nepermet en aucun cas de réfléchir sérieusement à la formation et aurecrutement des enseignants. En outre, prévaut, ici comme ailleurs, leprincipe d'une segmentation des questions interdisant touteappréciation d'ensemble. Une commission (Marois-Filâtre) semble chargéede mettre en musique l'ensemble mais on ne sait pour l'heure que deuxchoses de cette instance : les noms de ceux qui la dirigent et le tempsextrêmement limité qu'elle pourra consacrer à ses travaux puisqu'elledevra rendre ses conclusions le 15 juillet. Tout cela ressemble fort àl'éphémère mission de médiation sur le statut desenseignants-chercheurs en février dernier dont on a pu constater qu'ils'agissait d'une simple affaire de communication (on se demanded'ailleurs où est passée la médiatrice en question). Même la CPU, qui apourtant placé l'un des siens à la tête de ladite commission semblel'avoir compris dans son communiqué du 7 mai 2009 sur la question. Toutcela n'est pas le gage, une fois de plus, d'un processus susceptibled'être accepté par une majorité des acteurs de cette formation...
C'est pourquoi, en réponse à la Ministre de l'enseignementsupérieur et de la recherche qui s'indigne de l'éventualité qu'advienneune validation des connaissances en mai-juin 2009 « alors que lesenseignements n'auraient pas été délivrés normalement » (entretienpublié le dimanche 3 mai), SLU demande : qui brade les diplômes ?

voici le communiqué de Qualité de la Science Française :

Enadoptant la stratégie de la temporisation et de l'enlisement, laministre de l'enseignement supérieur a fait en sorte que lesuniversités françaises connaissent ces derniers mois le plus longconflit de leur histoire. Après trois mois de promesses vagues et deconcessions piégées, Mme Pécresse reproche aux universitaires d'avoirmis en péril la délivrance des diplômes universitaires. Elle porte, avec M. Darcos, la responsabilité de la crise et de son aggravation.Dans cette situation déjà difficile, les tendances les plus extrémistesdu mouvement, notamment parmi les étudiants, demandent soit lasuppression des examens soit la validation automatique du semestre. Cessolutions ne sont pas acceptables, puisqu'elles sont illégales etnuisibles à la réputation des universités. La politique du pire doitêtre rejetée. La situation étant variable selon les universités, lesenseignants sauront proposer des modalités diverses de contrôle desconnaissance pour permettre la validation du semestre et la délivrancedes diplômes.

Mme Pécresse a récemment annoncé que la commissionMarois-Filâtre, chargée d'élaborer des propositions pour la réforme durecrutement et de la formation des maîtres, doit rendre son rapportavant le 15 juillet. QSF, qui entend participer à la concertation surces propositions, fait remarquer que cette échéance est troprapprochée. Le report de la mastérisation, annoncé par le ministère enmars, implique, pour être effectif, que les concours et leurpréparation se fassent en 2009-2010 dans les mêmes conditionsqu'auparavant, et qu'on se donne le temps d'une réflexion approfondie,sans être contraint par le cadre de la réforme imposée par le ministèrede l'éducation nationale en octobre 2008. QSF rappelle que ledispositif prévu mettait en péril la formation à la recherche ensuperposant plusieurs logiques : celle de l'initiation à la recherche,celle de la formation disciplinaire des enseignants, et celle de laprofessionnalisation.