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Appels à contributions
Danses minoritaires, danses des minorités (Arras)

Danses minoritaires, danses des minorités (Arras)

Publié le par Perrine Coudurier (Source : aurore heidelberger)

Séminaire doctoral "PRAXIS ET ESTHÉTIQUE DES ARTS"

Organisée par Aurore Heidelberger

« Danses minoritaires, danses des minorités »

13 janvier 2017, Université d'Artois, EA 4028 Textes et Cultures

Appel à contribution

Ce séminaire s'inscrit dans la continuité d'autres manifestations organisées par l'équipe d'accueil Textes et Cultures EA 4028 de l'Université d'Artois, questionnant le matériau chorégraphique, notamment le colloque organisé en 2014 consacré à l’œuvre d’Alain Platel (« Alain Platel »), les séminaires interdisciplinaires « danse et enfance », « Corps mouvants, corps en mouvement : danse et animation » en 2015. Citons également le colloque « Le tango, de Carlos Gardel a Astor Piazzolla : cent années mythiques de créations », qui se tiendra hors les murs les 18 et 19 mai 2017 à la maison des Amériques (Paris).

Les appellations de danse minoritaire et danse des minorités posent question et propulsent notre réflexion dans le champ du politique. En considérant les danses populaires, les danses d’apparat ou autres danses sociales comme relevant des formes d’expression minoritaires, c’est les exclure d’une praxis chorégraphique savante.

Il s’agira de réévaluer la diversité des gestes dansés dépréciés par une culture dominante, occidentale, qui hiérarchise les danses selon leurs origines et leur degré d’institutionnalisation, bien souvent perçu comme gageure d’une qualité esthétique. On replacera ces danses dans leur contexte social et politique d’origine, afin d’en apprécier toute leur complexité, prenant en compte leur valeur esthétique et au-delà leur pouvoir de subversion.

En plaçant le corps au centre de leurs revendications, ces cultures de la marge, celles des exclus, parviennent à imposer leur discours contestataire avec force.

On pensera notamment aux visions d’un corps érotisé véhiculé entre-autre par le cinéma égyptien des années 40 et 50, mettant à l’honneur les danseuses du ventre et leur gestuelle éminemment suggestive (relecture contemporaine proposée par Radhouane El Meddeb, Au temps où les arabes dansaient)  ; mais aussi à la sensualité tapageuse instaurée par le voguing qui se heurte aux fantasmes de l’hétéronormativité(réappropriation et détournement opérés par Trajal Harrell Twenty Looks or Paris is Burning at The Judson Church). Le folklore colombien n’est pas en reste, la Tambora danse de la plèbe dérange par son indécence, parade amoureuse qui met en valeur le corps masculin. Que dire du Strip-tease ? Du burlesque, numéro satyrique qui fait montre d’une certaine distance avec la pratique de la mise à nu jusqu’à celui  pratiqué dans les boîtes de nuit, des plus recommandables au plus controversées, où la pratique de la danse n’est qu’un prétexte à l’effeuillage flirtant avec la prostitution du corps.

La contestation inclut également les démarches qui bousculent l’ordre social, en s’affranchissant par exemple de l’espace circonscrit et protégé du studio, pour s’exposer dans l’espace urbain. La rue, lieu des manifestations, devient alors espace de jeu chorégraphique et confère une visibilité immédiate aux danseurs de Hip-hop. On songera à toutes les formes de danses urbaines, des plus violentes comme le Krump au plus festives comme le Sound System.

Nous n’excluons pas de notre corpus d’analyse, les danses issues des cultures dites folkloriques, du folklore slave, en passant par les danses estampillées comme latines ou tropicales. En quoi, ces dénominations sont-elles artificielles ? Pourquoi relèvent-elles d’un exotisme fabriqué qui les cantonne à un rôle décoratif et les dépossède en quelque sorte de toute potentialité subversive, tant sur le plan politique qu’esthétique ?

Comment ces danses marginales investissent-elles la scène chorégraphique contemporaine ? Quels en sont les enjeux ? Quelles circulations entre ces deux formes d’expression sont repérables. D’une démarche de réappropriation ou de reconnaissance à une récupération.

Une présence discrète des danses minoritaires au sein des œuvres savantes est notable bien avant l’engouement des chorégraphes contemporains pour ces formes d’expression. En effet, les danses folkloriques ou de caractère viennent ponctuer les ballets classiques, signe d’exotisme et de sensualité. Le ballet romantique affectionne tout particulièrement les pas issus du folklore espagnol auquel est associée la notion de sulfure. Il faudra attendre les pièces de Kurt Jooss pour qu’une conscience politique motive ces emprunts, il révèle avec Grosstadt (1932) le rôle de diviseur social que remplissent les danses de bal, en opposant le charleston au bal musette.

Le recours aux danses minoritaires permet aux chorégraphes contemporains d’enrichir leur répertoire. Le frottement, le tissage ou l’entrechoquement conduisent à une régénérescence du matériau chorégraphique. On pensera au travail d’entremêlement stylistique mené notamment par les chorégraphes Hervieu-Montalvo. Les chorégraphes contemporains offrent un éclairage nouveau à des pratiques relevant parfois du populaire, à l’instar de Cécilia Bengoléa et François Chaignaud, qui s’empare du twerk. Un artiste comme Trajal Harrell se plait quant à lui, à confronter des savoirs faire et des approches du geste dansé radicalement différents, dans son projet polymorphe Twenty Looks or Paris is Burning at The Judson Church, propulsant ainsi les danses issues des minorités dans une autre sphère.

La reconnaissance des danses urbaines par le milieu chorégraphique contemporain ou avant-gardiste peut également être à l’initiative de chorégraphes issus de ces pratiques. En effet, des chorégraphes comme Anne N’Guyen ou Mourad Merzouki développent une pratique scénique à mi-chemin entre le hip-hop et une esthétique et une dramaturgie propre à la danse contemporaine.

Cependant, cet intérêt grandissant pour les danses de la marge n’est-il pas à comprendre comme une entreprise de récupération et comme un vulgaire phénomène de mode ? Comment certaines danses par leur institutionnalisation ne perdent-elles pas leur saveur première ? Par exemple, en s’occidentalisant, certaines danses latines se trouvent dépossédées de leur pouvoir de subversion et de leurs qualités premières.

Plusieurs axes peuvent être ainsi envisagés :

  • Les danses minoritaires comme quintessence d’une culture savante et avant-gardiste
  • Exotisme latino entre latinité et négritude
  • Les danses de bal comme indicateur ou diviseur social
  • Présence des danses folkloriques dans le ballet classique
  • La danse comme expression des minorités
  • Récupération du hip-hop par les institutions
  • Institutionnalisation
  • Tissage chorégraphique

Corpus indicatif :

  • Voguing
  • Hip-hop
  • Salsa
  • Tango
  • Rumba
  • Kuduro
  • Sound-system
  • Danses de bal
  • Strip-tease
  • Danses folkloriques
  • Danielle Lebrun
  • Trajal Harrell
  • Cie Vlovajob
  • Karine Saporta
  • Geisha Fontaine
  • Louis Ziegler
  • Radhouane El Meddeb
  • Olivier Dubois
  • Pierre Rigal
  • Anne N’Guyen
  • Mourad Merzouki

Les propositions (1500 signes, espaces compris) comporteront un titre et un résumé ainsi que des mots-clés. Elles préféreront une approche monographique. Elles préciseront la rubrique choisie et seront accompagnées d'une brève bio-bibliographie de l'auteur. Elles devront parvenir en format Word et PDF par courrier électronique  à Aurore Heidelberger (aurore.heidel@gmail.com) avant le 2 décembre. Réponse aux auteurs : le 10 décembre.