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Corps vivant/corps marionnettique : enjeux d'une interaction

Corps vivant/corps marionnettique : enjeux d'une interaction

Publié le par Florian Pennanech (Source : Françoise Heulot-Petit)

Corps vivant/corps marionnettique : enjeux d'uneinteraction

18-19 mars 2010

Université d'Artois, Arras

Cecolloque s'inscrit dans la suite des travaux que l'axe « Praxis et Esthétique des arts » aconsacrés à la marionnette au sein de l'équipe d'accueil « Textes etCultures » de l'Université d'Artois à Arras (notamment une journée d'études « Troupes et Marionnettes » en 2007). Laréflexion s'oriente à présent plus spécifiquement vers la problématique ducorps.

Placés sur scène, acteurs etmarionnettes entrent dans un corps à corps où la place de l'inerte captive etattire l'attention du spectateur. Le lien qui se noue relève du regard et del'écoute et s'appuie aussi sur l'espace qui coexiste entre deux corps. L'unvivant, et l'autre mobile mais d'une mobilité contrainte par la main quimanipule. L'usage de l'objet marionnettique permet d'exploiter des zones defriction entre les corps et invite à interroger différents niveaux deperception mis en éveil par le spectateur d'aujourd'hui, nourri d'images. Dans Le Commerce des regards, Marie-José Mondzain souligne combienl'image naît d'uneconstruction, dans une relation triangulaire, entre celui qui la montre, cequ'elle donne à voir, et celui qui la reçoit. L'écart entre ce qui est donné àvoir et ce qui est vu crée l'espace de la réflexion. Mais la multiplication desimages dans le monde contemporain produit un phénomène d'identificationimmédiate : le sujet regardant est littéralementabsorbé. Au contraire, dans le spectacle vivant, appréhendé comme unemanipulation des signes de la scène, le spectateur se réapproprie l'image parcequ'il la voit se fabriquer en direct, parce qu'il promène librement son regardet plus encore dans les spectacles de marionnettes, puisque le manipulateur defigurines, d'ombres et d'objets est un « montreur » d'images.

Cette tentative de réappropriation de l'image participed'un mouvement de réappropriation du corps qui va à l'encontre de ladématérialisation que la société contemporaine a progressivement élaborée. Leslimites du vivant sont de plus en plus floues. Le rajeunissement du corps estle lieu d'une lutte contre le temps. Le coeur bat de corps en corps, les organescirculent, le corps s'est mécanisé, les interrogations sur la fin de vie et lamanipulation génétique des embryons repoussent certaines définitions del'humain. L'avatar se substitue au mort sur des sites internet et questionneles représentations de la figure humaine. Or la dématérialisation des nossociétés actuelles se conjugue avec une présence prépondérante des corps dansle monde artistique et particulièrement dans les arts de la scène. Cescorps accompagnés d'une représentation de l'humain par divers moyens -poupées, effigies, avatars – sont aussi manifestes dans la création contemporaine.Si l'exploration du corps humain comme forme marionnettique a traversé le XXe siècle,le corps vivant devient l'enjeu de la représentation. De quelles manières cesmoyens rudimentaires ou techniquement complexes interrogent-il le corps aujourd'hui ?Comment le spectateur éprouve-t-il ces corps autres ? Son approche del'image conduit-elle à un changement de perception et de quelle nature ?Comment la marionnette est-elle à même de rendre le spectateur sensible à sonpropre corps et aux limites du vivant aujourd'hui ?

Pour répondre à ces questions,il nous semble nécessaire de revenir à la nature même des moyens artistiquesqui proposent une représentation de la figure humaine. Du simple objet,humanisé par son mouvement, à la poupée servant de jouet d'enfants, dumannequin, statue articulée qui sert de modèle, au pantin, figurine burlesquedont on agite les membres, de l'avatar, représentation d'un Dieu qui se jouedes métamorphoses, devenu une forme virtuelle pour le jeu vidéo, au corps de l'acteurdevenu marionnette par une gestuelle spécifique. Chacun possède son histoire,ses références sociologiques, littéraires et artistiques. Nous les rapprochonsen tant que représentations anthropomorphiques inertes, mues de l'extérieur parun manipulateur visible ou invisible. En interrogeant à chaque fois la naturede cette représentation, les possibilités dramaturgiques qu'elle propose enfonction du type de manipulation et les enjeux particuliers qu'elle permetd'explorer dans son rapport au corps vivant présent sur scène, nous pourronsmieux saisir les caractéristiques de l'art de la manipulation aujourd'hui.

Nous nous intéresserons auxdiverses représentations de la marionnette (objets, formes et matériaux, imagesanimables) comme métaphores du corps morcelé, du corps comme présence et commedédoublements corporels, possibles avatars de la marionnette. Nous questionnerons également le corpsphysique du marionnettiste en interaction avec l'objet et l'image. En effet, leprincipe de manipulation à vue couramment utilisé dans les spectacles demarionnettes engage fortement le processus « de distanciation ». Lesnombreuses applications des technologies aux arts de la scène provoquent uneréverbération sur le corps de l'acteur réel et cette présence physique devientun point critique. La scène devient le lieu de rencontre et d'échange aucroisement du réel et de l'imaginaire entre l'acteur scénique, sa présencephysique, mais également sa présence écranique. A la différence de l'artpictural, qui offre au regard des mondes imaginaires, les univers virtuelsdotés d'interfaces multi - sensorielles engagent l'ensemble du corps dans leursconstructions factices. Alors que l'infographiste gère et construit l'espaceplastique d'un regard extérieur, le comédien aborde l'espace scéniquephysiquement, en l'investissant corporellement, de l'intérieur. Commentl'acteur devient-il conscient de l'image qu'il est en train de produire surscène, de son ombre, des interactions que ces dédoublements génèrent avec lereste ?

La marionnette interroge aussila nature de la perception du corps parce qu'elle redessine l'espace et permetun travail sur l'échelle, un creusement de l'espace-temps. Sa force desymbolisation impose une rythmique du texte qui introduit une perception spécifiquepour le spectateur et propose une projection de la pensée qui mérite d'êtreprécisée. La distanciation toujours présente introduit un rapport particulierau réel. C'est la mise en tension de ces caractéristiques qui met en valeur lecorps du manipulateur. Ainsi, c'est la nature même de cette interaction, de cetespace de flottement qui s'insinue entre deux corps que nous pourrons mieuxsaisir afin de comprendre de quelle manière elle joue avec la perception duspectateur.

Nous proposons d'aborder notammentles représentations artistiques du corps humain, la manière dont la marionnettepermet d'aborder certains sujets relatifs au corps (mort, sexualité), lanature d'un matériau qui produit sa propre présence (théâtre de matière,théâtre d'objets), l'analyse du processus de perception, le rapport au virtuel,en nous appuyant sur l'analyse du processus de création de spectaclescontemporains, mettant en jeu la relation vivant/inerte.

Comitéd'organisation

Françoise Heulot-Petit

StankaPavlova

Comitéscientifique et d'orientation

Sylvie Baillon

ChristianCarrignon

BrunellaEruli

AmosFergombé

ClaireHeggen

FrançoiseHeulot-Petit

Jean-PierreLescot

StankaPavlova

DidierPlassard

Calendrier :

Avisdu comité scientifique et d'orientation : 30 novembre 2009

Lespropositions de communications sont à adresser par courrier électroniqueà : francoise.heulot@voila.fr