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Corps et Religion

Corps et Religion

Publié le par Florian Pennanech (Source : Arbi Dhifaoui)

Université de Kairouan

Faculté des Lettres & Sciences Humaines de Kairouan

École Doctorale

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Colloque International : « Le Corps et la religion »

Kairouan 15-16-17 avril 2010

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Comité Scientifique :

P. Hammadi Messaoudi et P. Arbi Dhifaoui

L'école doctorale de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Kairouan (Université de Kairouan – Tunisie) organise, les 15-16 et 17 avril 2010, un Colloque International portant sur « Le Corps et la Religion ».

Les lexèmes « corps » et « religion » apparaissent ensemble dans de nombreuses expressions : le corps dans la religion, la religion dans et par le corps, la religion du corps, le corps religieux, le corps de Dieu, le corps du prophète, le corps du saint (corps purifié, sanctifié, etc.), la « awra » ou les « zones de pudeur » du corps féminin, le marquage religieux des corps,  la vie sacrale (la prière, le pèlerinage, le jeun, …), l'enterrement et les rites mortuaires, etc.

Ces syntagmes et de nombreuses autres combinaisons de termes appartenant l'un au paradigme du profane et l'autre à celui du sacré révèlent le rapport très étroit du corps au sacré dans les domaines de la religion (littérature théologique, interprétations, institutions, sectes, architecture des lieux saints, etc.), des habitudes, de la vie sociale et de la culture dans toutes ses manifestations (littérature, peinture, sculpture, cinéma, théâtre, musique, chant, danse, etc.).

Comment le corps est-il vu à travers le Judaïsme, le Christianisme, l'Islam, le bouddhisme, l'Hindouisme ? Est-ce que les différentes sectes d'une même religion jugent de la même manière ce « temple de l'Esprit » ? Comment nos idées sur le corps et nos convictions religieuses se manifestent-elles dans notre vie quotidienne, dans nos pratiques culturelles et dans les productions littéraires et artistiques ?

Il va sans dire que toutes les religions s'intéressent au corps et que ce dernier jouit d'une place fort importante dans la littérature théologique : les textes sacrés et leurs interprétations, les rites religieux, les différentes tendances et écoles théologiques dissertent sur le corps, le blâment ou le glorifient, l'accusent d'être le siège des vices ou le purifient, etc. Tous les organes du corps sont capables de commettre des péchés : vol, viol, mensonge, médisance, ivresse, blasphème et nombreux autres « crimes » que la religion interdit par des textes allant de la transparence totale à l'opacité extrême. Ces organes peuvent aussi être bienfaiteurs : prière, don, aide, charité, résistance à la tentation, rejet du mal, etc.

Le corps, cette masse qui abrite l'âme, est responsable du devenir de celle-ci : il peut la corrompre et l'altérer, entraver l'accueil de la joie divine et empêcher la Lumière, ce qui lui vaut souffrance et châtiment ; siège de la faiblesse et acteur des péchés, obstacle à l'élévation de l'âme et incarnation du diable, il subira des souffrances et de multiples châtiments dans l'Enfer.

Le corps peut également maîtriser ses caprices, sauvegarder l'âme des maux et la protéger des « dangers », ce dont il sera récompensé le Jour du Grand Jugement.

Dans la littérature de nombreuses religions, le corps est franchement dénigré et sous-estimé : Bouddha le compare à une « pourriture » et A. Balland, archevêque de Lyon, voudrait que l'homme ne soit qu'un « pur esprit ». Il y a ainsi une tendance à déconsidérer le corps. Gilbert Tordjman pense que « le christianisme, qui ne tolère la sexualité que comme un pis aller nécessaire à la reproduction, circonscrit le corps méprisé dans un halo de honte et de culpabilité » (Réalités et problèmes de la vie sexuelle, Ed. Hachette, 1981). Cependant, d'autres penseurs et interprètes voient que la religion valorise le corps et exige qu'on le respecte. C'est le cas, par exemple, du Cardinal Lustiger qui affirme dans une interview : « Le christianisme a toujours défendu la dignité du corps. Or curieusement on lui fait le reproche de mépriser le corps. C'est le confondre avec le puritanisme anglo-saxon! Un tel mensonge ne peut pas durer éternellement. » C'est le cas aussi de la Théologienne Sr Marie-Christine Bernard qui écrit en mai 2008 : « … notre corps – souffrant et mortel- est le lieu même du salut, créé in fine pour devenir corps de louange à la gloire de Dieu ! »

Ce type de déclarations s'explique par le fait que le christianisme est fondé sur l'Incarnation dans la chair du Verbe de Dieu : en effet, les chrétiens pensent que l'Esprit de Dieu prend corps en nous. Cette croyance est à l'origine de l'idée que les hommes et les femmes sont « fils et filles de Dieu ». S'il en était ainsi, le mépris du corps ne serait-il pas en contradiction avec la foi et le principal fondement de cette religion ?

Le christianisme et l'Islam ne sont–ils pas deux religions du corps ? Le philosophe Celse n'a-t-il pas désigné les chrétiens par l'expression « philosomaton genos » c'est-à-dire « le peuple qui aime le corps » ? Le Coran et la Sunna (tradition du prophète Mahomet) n'insistent-ils pas sur la propreté et les soins du corps ?

Le corps n'est-il pas notre identité ?

Comment Dieu pourrait-il manifester son existence, son action, son pouvoir, sinon sous la forme visible d'un corps ? Dieu a-t-il un corps ? Comment les religions monothéistes et autres abordent-elles cette question ? L'abordent-elles réellement ou, au contraire, évitent-elles de la poser ?

Qu'ils soient athées ou croyants, pratiquants ou non, les romanciers, les poètes et les dramaturges accordent une grande importance au corps de leurs oeuvres ; les créations littéraires et artistiques ne se contentent pas de parler du corps, elles se présentent comme des corps qui offrent au récepteur un plaisir et une jouissance indéniables. N'emploie-t-on pas très souvent l'expression de Barthes, devenue classique depuis des décennies, « le plaisir du texte » ? N'évoque-t-on pas le terme d'Adorno « la sextualité » à propos de l'assimilation du textuel à l'érotisme ? N'assiste-t-on pas, depuis les années soixante du XXè siècle, à une « religion du texte littéraire », « religion » qui conçoit l'oeuvre comme un « corps » ?

La théologie et les différentes disciplines qui lui sont rattachées, l'histoire des religions, la mythologie, la sociologie, la psychologie, l'anthropologie, la linguistique, la littérature, la sémiologie … tous ces domaines contribueront à éclairer les diverses facettes du prisme que notre colloque soumettra aux lumières des chercheurs intéressés par la dialectique corps/ religion.

Les chercheurs intéressés par le thème de ce colloque sont priés d'adresser, avant le 15 janvier 2010, à : dhifaouiarbi@yahoo.fr

- le titre de leur proposition de communication

- une brève présentation du sujet de la communication (15 à 20 lignes)

- un bref CV

Les textes, dans leur version définitive, devront parvenir avant le 10 mars 2010.

NB. L'école doctorale de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Kairouan se chargera du logement et des repas des participants durant les trois jours du colloque.