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colloque Mythe et Education

colloque Mythe et Education

Publié le par Baptiste Roux (Source : G Bertin)



Les pratiques d'éducation et de formation,
Le mythe pour comprendre ?

Mythe et Education.

Séminaire transdisciplinaire des 11 au 13 Juillet 2005.
IFORIS. Angers

Direction scientifique : professeur Frédérique Lerbet Sereni.
Animation : Georges Bertin et Dominique Violet.

Partenaires pressentis :
Campus social angevin : IFORIS.
Revue Esprit Critique,
Laboratoire « processus accompagnement, formation » (UPPA).
CNAM des Pays de la Loire.
Université d'Angers.
CDDP 49.
Problèmatique.


Une pensée tenace habite l'occident, de façon encore plus affirmée depuis les Lumières : la raison, établie sur un ordre linéaire et non contradictoire, est l'accès le plus puissant, et le plus digne de foi, à notre compréhension du monde et de l'homme, des hommes, dans le monde. L'Universel seul est science, et l'Universel est dans l'Idée, étayée et exprimée par ce qui relève du Logos. Ainsi, quand une réflexion sur l'humanité de l'homme tente de se mettre en forme, elle en réfère à la philosophie, dont elle admettra sans autre questionnement qu'elle s'origine dans Platon, dans un Logos dont l'ordre unique est la raison, qui va ordonner les choses pour accéder à l'Idée. Un ordre est alors une succession d'uniques, clairement séparés les uns des autres. Le discours, qu'il soit scientifique ou philosophique, sera recevable s'il nous permet d'accéder à une compréhension claire et sans ambiguïté de ce qui nous préoccupe. Alors nous pourrons en déduire des préceptes d'action assurément valides, que ces actions soient à visée matérielle ou spirituelle.

Quand, de la philosophie, on s'est employé à constituer des disciplines que l'on a référées à la grande famille des Sciences Humaines, ces présupposés épistémologiques n'en ont été que renforcés : la psychologie, la sociologie, la psychologie sociale, n'accéderaient au statut de sciences qu'à se conformer aux visées de leur double origine (un logos scientifique, c'est-à-dire vérifiable, prédictif et applicable) ou à ce qu'elles croient être l'origine.

Je dis « ce qu'elles croient être l'origine », parce qu'il n'y a justement jamais rien de moins assuré que l'origine. Avant Platon, par exemple, c'est-à-dire avant Socrate, il y a eu Héraclite. Et dans le sillage d'Héraclite, si l'on peut dire, au travers des siècles, s'est développée une pensée ni plus ni moins scientifique que celle qui se décline par Descartes et Comte interposés. Elle a pour repères Erasme, Vico, Bachelard. Elle pense, disons, autrement.

Elle ne vise pas seulement à une explication claire et parfaitement ordonnée du monde, mais tente de prendre en compte ce qui relie, parfois de façon contradictoire, ce qui a pu être discriminé nettement et radicalement. On peut donc aussi concevoir un ordre scientifique si j'ose dire d'un autre ordre : un ordre du lien et du foisonnement, un ordre du désordre, un ordre qui a retourné le désordre et a tenté de l'intégrer, qui l'a donc pris en compte.

Soit donc legein . Legein, c'est rassembler, recueillir. Avec la langue classique, c'est devenu « parler, dire quelque chose, soit le discours, le verbe, la parole. Est logique, alors, ce qui s'ordonne à l'ordre du discours dans une succession qui suppose la séparation.
Mais essayons de voir legein non plus avec Platon mais avec Héraclite : L'écoute, et plus seulement le dire, est recueillement, et ce recueillement implique une absence de direction, sous peine de n'être à l'écoute que de ce qui est déjà connu, de la pensée, du mental, de la mémoire, de l'habitude, de l'ego. Voilà donc logos qui devient passeur de deux traditions que l'on a toujours opposées : la tradition occidentale de la raison et celle, orientale, de la méditation, du recueillement et du détachement.
Logos désigne, par ce recueillement, l'Unique, comme parole rassemblante. Sa vérité se fonde sur ce critère d'unicité : le discours d'Héraclite est vrai parce qu'il dévoile l'Unique dans ce qu'il a d'intemporel, un discours vrai de ce qu'il ouvre l'horizon et abat les concepts, tous les concepts. C'est sa radicalité à balayer les concepts qui le fait vrai, exactement comme celui de Platon, à l'inverse, est radical à exhiber et travailler les concepts. L'identité entre toutes choses (l'Unique) est l'essence même de la connaissance, de la sagesse. Toutes choses (pantarei) est l'Unique (hen). Réaliser l'Unique, c'est ne pas être séparé. A chacun donc de réaliser son unique, rassemblement d'absence de direction accueillie.
Soit maintenant mythos : muet, silencieux. Où l'on trouve la même origine que mystère, ce qui ne peut pas se dire. Ce qui ne peut pas se dire directement, par un discours ordonné et clair, mais qui va se donner à entendre par d'autres voies et d'autres formes. Des symboles, des images, des histoires, qui vont représenter ce qui ne peut pas être dit « logiquement » (conceptuellement), et qui vont néanmoins parvenir à s'adresser à nous. Muet parce que non assignable à un sens unique, muet parce que ne disant pas exactement ce dont il parle, muet parce que pluriellement loquace, muet parce que parlant du sacré, qui ne peut qu'être secret ; à nous, chacun de nous rassembler par lui. La polysémie du symbole et du mythe dit « toutes choses » (une chose et son contraire aussi bien), à travers un unique récit qui prend valeur exemplaire . A travers lui, nous pouvons alors nous relier à nous-même comme unique, en l'occurrence producteur d'un sens unique car singulier, que la polysémie même assurera d'aucune place définitive.
C'est ainsi que le mythos pourrait bien nous donner à penser, quand le logos nous inviterait à rêver. Bien sûr, l'inverse est tout aussi juste .
C'est dans ce noeud qu'il conviendra de partager le projet de ce colloque et de situer nos échanges. Non pas réconcilier le mythe et la raison et montrer qu'ils marchent d'un même pas, une sorte de politiquement correct dans ces temps d'idéologies épistémologiques qui s'affrontent, mais essayer de les enchevêtrer, dans des hiérarchies qui, s'inversant perpétuellement , renouvelleraient et le mythe (ou plutôt ce que l'on en entend et le regard que l'on porte sur lui et qu'il génère en nous) et le discours dit savant.
En l'occurrence, le discours savant dont il s'agit est celui de l'éducation . On dira que ce n'est pas tout à fait par hasard, si, parmi ces sciences dites humaines, ce sont celles qui ont pour objet l'éducation qui tentent l'expérience, dans une voie ouverte par l'anthropologie et une certaine psychanalyse. Car, s'il fallait les définir, dans leur acception actuelle de sciences de l'éducation, elles se définiraient par leur absence/multiplicité de disciplines de référence. L'éducation est affaire (alphabétiquement, et pour essayer de repérer des disciplines) biologique, cognitive, communicationnelle, culturelle, économique, géographique, historique, philosophique, physiologique, politique, psychanalytique, psychologique, sociale...Parions que cette multidisciplinarité les prédispose à une variété de systèmes référentiels qui les rend sensibles aux enjeux d'unicité et de pluralité que mythos et logos traduisent. Elles tentent, autant qu'elles le peuvent, et avec difficulté, de tisser des liens entre ces différentes disciplines , pour des théorisations qui ne soient pas trop mutilantes et réductrices de l'homme et des hommes s'apprenant. De là à ce qu'elles soient dans une perspective totalitaire, celle qui prétendrait avoir tout relié, tissé et compris, il pourrait bien n'y avoir qu'un pas.
Ce pas ne sera pas franchi tant qu'elles n'oublieront pas le tout petit mais tellement énorme « se » qui précède « apprenant », qui leur interdit à jamais de pouvoir prétendre avoir fait le tour de la question. Elles proposent donc des interprétations des phénomènes, faits, situations d'éducation qu'elles travaillent avec méthode(s), dont aucun sens final et définitif ne saura jamais être posé , tant que ce petit « se » les travaillera. Ce qui les situe aussi, selon le type de discours scientifique qu'elles produisent, dans des référentiels épistémologiques différents , dont l'adhésion ou non au principe logique du tiers exclu pourrait être aujourd'hui la ligne de démarcation visible.
Si l'on veut bien voir le mythe comme un logos qui à la fois viole et ne viole pas ce principe (sa violence actualise de la séparation et, donc, de l'identité, sans pour autant actualiser la non-contradiction, à travers l'ambivalence toujours tenue des personnages et des symboles ), on peut alors envisager que le passage par le mythe pour penser l'éducation lui permettra peut-être de commencer à construire un nouveau référentiel épistémologique, plus propre à son identité singulière multiréférentielle. Comme mythos est dans logos et logos dans mythos, il y sera question d'investir les contradictions comme autant de potentialités de sens (ici éducatifs), étayage potentiel des logiques paradoxales, toujours susceptibles d'engendrer leur contraire. Elles laissent ainsi délibérément indécidable et incontrôlable, tant par le chercheur que par l'éducateur, le petit « se » qui est en jeu, celui de l'autre et le sien propre.
Contrairement aux fables, le mythe est une histoire vraie, en ce sens qu' « il décrit (...) l'irruption du sacré qui fonde réellement le Monde et qui le fait tel qu'il est aujourd'hui. Plus encore : c'est à la suite des interventions des Etres Surnaturels que l'homme est ce qu'il est aujourd'hui, un être mortel, sexué et culturel ». « Parce que les mythes grecs encodent les conflits biologiques et sociaux primitifs de l'histoire de l'humanité, ils survivent dans la mémoire et la reconnaissance collectives comme un vivant héritage. Nous revenons à eux comme à nos racines psychiques. » Le caractère contradictoire de l'être même, dans son universalité, se trouve mis en acte, mis en jeu, mis en scène dans la tragédie, particulièrement dans chaque « figure » tragique. Ce particulier de l'universel, et, réciproquement, l'universel « ontologique » de chaque personnage tragique, nous atteint nous, lecteur du XXI ème siècle, parce que le mythe a cette particularité de transcender l'histoire particulière, généalogiquement particulière de chaque pièce, pour atteindre chacun. A la fois il nous atteint hors contexte et nous permet de re-penser nos sensibilités et nos connaissances dans leur contexte actuel.

C'est le nouage de l'imaginaire et du symbolique incarné dans des êtres non-réels, qui, peut-être, contribue à nous construire dans notre réalité vibrante. Défini par Lévi-Strauss comme la succession de ses récits , nous revenons à lui pour, à notre tour et dans notre propre actualité scientifique et morale de l'éducation, l'ouvrir à notre sens à partager, contester, développer, afin qu'il nous ouvre à notre sens méditant comme laborieux, au service d'une pensée de l'éducation entendue comme humanisation.

C'est donc ce nouage que nous tenterons d'explorer dans les situations éducatives rencontrées sur les terrains de la formation et de l'éducation, et c'est à cette herméneutique que seront ainsi conviés les participants appelés eux mêmes à être ainsi pourvoyeurs de sens. Le tryptique pratique/théorie/mythe sera ainsi exploré dans les différentes dimensions de la recherche et de la pratique : épistémologie, visées, concepts, méthodes




F L-S





Organisation :

Avertissement : s'agissant d'un séminaire le nombre d'inscriptions est limité et les participants devront s'engager à assister à l'ensemble de la rencontre, afin de permettre une élaboration commune.

Le temps consacré aux communications sera inférieur à celui qui sera consacré aux échanges. Il est prévu de publier des actes.

Lundi 11 juillet :

9h. accueil à l'IFORIS.

9h30 : conférence pleinière.

11h : pause.

11h15-12h30 : débat.

14h-18h : communications des participants , débats.

Mardi 12 Juillet :

9H-10h : conférence pleinière .

11h-12h30 : communications, débats.

14h-18h : communications, débats.

Mercredi 13 Juillet :

9h-10h30 : communications et débats.

11h-12H30 : conclusions.


IFORIS,
Campus social angevin, Belle Beille.
4 rue Georges Morel.
49045 Angers cedex 01.

Tél 02 41 22 17 31.

Sites à consulter :

http://www.iforis.fr

http://membres.lycos.fr/imaginouest