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Les Médias en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Formes discursives, publics et enjeux démocratiques

Les Médias en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Formes discursives, publics et enjeux démocratiques

Publié le par Alexandre Gefen (Source : André Horak)

Argumentaire

L’Institut de Français (section de linguistique) de l’Université de Berne organise, en partenariat avec le laboratoire ELLIADD (Édition, Langages, Littératures, Informatique, Arts, Didactique, Discours, Université de Franche-Comté, Besançon) et le CREM (Centre de Recherche sur les Médiations, Université de Lorraine, Metz), un colloque sur le thème Les Médias en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Formes discursives, publics et enjeux démocratiques (13-15 juin 2013). S’inscrivant dans le cadre du réseau « Discours d’Afrique », ce colloque fait suite à ceux qui ont été organisés à Besançon (2007), à Bordeaux (2008) et à Brest (2010).

Depuis les années 90, suite au mouvement de démocratisation et à la fin du monopole d’une information étatique dans beaucoup de pays, les médias ont connu une importante évolution en Afrique. À côté des journaux gouvernementaux, une nouvelle presse écrite privée a vu le jour. Ainsi en 2004, selon l’institut Panos, on dénombre près de 200 journaux en République Démocratique du Congo. Tout en restant le média africain privilégié, la radio s’est considérablement diversifiée avec la mise en place de réseaux commerciaux, associatifs et confessionnels. Des stations comme Oxyjeunes au Sénégal, Radio Familia FM, La Voix de l’Afrique en Guinée ou Medina FM au Maroc témoignent d’une telle libéralisation de la parole radiodiffusée. Bien qu’encore majoritairement étatique et fortement influencée par les programmes occidentaux, la télévision a vu l’éclosion de chaînes thématiques, régionales et à péage, comme l’attestent les exemples de la Tunisie, de la Côte d’Ivoire, de Madagascar ou de bon nombre d’autres pays africains. Quant à l’internet, si son taux de pénétration est encore très disparate (40 % au Maghreb contre 7 % en Afrique subsaharienne en 2010), il bénéficie d’une progression rapide, notamment à travers le succès des cybercafés, l’essor de réseaux sociaux comme Facebook et la création de cyberjournaux, comme leFaso.net (Burkina), Madanews (Madagascar) ou Nettali (Sénégal). Cette expansion et cette reconfiguration des médias en Afrique sont cependant entravées par plusieurs obstacles, parmi lesquels figure le manque de ressources financières et matérielles, sans parler des limitations à l’information imposées par divers pouvoirs africains (suspensions administratives, procès, contraintes juridiques restrictives, censure…).

Le but du colloque est d’analyser et de confronter les productions discursives en français, liées à cette mutation du paysage médiatique en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Portant sur les médias que sont la presse écrite, la radio, la télévision, la publicité et l’internet, ainsi que sur leur appropriation par des publics, ce colloque s’adresse aux spécialistes en sciences du langage, en analyse du discours, en sciences de l’information et de la communication. Il est également ouvert aux sociologues et aux politologues intéressés par les rapports entre le discours médiatique et la gestion de l’espace public.

Les contributions pourront aborder les questions suivantes, dont la liste n’est pas exhaustive :

– Dans quelle mesure les nouveaux discours médiatiques africains développent-ils une communication de proximité qui tranche avec la teneur formelle et académique des médias traditionnels ? Ce changement de paradigme peut être examiné à travers les processus d’oralisation, d’interactivité ou d’implication énonciative mis en scène dans des productions médiatiques typiques (émissions radiophoniques, débats télévisés, blogs, forums, etc.).

– Comment les discours médiatiques qui prévalent actuellement en Afrique subsaharienne et au Maghreb gèrent-ils les interférences du français avec les langues nationales ? Ces discours médiatiques se traduisent-ils ou non par une appropriation africaine du français ? Les contributions pourront mettre l’accent sur les formes hybrides (phonétiques, lexicales, syntaxiques…) présentées par de tels discours, en particulier dans la presse écrite, la radio ou la publicité. Elles pourront encore évaluer l’interculturalité, mais aussi la construction de nouvelles identités africaines révélées par ces hybridations langagières. On s’interrogera par ailleurs sur la fonctionnalité différenciée du français et des langues nationales selon les médias concernés et les contextes de communication.

– L’effervescence médiatique actuelle sur le continent africain favorise-t-elle le développement de certains genres de discours ? Outre les formations génériques spécifiques à l’internet, on pourra s’intéresser, entre autres, à l’émergence d’une presse populaire (comme Ivoir’Soir) ou satirique (voir Le Cafard libéré, Gbich, Le Lynx…), de même qu’à la diversification des affiches et des enseignes publicitaires. Des études de cas sur les caractéristiques de ces genres et sur leur adaptation au paysage africain seront également les bienvenues.

– Comment les discours médiatiques africains réagissent-ils aux contraintes auxquelles ils doivent faire face ? Celles-ci sont au moins de deux ordres. Sur le plan externe, de tels discours doivent cohabiter avec ceux des médias internationaux, omniprésents en Afrique (RFI, TV 5 Monde, Google…). Dans quelle mesure la parole africaine fait-elle entendre sa différence dans le flux médiatique de la mondialisation ? Sur le plan interne, les médias africains sont fréquemment soumis à des pressions de la part des pouvoirs en place. Comment ces pressions sont-elles intégrées dans les stratégies discursives des journalistes et des producteurs médiatiques (recours à l’autocensure, à l’implicite, à l’allusion, à l’indirection rhétorique…) ?

– Est-ce que la redistribution des compétences médiatiques a un impact sur les discours produits ? En effet, tant en raison des modifications de l’exercice de la profession de journaliste, liées à un processus de démocratisation, qu’à celles dues à l’amplification du recours à l’information et à la communication numériques, les frontières entre pratiques professionnelles et pratiques « profanes » ont tendance à s’estomper. Un tel phénomène peut se traduire par des mises en cause croisées de la légitimité des acteurs, par un renouveau des modalités de fixation de l’agenda médiatique, par une redéfinition de règles de conduite ou de canons discursifs, par l’émergence de nouvelles spécialités (webjournalisme), peut-être encore par une transformation des programmes de certaines écoles de journalisme. Autant d’entrées à dominante socio-politique susceptibles de mieux faire comprendre la dynamique des changements médiatiques en cours.

– Mais qu’en est-il aussi du positionnement des publics, de leurs savoirs et compétences médiatiques ? Comment s’ajustent-ils aux évolutions contemporaines ? Se reconnaissent-ils dans ces évolutions et comment se les réapproprient-ils ? Pour répondre à ces questions, il pourra être fait appel aussi bien aux mesures d’audience et au développement de leur implantation en Afrique qu’à des études de type qualitatif. En effet, si les mesures d’audience permettent de saisir des constantes ou des écarts et de les inscrire dans le temps, les études de terrain ont pour avantage de comprendre autant la complexité du rapport entre les médias et les dimensions individuelles/collectives de leur usage que les phénomènes de circulation de l’information à l’intérieur d’un même territoire ou entre territoires, par exemple à l’aune des perspectives interculturelles et/ou transfrontalières.

– Plus largement, la libération de l’information en Afrique contribue-t-elle ou non à la démocratisation du continent ? Un tel débat est de nature à alimenter des études concrètes sur la couverture médiatique d’élections, sur les prises de position d’éditoriaux journalistiques ou sur le rôle de mobilisation de l’internet. De plus, l’examen du métadiscours des textes juridiques (législations sur les médias) et administratifs (comme ceux des organes de régulations ou des observatoires sur la liberté de la presse), ainsi que l’évaluation des témoignages des acteurs médiatiques eux-mêmes pourront apporter des éclairages pertinents.

Les propositions de communication (titre et résumé d’environ 2500 signes, espaces compris) sont à envoyer par courriel avant le 15 octobre 2012 à l’adresse suivante : marc.bonhomme@rom.unibe.ch

Responsable : Prof. Marc BONHOMME

Adresse : Marc Bonhomme, Institut de Français, Université de Berne, Länggass-Strasse 49, CH 3000 Berne 9 (Suisse).

Tél. : +41 316318010

Fax. : +41 316313818

Mail : marc.bonhomme@rom.unibe.ch