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Apprendre des ateliers. Construire le continu des expériences de recherche, d’enseignement et de création

Apprendre des ateliers. Construire le continu des expériences de recherche, d’enseignement et de création

Publié le par Université de Lausanne (Source : Serge Martin)

APPRENDRE 

DES ATELIERS

Construire le continu des expériences 

de recherche, d’enseignement et de création

Une expérience en Sorbonne nouvelle les 29 et 30 avril 2016

Collectif ateliers (DILTEC et THALIM, Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle) : Carla Campos Cascales (doct.), Charlotte Guennoc (doct.), Serge Martin (pr.), Melissa Melodias (doct.), Olivier Mouginot (doct.)

De plus en plus présent comme dispositif dans les espaces scolaires aussi bien qu’extrascolaires, l’« atelier » et ses corollaires (workshop, studio, laboratoire, séminaire, etc.) semblent proposer une alternative aux modes figés par lesquels se prodiguent des enseignements sous la forme d’un public assis face à un expert de la maîtrise. L’éducation nationale introduit dans ses programmes des ateliers pour les élèves en situation de « décrochage scolaire » qui par leur grande « souplesse » devraient les réintroduire dans ses situations d’enseignements plus classiques (classes, cours)[1] ; depuis longtemps déjà, les ateliers d’écriture se proposent comme des lieux où place est faite naturellement à une créativité qui ferait de tous des écrivants si ce n’est des écrivains ; de nombreux chercheurs s’organisent en « ateliers » au sein des laboratoires pour que la recherche associe tous ses acteurs jusqu’au « terrain » ; les artistes plasticiens ou musiciens ouvrent leurs ateliers en offrant à l’amateur autre chose que la seule vue du produit fini dans la galerie, le musée ou la salle de spectacle, lesquels accueillent souvent l’atelier lui-même sous forme d’installation ; etc. Se proposant toujours comme des ouvertures à des situations présentées « stables », ces espaces d’emblée accueillants portent en eux la marque de la participation, et donc de la sociabilité, et promeuvent des associations inédites entre l’enseignement, la recherche et la création.

Si l’utilisation massive de ce mot est relativement récente, son existence ne l’est pas. Depuis des siècles l’atelier désigne cet endroit où « la matière se transforme en objet finalisé, lieu privilégié où la nature passe dans la culture ; son périmètre constitue un seuil : il marque les bornes du groupe par rapport à tout ce qui lui est extérieur ; hors de l’atelier et avant lui, il n’y a que nature brute, inerte, amorphe et inintelligible ; à la sortie de l’atelier, le bois, la pierre, le métal, la terre sont devenus œuvres de culture, valeurs d’usage, objets esthétiques. [2] » L’atelier est donc avant tout un moyen de transformation si ce n’est d’invention. Mais en tant que lieu défini dans un contexte précis il engage des subjectivations qui sont prises dans une historicité. La question qui se pose à nous aujourd’hui est celle des possibilités de reconfiguration et de dépassement du cadre dans lequel il existe : « L’atelier visible et matériel a beaucoup changé. Lieu de travail, il l’est toujours, mais son espace est celui de la pensée elle-même. L’histoire de l’atelier réel correspond à la longue genèse d’un atelier imaginaire, et met en lumière ce qu’il a toujours été, périmètre mental et matériel indéfini du travail dans son ‘faire’ le plus essentiel : le jeu cosmogonique.[3] » Est-ce que l’accent mis davantage sur le cheminement que sur le résultat des activités offre à l’atelier l’engagement de processus de subjectivation ouvrant à des inventions individuelles et collectives tant dans l’ordre des apprentissages que dans celui des autres constructions sociales et personnelles ? Il semble que poser le caractère « privilégié » ou « nouveau » de l’atelier par rapport à des formes plus classiques d’échange ou d’apprentissage oblige d’abord à observer ce que l’on appelle « ateliers » et ce qui s’y fait à chaque fois spécifiquement. Pierre Michel Menger se demandait s’il fallait « élargir la définition de l’atelier à la somme des lieux de travail, éphémères, récurrents, alternatifs, qui sont mobilisés par une variété grandissante d’intervenants dans le processus créateur ? [4] » Si l’on tient toujours compte des parcours expérientiels, alors penser la classe, le cours, le séminaire, la réunion de travail ou tout autre lieu d’apprentissage mais aussi de recherche et ou de création comme atelier pourrait nous permettre de penser, au plus près des expériences pratiques et théoriques, de tels dispositifs comme lieux et moments d’écoute d’expériences associées, du point de vue des subjectivations qu’ils engagent.

Nous nous proposons de réunir au cours de deux journées au cœur de l’Université Sorbonne nouvelle Paris 3, des personnes engagées dans des expériences d’enseignement, de recherche et de création – en augmentant les porosités entre ces trois domaines et en évitant tout ce qui les rend étanches –, pour apprendre (voire désapprendre) des ateliers et donc pour penser la pratique en pratiquant la pensée, pour penser les ateliers en faisant atelier, à la croisée d’une pluralité d’expériences partageables sans les rendre pour autant homogènes. Tous les participants devront donc faire et penser ateliers pour que la théorie et la pratique des ateliers ne s’arrêtent à aucun découpage disciplinaire, méthodologique voire même épistémologique car l’enjeu de cette expérience de deux jours est d’associer pour spécifier, d’essayer pour intensifier, de partager pour transformer…

Pour nous, les enjeux sont très précisément de ne pas se contenter d’ajouter des « ateliers » aux dispositifs institutionnels mais de situer les « ateliers » au cœur de ces dispositifs ; de penser les productions comme des processus, tant du côté de l’enseignement que de l’apprentissage, de la recherche que de la création artistique, c’est-à-dire d’intégrer, au cœur des dispositifs, des leviers critiques et réflexifs qui défont les stases évaluatives et les définitions telles que celles de niveaux, de publics, de disciplines (y compris sous l’angle des trans-, inter- voire in-discipline)… Il s’agirait en fin de compte de toujours rappeler la force des expériences dont on peut augmenter l’écoute, la criticité, la créativité, l’associativité, dans un même mouvement, celui d’un rythme et d’une relation de voix et de sujets.

Les deux journées se dérouleront selon trois types de lieux-moments : des groupes de création-réflexion ; des forums de controverse-conversation ; des rassemblements de partage-manifestation. Ni colloque, ni spectacle, cette expérience d’ateliers voudrait cependant offrir et demander à ses participants de continuer ce qui les pousse à enseigner, chercher, créer dans un même mouvement d’apprendre et de vivre. Chacun viendra donc à sa manière apprendre des ateliers pour les vivre avec tous.

On pourra suivre l’actualité de la préparation et le suivi de cette expérience sur le carnet de recherche REDILA (Réseau de recherche pour une didactique des langues avec les littératures et les arts) à l’onglet suivant : http://redila.hypotheses.org/category/atelier

Toute personne (ou tout groupe de personnes) intéressée peut s’inscrire avant le 1erfévrier 2016 en renvoyant une proposition de moins d'une page (avec au moins les indications ci-dessous) à carlacamposcascales@gmail.com ou à serge.martin@univ-paris3.fr

Nom et Prénom ; coordonnées précises (institutionnelles, associatives, personnelles…) ; proposition d’atelier (indiquer les modalités concrètes et le matériel nécessaire) ; références bibliographiques et autres…

[1] http://eduscol.education.fr/pid23264/dispositifs-relais.html – consulté le 19 octobre 2015.

[2] Marie José Mondzain-Baudinet, « Atelier », Encylopaedia Universalis, nº 3, Paris, 2008, p. 317.

[3] Ibid., p. 321-322

[4] Pierre-Michel Menger dans « Enquête sur l’atelier : histoire fonctions, transformations », in L’atelier, revue Perspective, la revue de l’INHA, n°1/2014, p. 35.