biographique
Romanesques n° 3 – Antiromanesques
Il y a évidemment une forme de paradoxe dans le fait d'intituler « Antiromanesques » un numéro de la revue Romanesques. Pourtant, derrière la dimension provocatrice et humoristique d'une telle démarche, apparaît l'hypothèse que le roman pourrait bien apparaître dans toute son histoire comme le résultat de contradictions, de tendances divergentes, de forces qui visent à affirmer le romanesque autant qu'à le contester.
Dans un souci de travail étymologique, une piste consiste à s'appuyer sur les trois définitions que donne le Petit Robert de l'élément grec « anti- » et à faire varier le sens d' « antiroman » en fonction des acceptions qu'il peut alors prendre.
Qui est situé en face de, à l'opposé de : l'antiroman comme autre voie de la fiction, éventuellement comme miroir du roman. Qui s'oppose à, qui lutte contre les effets de : l'antiroman dans sa dimension d'opposition au roman (pour des raisons autant esthétiques que morales). Qui est l'opposé, le contraire de : l'antiroman comme autre radical, représentation de l'altérité du roman (dans son mode de recherche de la vérité, ses moyens stylistiques, entre autres).
A partir de là, la réflexion sur l'antiromanesque peut s'engager dans trois voies (la liste n'est pas limitative, ces voies se ramifient en une multitude de chemins, détournés ou de traverse) qui relèvent d'intentions ou de domaines un peu différents.
- Dimension critique – le discours polémique qui s'en prend au roman dans tout ce qu'il a de romanesque, dans son peu de réalité ; cela peut conduire à des alternatives au roman (Jean-Pierre Camus, Les Evénements singuliers (1628) et leur Préface, Charles Sorel, Le Berger extravagant (1627) rebaptisé L'Anti-Roman en 1633).
- Dimension parodique – la reprise, le détournement, la récriture d'oeuvres antérieures. Un seul exemple : Nodier écrivant dans son Histoire du roi de Bohème et de ses sept châteaux (1830) : « moi, plagiaire des plagiaires de Sterne – / Qui fut plagiaire de Swift – / Qui fut plagiaire de Wilkins – / Qui fut plagiaire de Cyrano – [etc.]
- Dimension métafictionnelle – l'exhibition des ficelles, la dénudation des procédés ; tout ce qui consiste à nous faire entrer dans la cuisine du roman (de Scarron, Le Roman comique (1651-57) à Calvino, Si par une nuit d'hiver un voyageur (1979), en passant par Diderot, Jacques le Fataliste).
Ces différentes dimensions ne s'excluent pas, bien au contraire, elles voisinent souvent dans une même oeuvre.
In fine, l'objectif de ce numéro consiste à mettre en évidence la permanence de la démarche « antiromanesque » du XVIIe siècle au XXIe siècle dans ses multiples variations, non dans une démarche exhaustive qui en décrirait tous les aspects, mais à travers une série d'exemples significatifs. La démarche pourrait permettre de s'interroger, à travers le miroir déformant ou grossissant de l'antiroman, sur la nature du romanesque lui-même (car bien souvent le romanesque est ponctuellement maintenu) ou, mieux encore, sur la coexistence de plusieurs modes de romanesques (plusieurs romans conjoints sont simultanément narrés).
Les propositions de contribution (une quinzaine de lignes environ) pour le dossier Antiromanesques sont à adresser à Luc Ruiz par voie électronique avant le 15 octobre pour examen par le comité de lecture.
Au-delà de cette date ne seront examinées que les contributions entièrement rédigées, à adresser par voie et électronique et sur papier par voie postale.
La remise des contributions retenues (maximum 30 000 signes) est prévue pour la fin mars. La collection Romanesques (Centre d'Etudes du Roman et du Romanesque. Université de Picardie) publie également des contributions à caractère général sur la question du romanesque. Les propositions ou les articles pour ce numéro sont à adresser à Luc Ruiz dans les mêmes conditions. Luc Ruiz Faculté des Lettres. Université de Picardie Chemin du Thil 80025 Amiens Cedex 1.