La théorie subreptice, III. anecdotespicturales.
La série descolloques organisés par le GRAL part du postulat que l'anecdoten'est pas purement anecdotique, mais qu'elle est la manifestation oul'illustration d'une théorie subreptice – qui excède parfois l'intention decelui qui la rapporte. Qu'elle se présente comme isolée ou insérée dans untissu narratif, elle tranche sur l'argumentation et les prescriptions destraités. Que nous enseigne-t-elle, précisément ? Sur quoi et selon quellesmodalités ? En quoi sa forme spécifique permet-elle ou accompagne-t-elleun renouvellement des questionnements théoriques ? Quels rapportsentretient-elle avec les discours dogmatiques contemporains ouantérieurs ? Peut-elle, à l'instar de l'anecdote historique, redéfinie auXVIIe siècle comme « clef secrète de l'histoire », révélerquelque chose qui, jusque-là, demeurait impensé, voire impensable ?
Les travaux sur des corpusd'anecdotes allant de l'Antiquité à la fin du XVIIIe siècle etempruntés à toutes les traditions européennes ont déjàdonné lieu à deux journées d'études, Anecdotes démonologiques (mai 2007) etAnecdotes théâtrales (mars 2008). Les anecdotes sur la peinture et la sculpturefourniront la matière d'une troisième rencontre. La série se poursuivra, en 2009,avec les anecdotes philosophiques.
Les anecdotes picturalesentretiennent un rapport nécessaire à la théorie de l'art, dans la mesure où lathéorie, dans les domaines artistiques, s'est largement constituée par lerécit : c'est le cas dans l'Antiquité, où elle s'est développée par lebiais de fragments biographiques dont certaines ont eu à travers les siècles unsuccès retentissant. Le recueil Millet, qui rassemble les nombreuses référencesà l'art que l'on trouve dans les écrits antiques, est en grande partie unecollection d'anecdotes. A partir du quinzième siècle, la théorie humaniste, quis'est efforcée de penser à la fois l'activité de l'artiste, l'élaboration del'oeuvre et son agencement formel, a eu recours à l'analyse et à l'argumentationplutôt qu'au récit, mais elle est loin d'avoir rompu avec le modenarratif : Vasari a fait des émules et, pendant plusieurs siècles, lesuccès des Vies de peintres ne s'est pas démenti, celui des historiettesexemplaires non plus.
Le propos de ces journées est dese pencher sur ces bribes de récit, véhiculées à travers les siècles et lesfrontières, pour s'interroger sur leur forme, leur statut, leur diffusion danstoutes sortes d'imprimés, bien au-delà de la Kunstliteratur. Qu'elles portent sur un moment de la vie d'unartiste, sur une rivalité entre deux maîtres, sur la réaction d'uncommanditaire, sur l'élaboration d'un chef d'oeuvre ou sur une phase de saréception, et qu'elles soient isolées ou insérées dans une compilation, cesanecdotes disent quelque chose de ce qu'est ou doit être l'art. Même si lepropos affiché est de distraire, d'étonner ou d'amuser, elles sont rarementdénuées de portée théorique, fût-elle implicite voire inconsciente.
Anecdotes picturales
Troisième rencontre dans le cadre des colloquesconsacrés à
La théorie subreptice
(usages de l'anecdote dans divers champs
théoriques, de laRenaissance aux Lumières)
vendredi 21 et samedi 22 Novembre 2008
Colloque du Groupe de Recherches sur lesLittératures de l'Antiquité aux Lumières (GRAL, CRLC, Paris IV)
organisépar FrançoisLecercle, Emmanuelle Hénin, Lise Wajeman
Vendredi 21novembre
Centre Malesherbes, salle 344 (3e étage)*
9h15
Présentation du colloque par François Lecercle.
Session 1. Les sources antiques : Des anecdotes pliniennes àl'invention de lieux communs.
9h45
Valérie Naas (université Paris IV)
Les anecdotes relatives aux peintres d'après l'Histoire naturelle de Pline l'Ancien.
10h15
Mathilde Bert (université de Liège)
L'anecdote plinienne dans la littérature artistique à la Renaissance. Statuts et fonctions.
10h45
Discussion et pause
11h30
Emmanuelle Hénin (université de Reims)
L'invention des anecdotes dans la théorie de l'art (XVI-XVIIe siècles) : de la variation au détournement.
12h
Jacqueline Lichtenstein (université Paris IV)
Anecdotes et lieux communs dans la théorie de l'art au XVIIe siècle.
12h30
Discussion
Session 2. La fortune des anecdotes en Italie à la Renaissance.
14h30
Pouneh Mochiri (université de Brest)
L'anecdote de peinture dans quelques dialogues du XVIe siècle : entre gracieux ornement et pensée figurée.
15h
François Lecercle (université Paris IV)
Anecdotes sur le plaisir de la peinture (1550-1650) : sur quelques infortunes de la prescription théorique.
15h30
Discussion et pause.
16h15
Lise Wajeman (université Aix-Marseille I)
Manger la peinture. Autour de la vie de Piero di Cosimo selon Vasari.
16h45
Anna Sconza (université de Naples)
Les « anecdotes » sur Léonard de Vinci, cause de l'infortune de ses écrits ?
17h15
Discussion.
* CentreMalesherbes, 108 Bd Malesherbes, 75017 Paris, métro Malesherbes.
Samedi 22 Novembre
Sorbonne*
Session 3, salle des Actes. De l'esprit à la chair : élévation didactique etinscription matérielle au XVIIe siècle.
9h15
Colette Nativel (université Paris I)
L'utilisation de l'anecdote par Junius dans l'élaboration du modèle du « doctus pictor » (De pictura veterum, livre II).
10h
Ralph Dekoninck (université de Louvain)
L'anecdote allégorisée. Les raisins de Zeuxis dans la littérature spirituelle et emblématique.
10h30
Discussion et pause
11h15
Jean-François Corpataux (université de Fribourg)
« Doigts dans la chair » : de Céphisodote à Bernini.
11h45
Jan Blanc (université de Lausanne)
Quand l'accessoire devient essentiel. Anecdotes textuelles et visuelles dans la peinture hollandaise du XVIIe siècle.
12h15
Discussion.
Session 4, salle F 366 (2e étage). Circulation des anecdotesdans l'Europe des Lumières.
14h
Tatiana Smoliarova (université de Columbia)
Le maître de l'illusion au pays du mirage : Apelle à la cour de la Grande Catherine.
14h30
Julie Boch (université de Reims)
« Si nous continuions à faire des contes ? » Les anecdotes dans les Salons de Diderot.
15h
Discussion et pause.
15h 45
Jean-Louis Haquette (université de Reims)
L'histoire et l'anecdote : réflexions sur les Anecdotes of Painting d'Horace Walpole.
16h15
Frédéric Ogée (université Paris VII)
Quelques anecdotes autour de Hogarth.
17h15
Discussion et Conclusion.
* Sorbonne, 1 rue Victor Cousin, 75005Paris, métro Cluny-La Sorbonne, RER Luxembourg.