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Paroles dominantes / Paroles dominées (Orléans)

Paroles dominantes / Paroles dominées (Orléans)

Publié le par Marc Escola (Source : Stelene Narainen)

Paroles dominantes / Paroles dominées

Colloque interdisciplinaire

les 14 et 15 novembre 2023


Appel à communications

Au cours des deux dernières décennies, les travaux en sciences humaines et sociales portant sur les minorités sont devenus de plus en plus nombreux. Les récents mouvements de libération de la parole (illustrés par #MeToo et #BlackLivesMatter sur les réseaux sociaux par exemple) soulignent paradoxalement le manque de légitimité ressenti par ces groupes à s’exprimer dans la sphère publique et scientifique, et traduisent une forme d'insécurité linguistique (à prendre au sens le plus large du terme) encore trop présente.

Par le prisme de différentes disciplines des sciences humaines et sociales (sciences du langage, sociologie, littérature, sciences politiques, géographie et didactique notamment), nous nous intéressons aux groupes actuellement considérés comme minoritaires. L’objectif de ce colloque est de mettre en avant les recherches sur trois enjeux contemporains, interdisciplinaires et internationaux : les contacts linguistiques, les phénomènes migratoires et les discriminations liées aux genres et aux sexualités.

Axe 1 : Langues minoritaires, contacts de langues et plurilinguisme

Le premier axe abordé est celui des phénomènes relatifs à la mise en contact des langues dans des contextes d’asymétrie des rapports de force sociaux. Cette thématique peut être traitée au travers d’un large spectre de champs d’études ; nousColloque interdisciplinaireParoles dominantes / Paroles dominées14 et 15 novembre 2023pensons tout particulièrement à ceux relatifs aux concepts de langues minoritaires ou minorisées (souvent mobilisés dans les analyses linguistiques relatives aux contextes coloniaux), ainsi qu’aux phénomènes de multilinguisme social, d’insécurité et de mort linguistique (voir Gadet, 2007 ; voir Grant, 2019 ; voir Harris, 1991) dans le contexte moderne des efforts d’inclusion et de revitalisation.

D’autres domaines permettraient également de traiter du phénomène plus concrètement linguistique de l’emprunt, et plus généralement de la porosité et de l’influence mutuelle des langues dans différents contextes de mise en contact. Peuvent être abordées, à titre d’exemples, la situation des langues minoritaires dans le monde (voir Mufwene, 2001, 2008 ; voir Engman & King, 2022), les influences linguistiques entre langues en contact (voir Joseph, 2022 ; voir Otheguy, 2022 ; voir Martin & Przewozny-Desriaux, à paraître), ou encore les conditions de création et de réception artistique dans le cadre d’une langue mineure (voir Deleuze & Guattari, 1975).

Axe 2 : Parole en contexte migratoire

Le deuxième axe est consacré aux questions relatives aux migrations et met en avant les recherches actuelles portant sur ce sujet. Différentes thématiques pourront être abordées, telles que les différences de traitement des personnes en situation de migration selon leurs pays d’origine (voir Noiriel, 2007 ; voir Viprey, 2010), la construction de la minorisation (voir Patrick, 2010), ou encore la désillusion en contexte migratoire (voir Sayad, 1999 ; voir Etienne, 2021).

Les personnes directement concernées peuvent évoquer leurs expériences sur la réalité des communautés culturelles, parfois rassemblées dans leur pays d'accueil pour les mêmes causes, et sont encouragées à témoigner de leur vécu, oralement (Breton, 2021) ou artistiquement. Les acteur·ices associatif·ves (D’Halluin-Mabillot, 2012) sont également invité·es à présenter leurs expériences dans le cadre de l'accueil et la prise en charge de publics migrant·es, afin de comprendre comment leurs actions s’articulent avec et en réponse aux politiques d’immigration.

Axe 3 : Genre, sexualité, langage et pouvoir

Ce troisième axe a pour objectif d’interroger la représentation de la parole et des langues dans leurs rapports aux genres et aux sexualités. Se déclinant en plusieurs sous-problématiques, il s’agit de questionner les dynamiques de silenciation et d’ostracisation de la parole des minorités sexuelles et des minorités de genres ainsi que les manifestations des systèmes d’oppression dans leurs différents contextes, aussi bien dans les sphères publiques, que professionnelles ou académiques (voir Pochic, 2021). Cette partie est l’occasion d’appréhender les rapports hiérarchiques et les phénomènes discriminatoires (transphobie, homophobie, sexisme, etc.) ainsi que les procédés mis à disposition pour recueillir la parole des personnes concernées.

Cet axe se propose ensuite comme espace critique et réflexif autour des rapports entre langage, genre et pouvoir afin de mettre en lumière l’ancrage du système de genre comme rapport de domination au sein de la structure linguistique (voir Butler, 2006 [1990]). Cette approche appelle également à des réflexions sur les pratiques hybrides et plurilinguistiques à l’intersection des problématiques entre corps, genres, races et langues (voir Anzaldúa, 1987). Dans cette perspective, les différentes pratiques de résistance qui se jouent à même le langage, qu’elles mobilisent des « performativités insurrectionnelles » (voir Gérardin-Laverge, 2018), des pratiques de « désordre discursif » (voir Abbou, 2019) ou encore de « stratégies linguistiques DIY » (voir Greco, 2018), constituent également un terrain d’étude possible des paroles dominées et de ses politiques d’émancipations et d’expérimentations linguistiques, artistiques et littéraires (voir Wittig, 2001).

Interventions artistiques

La dernière demi-journée du colloque sera consacrée à l'intervention d'artistes. Ce sera l'occasion de découvrir des projets créatifs ainsi que des oeuvres liées aux sujets abordés lors du colloque. Les artistes pourront faire part de la place de ces thématiques dans leurs oeuvres en présentant comment celles-ci mettent en lumière les paroles dites dominées. L'influence de ces thématiques dans les processus de création pourra être mise en avant en mettant en évidence leurs répercussions sur le travail artistique.

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Dans un souci de diversification des interventions, les communications de toutes disciplines et de tout format sont les bienvenues (recherche-création, atelier, présentation de projet créatif...), tout comme les récits à la première personne permettant de mettre en relief les limites et les tabous propres au milieu académique concernant les possibilités d’expression et de réception des paroles dominées.
 
Modalités de soumission

Les propositions doivent être déposées sur Sciencesconf avant le 30 juin 2023 inclus, sous format .pdf, .doc ou .odt. Elles prendront la forme d’un résumé de 3000 caractères (espaces comprises) accompagné d’un titre.

Organisation de la sélection

La sélection des propositions sera effectuée en double-aveugle. Les textes seront anonymisés et les communications devront être adaptées en fonction des retours des relecteur·ices.

Participation au colloque

Les communicant·es retenu·es seront convié·es à présenter leur travail sur un créneau de 20 minutes suivi de 10 minutes d’échange. Les frais de transports et d’hébergement ne sont pas pris en charge.

L’événement est gratuit et ouvert à tous·tes. L’inscription est obligatoire sur https://paroles-dd.sciencesconf.org/ avant le 31 octobre 2023. Un format hybride est envisagé sur Teams, le lien sera envoyé aux inscrit·es. 

Calendrier

Date limite de soumission : 30 juin 2023
Notification d’acceptation des propositions : 1er septembre 2023
Date limite d'inscription : 31 octobre 2023
Colloque : 14 et 15 novembre 2023.

Comité d’organisation

Aymen ALLECHE, Université Paris Sorbonne Nouvelle, Sciences du langage (ED622), doctorant
Youna BARONI-GATOUILLAT, Université d'Orléans, Laboratoire Ligérien de Linguistique (UMR 7270), doctorante
Gizem BILAL, EHESS (ED 286), EUR Sciences sociales du genre et de la sexualité / CETOBaC, doctorante
Corentin BOUQUET, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, THALIM (UMR 7172), doctorant
Rachel BOYER, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, THALIM (UMR 7172), doctorante
Alexandre ETCHEHEGUY, Université de Tours, Laboratoire Ligérien de Linguistique (UMR 7270), doctorant
Malou MESTRINARO, Université d'Orléans, Laboratoire Ligérien de Linguistique (UMR 7270), doctorante
Stelene NARAINEN, Université d'Orléans, Laboratoire Ligérien de Linguistique (UMR 7270), docteure
Célia NGUYEN, Université Côte d'Azur, Unité de Recherche Migrations et Société, doctorante
Stéfany THIERRY, Université de Tours, Laboratoire Ligérien de Linguistique (UMR 7270), doctorante


Références citées

Abbou, J. (2019). La langue est-elle toujours un lieu de lutte féministe ? De la contrefaçon sémiotique à la libéralisation. In Recherches féministes, 32(2), 235–258.
Anzaldúa, G. (1987). Borderlands/La Frontera. The New Mestiza. Spinsters/Aunt Lute.
Breton, H. (2021). La narratation du vécu à l’épreuve du « problème difficile » de l’expérience : Entre mémoire passive et historicité. Práxis Educacional, 17(44), 24-37.
Butler, J. (2006) [1990]. Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité. Trad. Cynthia Kraus. La Découverte.
Deleuze, G., & Guattari, F. (1975). Kafka. Pour une littérature mineure. Éditions de Minuit.

D’Halluin-Mabillot, E. (2012). Les épreuves de l’asile. Associations et réfugiés face aux politiques du soupçon, Paris, EHESS, coll. « En temps & lieux ».
Engman, M. M., & King, K. A. (2022). Indigenous and immigrant languages in the US: Language Contact, Change, and Survival. In S. S. Mufwene & A. M. Escobar (Éds.), The Cambridge handbook of language contact (Cambridge handbooks in language and linguistics, Vol. 2, p. 555-592). Cambridge University Press.
Étienne, G. (2021). Un récit de vie inopiné : Tisser la mémoire d’une famille d’origine algérienne. Hommes & Migrations [En ligne].
Gadet, F. (2007). La variété sociale en français. Ophrys.
Gérardin-Laverge, M. (2018). C’est en slogant qu’on devient féministe » Hétérogénéité du genre et performativité insurrectionnelle. In Semen, 44 [en ligne].
Grant, A. P. (2019). Contact-Induced Linguistic Change: An Introduction. In A. P. Grant, The Oxford Handbook of Language Contact (p. 1-47). Oxford University Press.
Greco, L. (2018). Linguistic Uprisings: Toward a Grammar of Emancipation. In H-France Salon, 11 (14), 1–13.
Harris, J. W. (1991). Kriol: The creation of a new language.
Joseph, B. D. (2022). Language Contact and Historical Linguistics. In S. S. Mufwene & A. M. Escobar (Éds.), The Cambridge handbook of language contact (Cambridge handbooks in language and linguistics, Vol. 1, p. 43-63). Cambridge University Press.
Martin, M., & Przewozny-Desriaux, A. (À paraître). Lexical Stress in Varieties of Australian English : A Corpus-Based Exploration. Edinburgh University Press.
Mufwene, S. S. (2001). The Ecology of Language Evolution. Cambridge University Press.
Mufwene, S. S. (2008). Language Evolution: Contact, Competition and Change. Continuum.
Noiriel, G. (2007). Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXe siècle)—Discours publics, humiliations privées,. Fayard.
Otheguy, R., Shin, N., & Erker, D. (2022). On the Idiolectal Nature of Lexical and Phonological Contact: Spaniards, Nahyas, and Yorubas in the New World. In S. S. Mufwene & A. M. Escobar (Éds.), The Cambridge handbook of language contact (Cambridge handbooks in language and linguistics, Vol. 2, p. 370-402). Cambridge University Press.
Patrick, D. (2010). Language dominance and minorization. In J. Jaspers, J.-O. Östman, & J. Verschueren (Éds.), Society and Language Use. John Benjamins Publishing.
Pochic, S. (2018). Course à l’excellence et inégalités sexuées dans les organisations académiques. La vie de la recherche scientifique. Sncs Fsu, 475, 21–24.
Sayad, A. (1999). La Double Absence : Des illusions de l’émigré aux souffrances de l’immigré. Seuil.
Viprey, M. (2010). Immigration choisie, immigration subie : Du discours à la réalité. La Revue de l’IRES, 64, 149-189.
Wittig, M. (2001). La Pensée Straight. Amsterdam.