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Camilla Rocca

Le mouvement ontogénétique : Patočka et le problème de la corrélation

1 La phénoménologie asubjective de Jan Patočka (Turnov 1907 - Prague 1977) se construit à partir d’une confrontation directe avec les pensées de ses deux maitres principaux, Husserl et Heidegger ; ainsi, par une reformulation de la subjectivité à partir d'une interrogation existentiale sur le corps, elle permet de penser à nouveau le problème de la corrélation entre le sujet et le monde. Plus précisément, le but est celui de trouver un sens ontologique unitaire qui puisse fonder l'articulation entre le sujet et le monde, de façon que soit dépassée l'équivocité ontologique entre l'immanence subjective et la transcendance objective, sans pourtant tomber dans un monisme omninivelant qui annulerait toute spécificité du sujet tout autant que de l’objet. En d'autres termes, il s'agit de penser l'appartenance ontologique du sujet au monde, au-delà de la simple inclusion spatiale, tout en préservant le sens propre de la subjectivité. La localisation du corps pensée existentialement implique en fait que le sujet corporel ne se rapporte pas au monde comme à n’importe quel objet de connaissance, mais plutôt comme à ce qu’il reçoit et qu’il accomplit, comme à ce dont il participe par sa propre praxis : dans chaque mouvement pratique de son existence le sujet médiatise la phénoménalisation du monde. Le fondement de leur articulation ne peut alors être que le mouvement : parce que le sujet est ontologiquement mouvement, il peut recevoir et participer au  proto-mouvement de la manifestation du monde. Or, quel est le sens du mouvement de l’existence subjective et du mouvement de la manifestation mondaine ? Ou mieux, quel est le sens unitaire de tout mouvement qui permet au mouvement subjectif et au proto-mouvement du monde de s’articuler entre eux et qui nous autorise donc à parler d’une vraie inclusion ontologique et non pas tout simplement spatiale ? Nous verrons par la suite que c’est dans une relecture de la pensée d’Aristote et plus précisément dans une radicalisation du concept du Stagirite du mouvement ontogénétique que Patočka trouvera une solution possible.

Le mouvement subjectif

2Le premier pas que Patočka doit accomplir pour démarrer sa réflexion d'une manifestation asubjective du monde, est une critique du subjectivisme husserlien : le philosophe tchèque propose de radicaliser l'épochè en excluant la réduction et donc en incluant dans la suspension epocale aussi le sujet, l'ego, la conscience transcendantale constituante donnée selon Husserl apodictiquement. Cette épochè sans réduction permet alors de passer de l'analyse d’un étant, subjectif ou objectif, à l’analyse du fondement non objectif, ou asubjectif, de sa manifestation. Cela n'implique pas la négation du sujet, auquel au contraire le champ phénoménal est toujours relatif ; tout simplement, en refusant la donation immédiate de l'ego et l'immanentisation de la phénoménalité, Patočka souligne l'importance d'une interrogation sur l'essence de la subjectivité qui n'est plus une conscience constituante hors-monde. Pourtant, dans sa mondanéité même, elle accomplit la phénoménalisation du monde, elle est le lieu ou le milieu de la phénoménalisation du monde. Il faut alors penser l'articulation entre une manifestation mondaine asubjective et une manifestation du sujet – dans le double sens subjectif et objectif du génitif. En d'autres termes, il faut penser un nouveau sens d’être du sujet qui rende compte de la possibilité, pour celui-ci, de faire partie de ce qu'il manifeste, d’apparaître lui-même dans le monde tout en étant le destinataire de son apparition. Le seul statut qui peut fournir une médiation entre l'intramondanéité du sujet – qui semblerait effacer son hétérogénéité vis-à-vis des autres objets du monde – et sa différence par rapport aux autres étants – qui semblerait nier toute relation possible – est le mouvement : par sa propre nature, tout en ayant lieu dans le monde, à savoir dans la transcendance objective, ceci n’attend jamais une position stable, il est la négation même de toute position, donc de toute objectité.

3Nous voyons alors Patočka, en suivant Maine de Biran, décrire dynamiquement l'ego comme effort, impulsion vers le monde qui ne peut se réaliser que par le « je peux » corporel, lui aussi dynamiquement conçu : le corps vivant1 est défini par Patočka comme « possibilité de se mouvoir » et pour cette raison il est la possibilité première de l'existence sur laquelle repose la réalisation de toutes les autres. Les activités corporelles ancrent donc le sujet dans le monde en permettant en même temps la perception, elle-même dynamiquement conçue, comme approche des autres étants plutôt que comme représentation. Mais aussi, par ses activités le sujet, en réalisant ses propres possibilités subjectives, produit soi-même, s’inscrit dans la réalité apparaissante et donc il accomplit la réalisation du monde, il le phénoménalise. Toutefois, les possibilités à réaliser sont offertes au sujet par le monde ; en ce sens, lorsqu'on parle de manifestation du monde on doit considérer les deux sens du génitif : le sujet phénoménalise le monde parce que, préalablement, ce dernier se manifeste lui-même. En d'autres termes, la découverte de l'étant par le mouvement de l'existence suppose comme sa propre condition le proto-mouvement par lequel l'étant même se produit, c'est-à-dire paraît par son propre mouvement de délimitation asubjective : « [L]e dévoilement de la chose dans sa figure véritable est le mouvement propre de la chose qui sort du retrait pour se déployer dans la plénitude de sa présence et sombrer de nouveau dans l'absence »2. Ainsi, l'analyse du mouvement de l'existence, défini comme auto-accomplissement par la praxis corporelle qui dévoile le monde, peut constituer une voie d'accès privilégiée aux autres mouvements et, par conséquent, permettre d'individuer l’essence générale du mouvement, comprise comme réalisation dévoilante. Donc, le propre de tout mouvement c'est de dévoiler le monde en le réalisant. En ce sens « l'ontologie de la vie peut être élargie en ontologie du monde si nous comprenons la vie comme mouvement au sens originel du terme – (…) δύναμις réalisée »3.

La radicalisation du mouvement aristotélicien

4Cependant, il faut disposer d'un concept de mouvement qui puisse rendre compte de la réalisation. C'est dans une confrontation avec Aristote que Patočka élabore un concept de mouvement qui puisse valoir pour l'existence elle-même comprise comme auto-réalisation : « de même que le mouvement chez Aristote est passage de la possibilité à la réalité effective, (…) de même l'existence elle aussi est vie dans la possibilité »4. Le mouvement originel est alors défini comme l'être-en-acte de la possibilité pour autant qu'il est dans la possibilité ou, dans les termes d'Aristote, « l’entéléchie du mobile en tant que mobile»5. En se rapprochant d'Aristote, Patočka interprète donc l’existence non pas comme une présence-donnée, mais bien plutôt comme quelque chose de proche de l’ατελέσ ἐνέργεια ou de l’εντελέχεια. C’est un mode d’être qui est l’acte même d’accomplissement de soi, l'actualisation d'un mouvement qui ne se réalise que dans la mesure où il reste en mouvement. Patočka détermine ainsi l’existence comme mouvement, parce qu'elle ne projette pas ses possibilités de manière à les avoir objectivement devant soi dans une représentation, mais bien en les réalisant, en les actualisant. Cela signifie que l’existence n’est pas simplement donnée dans la passivité : c'est notre tâche de « [l']accomplir (...), l’assumer »6, la réaliser.

5La philosophie du Stagirite peut être caractérisée comme une ontologie du mouvement, au sens où le mouvement a une signification ontologique. L'essence du mouvement est de tendre vers la détermination ; celui-ci est en effet défini comme passage de la privation à la possession d'une détermination en tant que réalisation d'une déterminité plus grande. Donc, le mouvement aristotélicien vise le plein d'être, le maximum de détermination et, en ce sens, est constamment orienté vers l'avenir. Tout étant sensible n'existe que dans le processus, toujours approximatif, imparfait, inaccompli, d'actualisation de sa fin : l'accomplissement est plutôt comme une promesse indéfinie. Justement, pour cette raison, le domaine sensible est toujours mobile, c’est-à-dire qu’il reste toujours en devenir. Aristote utilise la notion d'« ατελέσ ἐνέργεια » pour se référer à cet acte incomplet, au mouvement inachevé de la substance sensible qui ne se réalise que dans la mesure où il reste en mouvement. Et nous pouvons bien reconnaître ce concept dans la caractérisation patočkienne de l'existence comme « vie dans la possibilité »7.

6Bien que le mouvement soit toujours un acte inaccompli au regard de l'ἐνέργεια parfaite, il est néanmoins ce qui maximise à chaque instant, dans le domaine de la φύσις, l'être fini en produisant l'être-ensemble des déterminations. Ainsi, une fois sorti de l'ontologie du remplissement intuitif husserlien, Patočka peut construire une nouvelle ontologie pour laquelle le mouvement est la manière dont un être fini, qui ne peut exister pleinement, peut néanmoins atteindre une existence maximale. C'est précisément Aristote qui conduit Patočka à substituer au modèle de la plénitude ontologique, affirmé comme une idée régulatrice par la phénoménologie de la raison de Husserl, celui de l'existence maximale.

7Le mouvement n'est pas tant ce qui produit les déterminations que ce qui les unifie, mais étant donné que cette unité réalisée (ou mieux, toujours seulement « esquissée »8) qualifie l'étant dans sa singularité, le mouvement fait être l'étant en mouvement, le conduit à ce qu'il est. Il est ce par quoi quelque chose advient, bref : il est ontogénétique. Ainsi, compris en sa vérité, le mouvement ne se déploie pas au sein de l'étant ; il est le processus qui fait être l'étant : « passer du non-être à l'être-quelque-chose, n'est possible que par le mouvement. Le mouvement est donc ce qui rend l'étant ce qu'il est »9. Et pour cette raison, parce que c'est par lui que « l'être tout entier entre dans les phénomènes », il est toujours essentiellement mouvement de la manifestation10 : en d'autres termes, « [L]e mouvement (…) fonde l'identité de l'être et de l'apparaître. L'être est être manifeste »11.

8Or, si le mouvement a bien une signification ontologique chez Aristote et s’il est repris par Patočka en tant que mouvement ontogénétique, on peut toutefois noter une fondamentale radicalisation dans la réélaboration du penseur tchèque. Aristote conçoit la manifestation comme l'actualisation d'une puissance qui préexiste à son actualisation sous forme de présence-absente, alors que Patočka la conçoit comme la réalisation d'une possibilité qui n'existe que dans sa réalisation même. Cette transformation de la δύναμις en possibilité va de pair avec une désubstantialisation de la première. La δύναμις aristotélicienne est en fait un changement qui s’opère dans l’intervalle de contraires donnés et elle est déterminée par la présence ou l’absence de certaines déterminations du substrat dans ce même intervalle. Il y a alors chez Aristote, dans le mouvement, un substrat matériel qui se maintient, susceptible d'assumer des déterminations contraires, sans pour autant cesser d'être la même substance. Le changement est alors défini par rapport à ce qui est constant : il advient à un substrat (υποκείμενον) qui, en tant qu'il est ce qui change, demeure le même à travers le changement. Pour cette raison on peut parler, à propos d'Aristote, d'une « métaphysique substantielle » du mobile et du mouvement ; en fait, parmi les quatre mouvements distingués par Aristote (selon les catégories de substance, de qualité, de quantité et de lieu), le mouvement de la substance doit être compris comme délivrant l'essence même du mouvement. Cela revient à dire que ce qui s'accomplit dans le changement se précède dans le substrat sous forme de privation : le mouvement vient donc accomplir une détermination qui était en un sens déjà là en puissance dans le substrat plutôt qu'il ne la produit ; il l'actualise plutôt qu'il ne la réalise.

9Au contraire, selon Patočka aucun étant ne préexiste ni sous-tend à ses possibilités, il ne vit intégralement que par la manière dont il est dans ses possibilités en tant qu’elles se réalisent ; l’existence même, par exemple, est définie par Patočka comme « un réalisateur de soi »12. Alors que le mouvement aristotélicien ne fait que conduire à son actualité quelque chose qui préexiste et demeure en un sens extérieur au mouvement, le mouvement patočkien fait être cela même qui est en mouvement par ce mouvement même, c'est-à-dire le réalise, ou fait naître la possibilité en la réalisant : les possibilités ne sont pas données à l’avance dans une zone préalable déterminant un substrat, plutôt chez Patočka le mouvement est l'événement tout ensemble de la présence et de l'absence, comme les deux faces d'un seul et même avènement originaire. En ce sens, on pourrait parler chez Patočka d'un « mouvement créateur », bien qu'une telle définition exigerait ultérieures éclaircissements, afin d’exclure le possible caractère téléologique qu'un terme si proche du langage religieux peut impliquer. Cela signifie que tout étant, y compris le sujet, « ne se rapporte à ses possibilités qu'en les étant »13 et qu'il n'est ses possibilités qu'« en les accomplissant »14; l'ego non plus ne peut pas alors être considéré comme un substrat passivement déterminé à l'avance, mais il s'accomplit dans un mouvement de devenir-soi, tout comme le corps dans un mouvement de devenir-chair, qui n'est rien d'autre que le mouvement de l'existence. Le sujet corporel se constitue dans et par ce mouvement, il en est le sujet et le produit : le mouvement advient nécessairement à quelqu'un et en ce sens on ne peut pas le penser sans sujet, mais ce sujet n'en est pas le substrat et ne le précède pas, il advient au contraire comme sujet dans et par ce même mouvement. En d'autres termes, le mouvement du sujet constitue le substrat dont il est pourtant le mouvement.

10Le mouvement ne peut plus être défini comme un passage « d'où – vers où », mais plutôt comme un « piétinement sur place »15. En ce sens, nous pouvons aussi dire que le mouvement patočkien, à la différence du mouvement aristotélicien, dépasse toute téléologie : le mouvement de la réalisation n'a aucun τέλος à atteindre ; plutôt, le but est présent dans le mouvement même de cheminement vers lui.

11L'élimination d'un substrat immuable fait perdre aussi au mouvement la possibilité de recevoir de celui-ci sa propre unité ; en conséquence, il faut le concevoir comme « vie originelle qui (…) crée elle-même sa propre unité et celle de la chose en mouvement »16 : si ce quelque chose qui se meut ne peut plus être pensé en termes de substance, il faut le penser comme une suite de moments qui se donne sa propre unité et qui permet de parler d'un mouvement. Ces moments « se donnent alors comme moments d'un tout qu'ils sont précisément en train de constituer. Tel est le paradoxe : en tant que déterminé, le mouvement présuppose une unité »17 qui doit être disponible à toute étape, pour que le mouvement soit saisi en tant que tel, mais « qui n'existera qu'à son terme »18. Ce qui implique et explique l'impossibilité d'objectiver le mouvement. Patočka fait appel à l'exemple de la mélodie19 pour décrire ce paradoxe de l'unité en devenir d'un processus où rien ne demeure : de même qu’une composition polyphonique, le mouvement de notre existence se déroule lui aussi dans plusieurs zones de mouvement relativement autonomes dont aucune ne peut être prise en vue exclusivement pour soi, mais qui se modifient et exercent une influence les unes sur les autres. Ainsi Patočka résout aussi le problème d'une ambiguïté interne au mouvement, à savoir celle de la distinction entre un mouvement unitaire de notre vie et les mouvements simples et finis par lesquels le premier se réalise : l'unité de ce qui se réalise ne se donne en chaque moment que comme ce qui va advenir par lui.

Conclusion

12Seulement une telle caractérisation du mouvement – comme réalisation au sens de la manifestation – permet de surmonter la différence évidente entre le mouvement phénoménalisant et le déplacement propre à notre corps ainsi qu'aux autres étants. En fait, si on entend le mouvement corporel comme un mouvement vivant radicalement différent des mouvements des autres étants, on finit par approfondir la singularité ontico-ontologique du sujet en prenant en considération les conditions de sa réalisation, mais on creuse un abîme entre le sujet et le reste de l’étant ; si, au contraire, on entend le mouvement en un sens générique qui engloberait aussi bien le mouvement de l'existence que celui de la pierre qui tombe – ce qui justifierait la continuité entre mon corps et les autres corps – on finit par compromettre la différence du sujet vis-à-vis des autres étants. Une semblable détermination du mouvement ontologique, reprise d'Aristote et radicalement différente de celle des sciences modernes de la nature, fournit un fondement ontologique asubjectif et donc une structure ontologique générale qui permet d'englober l'ensemble des phénomènes humains et non-humains. Patočka le dit clairement : « [P]armi les structures censées jeter un pont entre l'humain et l’extra-humain figure également, bien sûr, le concept aristotélicien de mouvement»20. Reconnaître la médiation entre le subjectif et l'objectif serait alors précisément, selon le philosophe tchèque, l'intention principale de la pensée d'Aristote, bien loin donc, à son avis, de l'anthropomorphisme qui trop souvent lui a été reproché. Patočka répond à cette accusation en affirmant que

« Si l'anthropomorphisme signifie un subjectivisme, l'intention d'Aristote est tout le contraire. Il ne se propose pas de subjectiver le monde, de l''animer' et le 'spiritualiser'. Au contraire, il cherche à découvrir des structures asubjectives propres à inclure et à expliquer, à partir des principes plus universels, même les phénomènes humains, la compréhension et les comportements humains, des choses aussi spécifiques à l'homme que la vie dans la vérité, la volonté et le choix, etc.

Sous ce rapport, Aristote est l'antipode de l'idéalisme moderne. Il ne cherche pas le sujet dans les choses – il n'a pas du tout de concept d'un sujet – pas plus qu’il ne l'introduit dans elles. Il s’efforce plutôt de trouver une commune mesure entre le monde et l'homme, une conception de la réalité du monde qui permet de ne pas le scinder en deux, à la manière de Platon ou du cartésianisme, mais de comprendre l'homme comme un cas particulier – fût-il exceptionnel – des structures ontologiques générales »21.

13Grâce à cette lecture, Patočka peut trouver chez Aristote un concept de mouvement qui s’applique à tous les étants et intègre donc comme une modalité, certes privilégiée mais néanmoins propre, notre mouvement subjectif en tant qu'il est révélant. Les considérations de Patočka sur Aristote doivent alors être toujours comprises en vertu de leur portée phénoménologique et non pas seulement historique, à savoir comme un moyen d'accéder à l'essence du sujet conformément à la légalité de l'apparaître : « [D]es nos jours, alors que la philosophie cherche derechef un fondement ontologique asubjectif, Aristote dédogmatisé est pour cette raison actuel»22.

14Une fois affirmé qu’à la fois le sujet et le monde émergent du mouvement de réalisation dévoilante, le problème de la corrélation ne désigne plus l'articulation entre la subjectivité et l'objectivité, mais plutôt entre le mouvement subjectif (dévoilant) et le proto-mouvement du monde (individuant). Ce dernier est la condition du premier ; en d’autres termes, la manifestation à – ou apparition phénoménologique – est le niveau supérieur, l'accomplissement de l'apparition cosmologique ou ontologique – ou manifestation asubjective. En ce sens, l'activité du sujet est coderminante, mais jamais constituante : le sujet recueille et polarise une manifestation qui est indépendante de lui. Pour cette raison il peut faire partie de ce qu'il phénoménalise : l'intramondanéité n'est plus comprise comme un obstacle, mais plutôt comme la condition même de la phénoménalisation.

15Camilla Rocca