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L'univers de la parodie a englobé le pastiche jusqu'à l'abus (puisque l'imitation ne devrait pouvoir se confondre avec la transformation, deux relations hypertextuelles à distinguer), pour des raisons qui tiennent à la force caustique du terme qui paraît regrouper naturellement toute utilisation d'un hypotexte en vue d'en faire une satire hypertextuelle.

C'est aussi bien le cas d'un pastiche comique de l'entomologiste Fabre découvrant un insecte imaginaire (Physcus cupidissimus !) sous la plume de Paul Reboux (A la manière de…, Grasset, 1925, p.25) , que celui du travestissement burlesque du Virgile travesti de Scarron dans lequel Célénon, aînée des maudites Harpies, est décrite par exemple comme une guenon à « l'estomac d'autruche ». La charge (imitation) et le travestissement (transformation) sont alors abusivement confondus.

De plus, la spécificité quasi-technique du pastiche, soumis qu'il est à la nécessité d'une lecture plus réflexive et analytique des textes, limite sa perception et la reconnaissance de son autonomie : les confusions sont légions, même chez les écrivains excellents pasticheurs (Rambaud par exemple: voir Patrick Rambaud, « faut-il célébrer le pastiche ? », Lire n° 262, février 1998, p.44-45).

Enfin, c'est une démarche très similaire qui va générer la parodie du Cid et un pastiche héroïco-comique comme Le Lutrin, faisant se chevaucher les textes malgré leur hétérogénéité de la relation qui les lie à leur hypotexte. Dans le premier cas on applique à la tragédie la dégradation familière et contemporaine, faisant du noble Don Diègue un Jean Chapelain, tragédien à succès auteur de La Pucelle, du Comte Don Gormas l'auteur concurrent La Serre et du soufflet déclencheur de la péripétie centrale un coup arrachant la perruque du puissant tragédien – fameux objet de moqueries de la part des jeunes auteurs attendant encore leur heure dans l'ombre, tant elle était vieille et sale. Le même Boileau recourt dans Le Lutrin à « un nouveau burlesque », s'appuyant cette fois sur un autre genre noble l'épopée, et inversant celui du travestissement parodique, qui va consister ici en ce que « une horlogère et un horloger parlent comme Didon et Enée » (Boileau). Les indigentes péripéties dans une église à propos de l'objet de culte plutôt insignifiant donnent lieu à des vers de style élevé. Ainsi « parodie stricte et pastiche héroïco-comique ont donc en commun (…) d'introduire un sujet vulgaire sans attenter à la noblesse du style, qu'ils conservent avec le texte ou restituent par voie de pastiche. » (Genette, Palimpsestes, p.35)

Maxime Abolgassemi

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Dernière mise à jour de cette page le 20 Février 2008 à 21h32.