Atelier



Réparer les lisants

Par Alexandre Gefen (CNRS)



Le présent texte constitue l'introduction à : Alexandre Gefen, Réparer le monde. La littérature française face au XXIe siècle, Paris, Librairie José Corti, 2017. Il est reproduit dans l'Atelier de théorie littéraire de Fabula avec l'aimable autorisation de l'auteur et de son éditeur.







Dossier : Le contemporain



Ce qui importe, c'est qu'avec le monde on fasse des pays et des langues, avec le chaos du sens, avec les prés des champs de bataille, avec nos actes des légendes et cette forme sophistiquée de la légende qu'est l'histoire, avec les noms communs du nom propre.

Pierre Michon, Mythologies d'hiver[1].



On ne cesse de pleurer la fin de la littérature française contemporaine et de dénoncer l'émergence d'une «postlittérature», comme dit Richard Millet[2], qui n'aurait plus rien de commun avec ce que nous connaissions, depuis le début du xixesiècle, sous ce non, on ne se lasse pas de souligner l'éclipse du prestige et de la conception romantique typiquement française des lettres. Mais le déclin des fonctions collectives de la littérature et la désacralisation contemporaine de l'écrivain, comme le déclin des courants formalistes modernes ou postmodernes, se font au profit de nouveaux rôles: je défendrai ici l'idée que le début du xxiesiècle a vu l'émergence d'une conception que je qualifierai de «thérapeutique» de l'écriture et de la lecture, celle d'une littérature qui guérit, qui soigne, qui aide, ou, du moins, qui «fait du bien». Tout se passe, me semble-t-il, comme si, dans nos démocraties privées de grands cadres herméneutiques et spirituels collectifs[3], le récit littéraire promettait de penser le singulier, de donner sens aux identités pluralisées, de retisser les géographies en constituant des communautés: autant de programmes moins émancipateurs que réparateurs. Les individus fragiles, les oubliés de la grande histoire, les communautés ravagées sont les héros de la fiction française contemporaine. Ces discours néo-humanistes participent de ce que l'on a l'habitude de désigner, depuis les travaux de DominiqueViart[4], comme un retour à la «transitivité». S'érigeant à la fois contre le storytelling et le divertissement, la littérature voudrait faire face au monde, agir, remédier aux souffrances, nous aider à mieux vivre dans nos existences ordinaires: doctrine diffuse, que l'on retrouvera autant dans les discours sociétaux sur les usages de la littérature que chez les écrivains, et qui s'oppose à un idéal d'intransitivité encore largement dominant à la fin du xxe siècle. «La littérature, pour quoi faire?[5]» se demandait encore Antoine Compagnon en 2006, dans sa leçon inaugurale au Collège de France. Inversant cette définition, nos contemporains ont trouvé bien des usages à ce que Valery Larbaud nommait «ce vice impuni, la lecture»: la littérature dévoile, témoigne, «elle donne intimement accès à l'autre, élargit le champ de la connaissance et la profondeur de l'expérience», selon les mots de Pierre Jourde, qui se posait récemment cette question sur son blog Confitures de culture[6]. Elle donne «du mystère aux êtres qui semblent submergés par la vie quotidienne, aux choses en apparence banales, —et cela à force de les observer avec une attention soutenue et de façon presque hypnotique[7]», comme le proposait Patrick Modiano dans son discours de réception du prix Nobel de littérature.


«L'écrivain n'a rien à dire»: formule que l'on retrouve chez Blanchot aussi bien que chez Robbe-Grillet[8] et qui semble aux antipodes de la littérature telle qu'elle s'écrit depuis la fin du xxesiècle. Tournant le dos à la tradition formaliste autant qu'aux pratiques propres à une littérature engagée sur un modèle sartrien, la littérature contemporaine se confronte au monde, non en voulant le changer ou s'en extraire, mais en cherchant à en penser ce qui ne peut être pensé que par la littérature. À travers un retour au sujet et au réel débuté dans les années1980, une attention nouvelle portée au monde, un intérêt renouvelé pour les problématiques de la transmission et de l'identité, elle se veut un instrument de construction de soi, de réflexion morale aiguisée. Si elle refuse de devenir un simple divertissement, la littérature française contemporaine a l'ambition de prendre soin de la vie originaire, des individus fragiles, des oubliés de la grande histoire, des communautés ravagées, de nos démocraties inquiètes, en offrant au lecteur sa capacité à penser l'impératif d'individuation, à faire mémoire des morts, à mettre en partage des expériences sensibles ou à inventer des devenirs possibles: c'est à ce titre qu'elle fait face au monde. «Il y a préciosité dès que l'art devient miroir de lui-même. Non, les arts doivent viser à une sorte de conciliation, de tractation avec le monde —et avec les autres», écrit Pierre Michon pour commenter ce tournant dont les fictions biographiques ont été les premiers symptômes[9]. C'est cet imaginaire collectif particulièrement actif depuis le début du nouveau millénaire où la littérature, en place de la religion et d'un projet politique, veut réparer nos conditions de victimes, corriger ces traumatismes de la mémoire individuelle ou du tissu sociétal (sans différencier entre la «haute littérature» et les ateliers d'écriture pour tout un chacun), que je voudrais évoquer dans cet essai.


À travers un parcours de la fiction contemporaine française, l'objet de cet ouvrage est donc de réfléchir aux transformations déterminantes en train de s'opérer sous nos yeux: transformation des pratiques littéraires, des genres et des normes, de la place de l'écrivain, mais surtout de la parole que nous qualifions de littéraire, autour de l'émergence d'un modèle par lequel la littérature se justifie et se reconnaît, d'un paradigme par lequel elle propose un mode d'action et une forme d'insertion dans la société contemporaine. Je voudrais décrire ce paradigme clinique, thérapeutique, comme une manière de demander à l'écriture et à la lecture de réparer, renouer, ressouder, combler les failles des communautés contemporaines, de retisser l'histoire collective et personnelle, de suppléer les médiations disparues des institutions sociales et religieuses perçues comme obsolètes et déliquescentes à l'heure où l'individu est assigné à s'inventer soi-même. Sauver ou agir, même modestement, sur nos souffrances individuelles ou nationales, par la parole littéraire en tant qu'elle est adresse ou libération, par la fiction en tant qu'elle peut mettre des mots sur le perdu ou l'indicible, chercher à cerner et à intervenir sur les blessures du monde, me semble le mot d'ordre, souvent explicite, placé au cœur des projets littéraires contemporains. Ce mot d'ordre contribue à la resocialisation de la littérature, qui devient une activité nécessaire d'expression de soi avant d'être une vocation ou un magistère réservé à des élus, tout comme à la resocialisation des écrivains, qui deviennent pour tout un chacun des «partenaires d'élucidation[10]» en quittant leur tour d'ivoire. Rompant avec une conception patrimoniale de la littérature autant qu'avec le formalisme, il fait de l'œuvre une expérience partageable, un dispositif herméneutique appropriable et parfois modifiable par le lecteur même, dans des formes d'art «relationnel[11]», ou simplement de réappropriation de l'autorité artistique, d'empowerment des amateurs. Cette évolution s'accompagne de la création de nouveaux espaces d'échange et de nouvelles formes de conversation, notamment à travers la création numérique et le rôle des réseaux sociaux. Elle nous impose, je crois, un renouveau de nos objets d'étude comme de nos méthodes d'analyse. Elle rend, par exemple, toute sa place à la réflexion pragmatique d'un JohnDewey ou d'un Richard Shusterman, pour qui l'œuvre d'art doit être considérée comme un accomplissement pour celui qui s'y plonge ou celui qui la crée et non comme une fin intrinsèque — d'où une attention aux programmes et aux usages («Que veut faire la littérature?», «Que veut-on faire de la littérature?»), qui deviennent plus importants que la pensée ontologique et territoriale («Est-ce de la littérature?») traditionnellement exercée par la théorie et la poétique littéraire.


Un tournant esthético-éthique


De la manière dont Régis Jauffret se plonge dans la vie d'une jeune femme martyre restée enfermée dans une cave[12] à celle dont d'autres écrivains parlent des migrants ou des précaires malgré leur invisibilité, les objets sur lequel la littérature «remédiatrice» veut opérer sont multiples: les moi blessés, désinscrits; les communautés manquantes, asservies, aveuglées; l'altérité innomée, abandonnée; l'histoire trouée, occultée, banalisée; les corps souffrants, abandonnés, mourants; les drames et les êtres sans langage ni représentation. Mais ces objets ont pour point commun d'appeler l'empathie, autrement dit la capacité du récit de nous mettre à la place d'autrui pour partager ses émotions et comprendre sa position dans les situations les plus problématiques, ainsi que le prescrit une version française de ce qu'on appelle désormais outre-Atlantique l'éthique du care. Celle-ci nous promet de «panser ce qui peut être pansé» pour reprendre une formule d'Emmanuel Carrère dans ce chef-d'œuvre empathique qu'est D'autres vies que la mienne (2009). D'où l'importance dans le champ contemporain de formes littéraires comme les récits de passation, de remémoration, de témoignage. Leur point commun est de constituer non des programmes littéraires ou des écoles esthétiques, mais plutôt des formes d'intervention, parfois concrètes, sur le terrain des banlieues, des usines ou des prisons, ou indirectement littéraires, que celles-ci opèrent dans le présent, qu'elles interviennent dans le passé comme réparation rétrospective ou qu'elles construisent des prophéties protectrices face aux futurs, comme chez Antoine Volodine par exemple.


Ce rôle dévolu à l'empathie participe d'un tournant esthético-éthique qui consiste à utiliser le récit pour produire ce que le philosophe Paul Ricœur nommait des identités narratives dans lesquelles nous pouvons nous reconnaître, nous «recomprendre», nous projeter, tant au niveau personnel que social. La littérature se proclame utile parce qu'elle nous met en contact avec des expériences de pensées à valeur morale, et surtout, je crois, parce qu'elle nous permet de ressaisir l'altérité dans une société éclatée en individus. Le récit et ses personnages permettent de passer du «penser par soi-même», au «penser du point de vue de n'importe qui d'autre» par la médiation des affects. Il s'agit de témoigner, non pour l'histoire abstraite, mais pour un autrui concret et incarné, non de réfléchir et de modéliser, mais de sentir et de relier, et il s'agit moins de décrire et d'informer que de mettre en partage une sensibilité aux précaires, aux victimes. Cette littérature affirme que la langue et le récit sont des puissances réparatricestout en se déclinant aussi dans des traditions esthétiques fort diverses: empathie sociale (de l'analyse des victimes de la désindustrialisation chez François Bon à l'attention aux déclassés dont témoigne l'œuvre de Patrick Modiano, ou «ceux qui sont à la traîne» pour Danièle Sallenave [13]), empathie mystique (chez Pierre Michon, par exemple, écrivain dont la mystique de l'altérité plus la charité chrétienne que le care anglo-saxon), en passant par des formes troublantes de romans thérapeutiques chez les écrivains parlant du deuil (Pierre Guyotat, Pierre Pachet, etc.). On ajoutera à cette liste des récits s'attachant à témoigner de catastrophes ou simplement de l'état du monde, tels les récits des écrivains journalistes enquêtant sur la pauvreté à la manière d'Olivier Rolin, dans un modèle immersif d'empathie par identification directe. Même chez Régis Jauffret, l'un des écrivains français les plus attachés à décrire l'altérité souffrante, qui se définit lui-même comme un «mégalomane jusque dans le chagrin[14]», cette attention réparatrice semble compatible avec des formes de détachement ironique, comme si les mauvais sentiments devaient compenser les bons et l'ironie la pitié.


Il s'agit de faire face au nombre et à la dépression liée à l'assignation moderne à inventer sa propre existence; il s'agit de faire face à l'ordinaire, de justifier des choix de sa liberté en se dégageant par l'invention d'un style et d'une identité à soi, quitte à en exhiber la mobilité. Les modèles référentiels sous-jacents sont alors ceux de la psychologie de «l'aide à soi» dans un programme «expressiviste». Cette inquiétude identitaire ne conduit pas nécessairementà des formes autobiographiques ou autofictionnelles. Elle peut mener à une écriture de l'altérité à matrice biographique: la mimésis devient une manière de servir la fragilité du propre (l'écrivain cherche à saisir et à préserver la différence, devenue en elle-même une valeur), dans une littérature «aidante», proposant une politique de la réciprocité. Pour des écrivains comme Annie Ernaux, «aider», c'est aider le monde, archiver le temps présent, faire mémoire de tout ce qui meurt, garder trace, inscrire, rêver d'une arche de Noé à l'extension infinie, dans un modèle proustien hypermnésique, où la littérature est à la fois épiphanie de l'origine, musée d'un monde premier et archive d'une culture. Une ambition collective n'est pas absentedans la littérature contemporaine: les communautés demandent à la littérature de renouer les filiations [15], les généalogies impossibles, de dire les inscriptions secrètes ou interdites, le réel territorial. Cette préoccupation mémorielle s'appuie sur une vision foucaldienne de l'histoire, c'est-à-dire une conception réparatrice où la parole historique restitue des mondes et vient corriger les oublis des discours officiels à leurs marges, dans une complémentarité entre les virtualisations de l'histoire et le regard propre à l'imagination littéraire. Il s'agit de rendre la parole aux infâmes, de proposer une clinique du monde social, dans une tradition romantique d'intervention sociale et politique, comme d'une vision éducative de la littérature et de son partage, version française des doctrines américaines d'empowerment des communautés par la parole. D'autres directions esthétiques sont encore possibles, nous le verrons, pour ces formes de réengagement dans le monde: de Deville à Mauvignier, de Jean Hatzfeld aux frères Rolin, a émergé par exemple un modèle actif de l'écrivain enquêteur ou témoin, partant d'une expérience directe, d'une exploration ou d'une immersion restitutive qui rebrasse elle aussi les partages antérieurs entre littérature, savoirs et intervention sociale.


La fin de l'intransitivité littéraire


Les rayons de «développement personnel» qui remplacent peu à peu les rayons «Essais» de nos librairies accordent une place croissante à l'art-thérapie, aux ateliers d'écriture pour le bien-être. Partout d'autres voix se proposent de sauver la lecture non au nom du savoir ou de la culture, mais comme un loisir, épanouissant et renarcissisant. Aux États-Unis, la célèbre philosophe Martha Nussbaum fait de la lecture des romans une manière d'assurer une «justice poétique[16]» et de nous entraîner au bien —nous voilà donc loin de Bataille pour qui «si la littérature s'éloigne du mal elle devient vite ennuyeuse[17]». L'influente blogueuse américaine Maria Popova décrète que les quatre fonctions de la littérature sont de «vous économiser du temps, vous rendre plus gentil, vous guérir de la solitude et vous préparer à surmonter les échecs[18]». Certains de ses compatriotes, imbus de sciences cognitives, justifient l'usage des romans comme forme d'exercice mental et d'entraînement à la vie sociale. Au nom d'une philosophie néo-darwinienne, on en vient à affirmer l'utilité de la littérature pour réguler les passions collectives et proposer des solutions imaginatives à notre besoin de nous adapter à des situations nouvelles. Quant à Tzvetan Todorov, hier le héraut du formalisme, il redéfinit aujourd'hui les pouvoirs de la littérature en des termes que ne renieraient pas les manuels de développement personnel: la littérature «peut nous tendre la main quand nous sommes profondément déprimés, nous conduire vers les autres êtres humains autour de nous, nous faire mieux comprendre le monde et nous aider à vivre[19]».


Force est donc de constater que la littérature, dans une acception large du mot que nous retiendrons, devient ainsi aujourd'hui communément une médecine de l'âme. On retrouvera cette idée vulgarisée aussi bien dans le projet mené par Régine Detambel de la «bibliothérapie[20]» que dans tel bandeau intitulé «roman antidépresseur» (formule vue sur l'édition de poche de Stéphane Carlier, Les gens sont les gens). Devenir soi-même, acquérir cette fameuse résilience tant vantée, en incorporant à sa vie l'expérience des livres, produire cette «hache qui brise la mer gelée en nous» (Kafka[21]): l'écriture et la lecture ont désormais comme programme d'accompagner cette autonomisation de l'individu à marche forcée dont le sociologue Alain Ehrenberg[22] ou l'anthropologue François Flahault[23] ont fait le syndrome de notre société libérale. D'où la prééminence, dans le champ contemporain, d'une gamme de discours d'autodéfinition et d'autojustification insistant sur l'idée d'une remédiation ou d'une «restitution» de sens au lecteur, pour emprunter une formule déterminante à Dominique Viart[24]. Cette remédiation devient, par défaut, la définition même de l'activité littéraire; l'originalité du champ contemporain est, je crois, non de miser sur des exemples lointains, distants, mais de toujours tendre à associer le lecteur par projection et empathie aux expériences d'autrui, aussi lointaines soient-elles.


On le comprendra: l'objet de cet essai est autant de décrire les formes et les lieux d'intervention de cette littérature (ou de cet usage de la littérature), que ses projets d'action, en insistant aussi bien sur des valeurs d'usages sociaux et individuels que sur des programmes explicites ou des discours de justification. L'idée que la littérature nous soigne et nous rend meilleurs est un mantra contemporain invérifiable et il ne s'agira jamais de porter un jugement sur la réalité, à raison controversée, de l'action de la littérature sur les individus et les sociétés, ni sur les modalités d'action possibles des textes sur les individus, questions qui relèvent de la psychologie ou de la sociologie, et sur lesquelles nous ne possédons que des analyses embryonnaires[25]. En revanche, analyser les discours sur le pouvoir de la littérature, c'est prendre acte du fait que, dans le champ contemporain, la littérature est non une fin en soi, mais un dispositif social ou symbolique puissant opérant sur les consciences et les cœurs. C'est cette opération de transfert affectif et d'intervention interne que le récit emblématique de Maylis de Kerangal, Réparer les vivants a thématisé en 2014 pour toute sa génération en racontant une greffe cardiaque à valeur de métaphore. Ce texte, comme plusieurs centaines d'autres récits explicitement thérapeutiques ou «réparateurs», relève de ce que je voudrais appeler, dans un lointain emprunt à un concept clé de la mystique hébraïque d'Isaac Louria, le tikkun olam (textuellement: «réparer du monde»), une doctrine de la responsabilité et de la réparation du monde.


Plusieurs précisions me semblent nécessaires: parler de la littérature, c'est opérer que l'on s'en garde ou non une essentialisation voire, si l'on attribue à celle-ci des actions, une réification, une anthropomorphisation. Par littérature, j'entendrais ici non une entité ayant une autonomie d'action, non une doxa officielle ou un mouvement littéraire dominant et homogène, non une idée pleinement et explicitement réalisée, mais simplement une idéologie définitionnelle, mais diffuse, parfois, et différemment actualisée par la critique, les paratextes ou le métalangage littéraire. Que cette idée ne soit pas unique, qu'elle ne soit pas forcément univoque, qu'elle soit souvent problématisée, interrogée ou contestée avec vigueur n'est pas contestable. L'objet de cet essai est de démontrer néanmoins la présence, voire le caractère prégnant chez beaucoup d'écrivains et de lecteurs d'un tel usage thérapeutique de la littérature et d'en observer la généalogie et les formulations. Nous manque une histoire de la littérature, comme le regrettait Roland Barthes[26], qui en préciserait non le périmètre, les pratiques et les formes, ni même les définitions, mais plutôt les finalités et qui permettrait de voir le possible infléchissement des pratiques contemporaines. Un tel projet ne saurait se limiter à faire l'histoire du déclin d'une littérature autonomisée comme finalité sans fin et sacralisant sa propre inutilité; rien ne dit au demeurant que repérer toutes les formes où la fiction s'émancipe de la représentation pour se prendre à son propre jeu, les moments où les formes valent en tant que formes, les pratiques de symbolisation centrées sur le moi de l'écrivain, les références internes des textes entre eux, puisse justifier l'existence d'un régime esthétique implicite des lettres antérieur au xixesiècle. Bien des travaux actuels dramatisent la scansion opérée au début du xixesiècle, moment où le mot «littérature» vient se dire comme une activité séparée, un champ particulier (et éminemment marginal) dans l'espace du savoir et des représentations, un milieu et un métier propre. Or cette scansion nous interdit d'user du terme «littéraire» au sens ancien, pour toute forme d'expression antérieure à cette supposée autonomisation et à ses conséquences, le partage net des vocations, des formes de savoir et des types de discours. Telle est par exemple la position de Florence Dupont, qui refuse radicalement l'application du mot «littéraire» aux œuvres antérieures à l'invention du mot par Mmede Staël, au tout début du xixesiècle. Au contraire, penser l'activité littéraire en termes d'usages dans le cadre d'une pragmatique élargie incorporant des activités humaines investissant des supports linguistiques pour des finalités variées (convaincre, séduire, convertir, divertir, etc.) permet non seulement de réintégrer au champ littéraire élargi les actions finalisées (plaire, convaincre, etc.) comme des activités rituelles qu'une définition strictement esthétique aurait écartées. C'est à cartographier des activités d'écriture, individuelles comme collectives, concrètes sans a priori que nous conduit la «dé-essentialisation» contemporaine de la littérature telle que le xixe siècle l'avait imaginée et telle que La NRF l'avait par exemple consacrée. En quittant ce modèle d'ordre religieux de l'écrivain et du lettré qui prévaut encore largement dans les consciences s'ouvre la possible réintégration sur la longue durée des faits du «littéraire» à la richesse des pratiques scripturales et des interventions symboliques, qu'il s'agisse d'en faire une pratique de distinction par la forme ou de réunion rituelle de la communauté — mouvement acté par la substantivation de l'adjectif dans le Dictionnaire du littéraire, publié en 2002 par les sociologues et historiens PaulAron, DenisSaint-Jacques et AlainViala[27]. Lorsque la littérature n'existe plus comme une idée univoque, lorsque le mot désigne presque par homonymie des pratiques différentes, lorsque la critique prend acte des particularismes du sujet et revient chercher chez Barthes non la folie des systèmes, mais la puissance de subjectivation, lorsque l'espace argumentatif s'est dissous dans un débat globalisé et numérisé, c'est l'usage tel que projeté par les écrivains, préparé par leurs médiateurs (critiques, libraires, interprètes, pédagogues) et actualisé par les lecteurs selon des formes variables à des moments qui peuvent eux-mêmes varier, qui doit être étudié. Un tel changement de paradigme nous conduit à faire basculer notre intérêt de la substance aux effets, et d'une définition intransitive à une transitivité. Alors que la littérature d'avant les années1980 pouvait se prévaloir d'une critique endogène, linguistique, technique, et d'un regard sur elle-même informé uniquement par sa propre histoire, c'est en termes d'éthique et de micropolitique des sujets que les contemporains rendent comptent de leurs projets, réintroduisant des formes de conscience du monde et d'autrui qui se donnent comme singulières. Ce sont alors des définitions pragmatiques, comme celle de Richard Shusterman, centrée sur une «expérience littéraire» extrêmement inclusive, et préférant faire confiance aux horizons de lecture plutôt qu'à de supposées propriétés spécifiques qu'il faut invoquer[28].


La littérature remédiatrice ?


L'idée que la littérature ait joué comme un travail de réparation, d'abord en tant que pointe de l'écriture, elle-même pensée comme forme de suppléance de la chose par le signifiant, et donc comme tombeau ou comme rappel de ce qui n'est plus, n'est pas neuve; elle a assurément cohabité avec celle d'un exercice socialement ou moralement utilitaire des lettres dans la rhétorique, organisé depuis la Rhétorique d'Aristote par le trio docere, placere, movere. Comédies et éloges funèbres, chroniques et lettres de consolation, poésie épique et poésie élégiaque se sont superposées et parfois nouées, sans que l'œuvre de glorification et le travail de deuil, la plaisanterie et la protestation contre la fuite du temps, l'éloge du désir et de déploration de l'absence se soient révélés irréconciliables. C'est sans doute à la fin du xviiiesiècle que ce partage s'est ouvert et que l'on trouve peut-être pour la première fois clairement cette antinomie entre une écriture conçue comme adjonction gratuite et jubilatoire ou, au contraire, comme réponse à la finitude et geste de substitution: c'est cette ambivalence du terme de «supplément» tel que Derrida propose de l'analyser chez Rousseau. Cette double fonction, en apparence contradictoire, de la littérature comme jeu, adjonction inutile et pourtant comme comblement nécessaire se lit ainsi en filigrane dans l'analyse du concept de «supplément», considéré dans son double sens d'ajout et de substitut. Surnuméraire, exorbitant, le supplément de la parole littéraire est «suppléant et vicaire […] un adjoint, une instance subalterne qui tient-lieu», commente Derrida, en soulignant que «le signe est toujours le supplément de la chose même[29]». Sans forcément souscrire à ces positions, se dessine dans cette analyse un cadre général nous invitant à réinsérer l'écriture littéraire dans la longue durée des dispositifs, fonctionnellement inutiles, mais symboliquement indispensables, de suppléance et de réparation. Pour le dire autrement, les textes littéraires pourraient être lus sous un double régime: soit celui de finalités dans lesquelles s'inscrit l'œuvre, soit celui d'un travail linguistique et sémantique décontextualisé. Dans le contexte d'analyse critique qui est le nôtre, à la fois profondément informé par des outils de lecture sociologiques, anthropologiques ou historiques et par un modèle esthétique, par une critique externe et une critique interne, la parole littéraire est simultanément analysable selon ces deux modes qui ne sont antinomiques que pour certaines définitions de la littérature lorsque l'on néglige «la propriété qu'a le langage de déborder de toutes parts son investissement esthétique» (Gérard Genette</a>[30]). Le coût de cette antinomie est énorme, puisqu'elle nous conduit à sortir la littérature en régime littéraire de tout rapport à la vérité et à l'action, comme à dénier l'inscription dans l'histoire de la littérature à des formes non littéraires au sens poéticien du terme (l'essai, la biographie, le récit non fictionnel, la poésie scientifique, etc.). Pour éviter cette antinomie écrasante d'un point de vue à la fois diachronique et synchronique, on pourrait proposer de considérer qu'il y a dans toute occupation intensive de la parole, aussi déterminée qu'elle soit par des fins assignables, et dans tout geste de diffusion, conçu comme détachement possible d'un contexte de réception premier, les conditions d'existence de la littérature. Rien n'interdit de proposer alors une lecture littéraire, qui déplace l'évaluation sur un plan formel et réinscrit l'œuvre dans un réseau intertextuel, qu'il soit ou non anticipé par l'œuvre.


«Le tombeau est le père des signes», disait le philosophe Alain: on peut donc admettre que de nombreuses formes littéraires ont peut-être toujours été une forme de comblement face à la finitude du monde et une guérison face aux malheurs des temps, même s'il n'est sans doute pas possible de rapporter l'infinité des usages des arts du langage à une fonction anthropologique unique, comme voudraient le faire les utilitarismes de tous ordres. Je pense aux morales de l'art qui attribuent à la littérature une faculté d'éducation éthique, aux apôtres de l'évolutionnisme littéraire pour lesquels la littérature aurait une fonction adaptative d'ordre quasi biologique, des philosophies du langage comme perte à celles du langage comme réparation. Certes, on ne trouvera guère de mot d'ordre ou d'école littéraire fondée sur la remédiation. Que nombre de ces discours soient implicites n'est assurément pas indifférent et nous dit le dédain dans lequel se trouve encore placé par les héritiers d'une littérature intransitive tout récit circonstancié ou finalisé par un but d'intervention dans le monde, comme l'anathème porté sur toute littérature dont l'amour de la forme et du dispositif ne serait pas la seule surdétermination. Notre sentiment du littéraire reste en effet profondément configuré par l'opposition barthésienne entre l'écrivain, (pour qui «le matériau dev[ient] en quelque sorte sa propre fin», «le pourquoi du monde» s'absorbe «dans un comment écrire» et reste «une question») et des écrivants («hommes “transitifs”» qui «posent une fin (témoigner, expliquer, enseigner)[31]») qui se retrouvent profondément discrédités par un impératif aristocratique de gratuité et d'intransitivité. D'évidence, penser les littératures de la remédiation, c'est essayer d'éviter d'opposer des projets d'écriture qui prennent en charge une question, un sujet, un problème, qui se veulent performations directes ou du moins opérations cognitives à une tradition «littéraire» où c'est l'ambition formelle qui est supposée être le support premier de l'attention du lecteur et le sujet ultime de connaissance. C'est aussi, comme le propose Hélène Merlin-Kajman, tenter de déployer des concepts originaux pour comprendre une littérature privilégiant sur la rhétorique «sa fonction réparatrice[32]», en proposant de la nommer «transitionnelle», par analogie avec le concept bien connu de Donald Winnicott [33]. Si cette réflexion reste à achever, il n'en demeure pas moins qu'elle témoigne d'une tentative de renouvellement catégoriel et du passage d'une théorie philosophique à une théorie psychologique de la littérature. La très forte médiatisation à la rentrée littéraire 2016 du terme d'exofiction pour parler non seulement des biofictions, mais de tout ce qui se situe en rupture avec l'autofiction (le terme est réalité une invention de Philippe Vasset datant de 2011 pour caractériser «une littérature qui mêle au récit du réel tel qu'il est celui des fantasmes de ceux qui le font[34]»: autrement dit ce que les cognitivistes appelleraient une littérature de l'enaction) témoigne donc d'une tendance lourde du récit depuis les années2000: celle non seulement d'un réalisme, d'une attraction vers le document, mais d'un travail de dévoilement et d'intervention herméneutique. En fait, l'exofiction, si l'on adopte ce terme, peut porter sur l'intériorité banale autant que sur l'existence éloignée: ce qui la caractérise, c'est de faire du travail de la langue le moyen d'une opération psychique visant à retravailler savoirs et croyances.

C'est donc prendre le risque de modifier des périmètres bien connus, de rapprocher les écritures nativement littéraires d'écritures ordinaires. C'est l'occasion de s'interroger de manière critique sur nos critères traditionnels de littérarité et de déverrouiller le fanatisme de la littérature qui interdit de voir ce que l'œuvre peut effectivement opérer psychologiquement, en retrouvant exactement le problème posé au début de L'Art comme expérience par John Dewey:

De plus, la perfection même de certains de ces produits, le prestige qu'ils possèdent en raison d'une longue histoire reposant sur une admiration indiscutée créent des conventions qui font obstacle à un regard nouveau sur les œuvres. […]

Une première tâche s'impose donc à celui qui entreprend d'écrire sur la philosophie des beaux-arts. Il s'agit de restaurer cette continuité entre ces formes raffinées et plus intenses de l'expérience que sont les œuvres d'art et les actions, souffrances, et événements quotidiens universellement reconnus comme des éléments constitutifs de l'expérience[35].

Qu'on y prenne garde: décrire ces discours salvateurs, thérapeutiques ou régulateurs dans toutes leurs modulations, ces interventions, ne constitue en rien pour moi une manière de les justifier ou même d'y adhérer, et ce d'autant moins que ces métadiscours se placent souvent sur un mode autocritique, qu'ils ne se départissent que rarement d'un soupçon et d'une conscience des limites du langage nourrie par la crise de l'humanisme littéraire au xxesiècle, qu'ils font débat entre les écrivains eux-mêmes. Je ne sais pas si les élans lyriques de Pierre Michon dans les Vies minuscules pourront, comme l'auteur le rêve, rendre par la parole la vie à des enfants morts trop jeunes; je ne sais pas si le projet de Carrère de témoigner pour les victimes de la maladie ou du tsunami est autre chose qu'une pose pour sortir de l'isolement esthétique; j'ignore si AnnieErnaux ou ses lecteurs se sont sentis mieux par la mémoire qu'elle a offert à un monde en train de disparaître; je ne sais pas si la volonté de François Bon de rendre visibles les oubliés, les infâmes de l'ordre social, fait sens. Je ne sais pas même s'il prépare et constitue la possibilité d'une action d'ordre politique ultérieure, ou même d'une attention empathique pouvant présider à des formes ordinaires de soin. Je ne sais si Jean Rouaud parviendra à «combler l'espace béant entre les mots et les choses» par la littérature ou Patrick Deville à «sauver» par des récits biographiques les dix milliards d'individus ayant habité sur cette terre. D'une part, de telles options suscitent des réticences et des contre-discours faisant de l'art une manière non de suturer, mais au contraire de maintenir les fractures ouvertes ou rappelant simplement son impuissance (ainsi d'un Olivier Cadiot ironisant dans son Histoire de la littérature récente: «On dit souvent que la littérature est une thérapie, mais pas du tout. Ce n'est pas ça, absolument pas. Recopier ne soigne rien; on ne supporte pas mieux les choses en les dédoublant par des mots — comme si ça irait mieux en le disant[36].»). D'autre part, la mesure de l'action de la littérature est un champ de recherche à peine esquissé par les sciences cognitives et les sciences de l'affect[37] et les concepts endogènes aux études littéraires qui les accompagnent, comme la catharsis, la symbolisation, sont encore sujets de débat: ce sont des discours, des souhaits, des programmes, des intentions plutôt que des effets concrets quantifiables que l'histoire littéraire peut et doit décrire. C'est ce que j'entreprendrai de faire à partir d'un corpus littéraire nécessairement très récent, ainsi que des discours métatextuels, médiatiques et sociaux, l'accompagnant: ce travail s'apparente largement à une histoire littéraire du xxiesiècle. Définir d'abord une œuvre par rapport au devenir du monde plutôt qu'à celui de la littérature, l'inscrire dans la logique d'un travail sur soi et sur autrui, lui demander de fournir des formes substantielles de savoir historiques ou politiques, lui demander de rendre compte d'une vérité à elle seule accessible ou d'opérer une expérimentation philosophique dans les possibles, plutôt qu'une expérience linguistique, sont des options littéraires très marquées. Que ces orientations soient désormais majoritairement celle des œuvres littéraires françaises contemporaines, qu'elles en définissent les valeurs, qu'elles en garantissent la légitimité, exige d'être pensé.



Alexandre Gefen (2017)




[1] Pierre Michon, Mythologies d'hiver, Paris, Verdier, 1997, quatrième de couverture.

[2] Richard Millet, L'Enfer du roman: réflexions sur la postlittérature, Paris, Gallimard, 2010.

[3] Voir Charles Taylor, L'Âge séculier [2007], trad. de l'anglais par Patrick Savidan, Paris, Éd. du Seuil, coll. «Les Livres du nouveau monde», 2011.

[4] Voir Dominique Viart et Bruno Vercier, La Littérature française au présent: héritage, modernité, mutations, 2e éd. augm., Paris, Bordas, 2008, p.16.

[5] Antoine Compagnon, La Littérature, pour quoi faire? Leçon inaugurale prononcée le jeudi 30novembre2006, Paris, Collège de France, coll. «Leçons inaugurales du Collège de France», no188, septembre 2013; URL: http://books.openedition.org/cdf/524.

[6] Pierre Jourde, «À quoi sert à la littérature (2)», blog «Confitures de culture», L'Obs,11mars2009, URL: http://pierre-jourde.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/03/11/a-quoi-sert-la-litterature-2.html.

[7] Patrick Modiano, Conférence Nobel, 7 décembre 2014, p.12, URL: http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2014/modiano-lecture_fr.pdf.

[8] Maurice Blanchot, L'Espace littéraire [1955], Paris, Gallimard, coll. «Folio essais», 1996, p.12; Alain Robbe-Grillet, Pour un nouveau roman, Paris, Éd. de Minuit, 1963, p.42.

[9] Pierre Michon, Le Roi vient quand il veut, Paris, Albin Michel, 2007, p.56.

[10] Dominique Viart, «En lieu et place des sans-voix», in «Ce que la littérature sait de l'autre», dossier coordonné par A.Gefen, Le Magazine littéraire, no526, novembre2012, p.78.

[11] Pour emprunter une célèbre formule à Nicolas Bourriaud, L'Esthétique relationnelle, Dijon, Les Presses du réel, 1998.

[12] Voir Régis Jauffret, Claustria: roman, Paris, Éd. du Seuil, coll. «Cadre rouge», 2012, ou le récit d'Alexandre Seurat s'inspirant de l'affaire Marina Sabatier dans La Maladroite, Arles, Éd. du Rouergue, 2015.

[13] Expression issue d'une intervention retranscrite dans «L'extrême contemporain: question de roman», Po&sie, no41, 1986, p.16-22, et citée par Bruno Thibault, «“À l'écoute de ceux qui sont à la traîne”: le récit dialogué dans Adieu et dans Viol de Danièle Sallenave», in Michael Bishop et Christopher Elson (éd.), French Prose in 2000, Actes du Colloque international sur la littérature française et francophone (Dalhousie University, septembre1998), Amsterdam et New York, Rodopi, coll. «Faux titre», 2002, p.117-123.

[14] Régis Jauffret, Lacrimosa: roman, Paris, Gallimard, 2008, p.216. Le roman raconte le dialogue avec une jeune suicidée, par ailleurs maîtresse de l'écrivain.

[15] Laurent Demanze, Encres orphelines: Pierre Bergounioux, Gérard Macé, Pierre Michon, Paris, José Corti, coll. «Les Essais», 2008.

[16] Voir Martha Nussbaum, Poetic Justice: The Literary Imagination and Public Life, Boston, Beacon Press, 1995.

[17] Georges Bataille, entretien télévisé avec Pierre Dumayet («Lectures pour tous»), au sujet de La Littérature et le Mal, 21 mai 1958; en ligne sur le site de l'INA, URL: http://www.ina.fr/video/I00016133/georges-bataille-a-propos-de-son-livre-la-litterature-et-le-mal-video.html.

[18] Maria Popova, «What Books Do for the Human Spirit: The Four Psychological Functions of Great Literature», blog Brainpickings, 9octobre2014, URL: https://www.brainpickings.org/2014/10/09/school-of-life-literature-reading/. Je traduis.

[19] Tzvetan Todorov, La Littérature en péril, Paris, Flammarion, coll. «Café Voltaire», 2007, p.72.

[20] Voir Régine Detambel, Les livres prennent soin de nous: pour une bibliothérapie créative, Arles, Actes Sud, 2015

[21] Franz Kafka, lettre à Oskar Pollak du 27janvier1904, in id., Œuvres complètes, t.III, éd. présentée et annotée par Claude David, trad. par Marthe Robert, Claude David et Jean-Pierre Danès, Paris, Gallimard, «Bibliothèque de la Pléiade», 1984, p.575.

[22] Alain Ehrenberg, La Fatigue d'être soi: dépression et société, Paris, Odile Jacob,&#8206; 1998. Voir aussi Simon Lemoine, Le Sujet dans les dispositifs de pouvoir, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. «Essais», 2013.

[23] François Flahault, Be yourself! Au-delà de la conception occidentale de l'individu, Paris, Mille et une nuits,&#8206; 2006.

[24] Voir Dominique Viart, «Le silence des pères au principe du “récit de filiation”», Études françaises, vol.45, no3, 2009, URL: http://id.erudit.org/iderudit/038860ar.

[25] Voir notamment la tentative de synthèse perplexe tentée par Suzanne Keen, Empathy and the Novel, Oxford, Oxford University Press, 2007, p.xix et suiv.

[26] Roland Barthes, «La littérature, aujourd'hui» [1961], in Essais critiques [1964], Œuvres complètes, nouv. éd. revue, corrigée et présentée par Éric Marty, tomeII (1962-1967), Paris, Éd. du Seuil, 2002, p.269-528 (livre), 411-421 (article), en particulier p.413.

[27] PaulAron, DenisSaint-Jacques et Alain Viala (dir.), LeDictionnaire du littéraire, Paris, PUF, 2002.

[28] Voir Richard Shusterman, L'Objet de la critique littéraire [1984], trad. de l'anglais par Nicolas Vieillescazes, Paris, Questions théoriques, coll. «Saggio Casino», 2009, p.53.

[29] Jacques Derrida, De la grammatologie, Paris, Éd. de Minuit, coll. «Critique», 1967, p.208. C'est l'auteur qui souligne.

[30] Gérard Genette, Fiction et diction, Paris, Éd. du Seuil, coll. «Poétique», 1991, p.12.

[31] RolandBarthes, «Écrivains et écrivants» [1960], in Essais critiques, éd. citée, p.403-410, cit. p.404, 405, 407.

[32] Hélène Merlin-Kajman, Lire dans la gueule du loup: essai sur une zone à défendre, la littérature, Paris, Gallimard, coll. «NRF essais», 2016, p.271. Voir aussi L'Animal ensorcelé. Traumatismes, littérature, transitionnalité, Paris, Ithaque, 2016.

[33]Ibid., p.272.

[34] Philippe Vasset, «L'Exofictif», Vacarmes, no54, hiver2011, URL: http://www.vacarme.org/
article1986.html. Voir, par exemple, les commentaires de Mathilde de LaChalonge, «De la fiction à la biographie, l'exofiction, un genre qui brouille les pistes», site «ActuaLitté: les univers du livre», 10 août 2016, URL: https://www.actualitte.com/article/monde-edition/de-la-fiction-a-la-biographie-l-exofiction-un-genre-qui-brouille-les-pistes/66392.

[35] John Dewey, L'Art comme expérience [1931], trad. de l'anglais (États-Unis) coordonnée par Jean-PierreCometti, présentation de l'édition française par Richard Shusterman, postface par Stewart Buettner, Paris, Gallimard, coll. «Folio essais», 2014, p.29-30. Sur l'application de Deweyaux formes artistiques contemporaines, voir Yaël Kréplak, «Le continuisme deweyen à l'épreuve des situations. De l'art comme expérience aux pratiques artistiques en interaction», in Jean-Pierre Cometti et GiovanniMatteucci (éd.), Après «L'Art comme expérience»: John Dewey dans le débat contemporain, Paris, Questions théoriques, 2016; URL: http://www.academia.edu/28340428/Kreplak_Apre_s_lArt_comme_expe_rience_Le_
continuisme_deweyen_a_le_preuve_des_situations.pdf.

[36] Olivier Cadiot, Histoire de la littérature récente, tomeI, Paris, P.O.L., 2016, p.10.

[37] Je renvoie à notre première approche: Alexandre Gefen, Carole Talon-Hugon et Mathilde Bernard (dir.), Arts et émotions: un dictionnaire, Paris, Armand Colin, 2016.





Alexandre Gefen

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Dernière mise à jour de cette page le 7 Décembre 2017 à 9h11.