Atelier



Journée Penser la poésie, organisée à Lyon (ENS-Lettres et Sciences Humaines) le 15 mars 2008 par Michèle Gally dans le cadre du GDR « Théories du poétique. XIVe-XVIe »


Lecture seiziémiste d'une synthèse récente sur "la poésie", notes de la communication de Michel Jourde.



Lecture seiziémiste d'une synthèse récente sur "la poésie".

La poésie et la poétique du XVIe siècle sont bien représentées dans l'anthologie et dans la synthèse de Hugues Marchal (La Poésie, Paris, Flammarion, coll. "GF Corpus", 2007). L'intérêt pour moi: non pas mesurer ce qui est dit et ce qui n'est pas dit du XVIe s. mais observer le XVIe s. Dans cette situation «comparatiste» (dans le temps et dans l'espace) c'est la question de la «comparabilité» qui est en jeu. Apprendre ainsi quelque chose sur le XVIe s. «pensant la poésie».

Le mot «poésie» comme «nom d'un débat». Le livre expose ce débat selon ses grands principes de structuration, tout en demeurant très attentif à décrire l'historicité de ce débat: par exemple le débat sur l'identité entre poésie et forme versifiée : pas du tout le même sens au XVIe et au XIXe siècle. Cependant, ce prisme du «débat» est une approche moderne (cf. la notion moderne de «crise» de la poésie).

D'où une ambivalence particulièrement fructueuse: le XVIe siècle comme moment d'actualisation d'un débat pérenne sur la poésie, mais aussi comme moment, comme prise de position dans un débat qui a fait l'histoire de la poésie (le XVIe conteste des définitions plus anciennes de la poésie et inversement il participe d'une définition de la poésie qui sera contestée plus tard). Exemple: Ronsard et la poésie comme «fureur» vs Pope se moquant au XVIIIe s de la poésie «rhume de cerveau»; mais Ronsard lui-même dénonce parfois le discours de la fureur comme un discours idéalisant sur la poésie, nécessaire pour affirmer le statut social du poète, mais à ne pas prendre au premier degré.

Grâce à cette approche, quelques éclairages sur la manière dont le XVIe s. a «pensé la poésie»:

- cette mise en dialogue des poétiques dans le temps et l'espace conduit à nuancer l'idée d'une simple inscription, à la Renaissance, de la poétique dans le cadre rhétorique.

- comment s'écrit la poétique au XVIe s: une part de prises de position théoriques (l'expression de choix philosophiques parfois tranchés, conflictuels…), mais aussi une forme cumulative, où il s'agit de constituer et de reprendre un ensemble mobile et fractionnable d'énoncés sur la poésie, qui vise à en affirmer la valeur (cf. le rôle des commentaires d'Horace ou d'Aristote).

Demeure la question des ruptures historiques, qu'une telle présentation tend nécessairement à minorer. Proposition: si les débats qui structurent la «pensée de la poésie» demeurent, c'est peut-être l'espace du débat qui s'est modifié, en particulier avec l'affirmation moderne d'un champ littéraire autonome. «Défendre la poésie»au sein d'un champ littéraire, ce n'est pas la même chose que la «défendre» à fin de faire exister ce champ littéraire et d'affirmer la légitimité culturelle d'une langue vernaculaire. Intérêt d'une enquête, à ce sujet, sur les résurgences au XXe siècle des expressions, courantes au XVIe s, «condition du poète», «condition poétique»: parle-t-on de la même chose (ambivalence entre l'existentiel et le sociologique)?

En conclusion, deux textes (Requeste des dames de Toulouse, 1555, et Journal de voyage de Montaigne, sur Divizia, paysanne illettrée composant des poèmes) témoignant de conflits sur la définition et sur la valeur de la poésie et rattachant ces conflits à des questions centrales au XVIe siècle (légitimité des différentes langues, légitimité culturelle des différentes conditions sociales, dissymétrie entre le masculin et le féminin…).


Notes de la communication de Michel jourde

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Michel jourde

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Dernière mise à jour de cette page le 10 Juin 2008 à 20h15.