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Du point de vue théorique, la notion de style connaît des acceptions variées, de l'évaluation positive («Ce roman a du style.») à sa définition neutre comme «versant d'exemplification» du langage. Dans les termes de Gérard Genette (relisant Nelson Goodman) : «Le style est le versant perceptible du discours, qui par définition l'accompagne de part en part sans interruption ni fluctuation. Ce qui peut fluctuer, c'est l'attention perceptuelle du lecteur, et sa sensibilité à tel ou tel mode de perceptibilité. (...) Il n'y a pas dans un texte de mots ou de phrases plus stylistiques que d'autres ; il y a sans doute des moments plus ‘frappants' (le déclic spitzérien), qui bien entendu ne sont pas les mêmes pour tous, mais les autres sont a contrario frappants par leur remarquable absence de frappe, car la notion de contraste, ou d'écart, est éminemment réversible. Il n'y a donc pas le discours plus le style, il n'y a pas plus de discours sans style que de style sans discours : le style est l'aspect du discours, quel qu'il soit, et l'absence d'aspect est une notion manifestement vide de sens.» (Fiction et Diction, Seuil, 1991, p. 135.) L'usage dominant de la notion apparaît en fait comme un usage moyen : le style tel qu'il est généralement mobilisé par les études littéraires ne peut pas être reconduit à l'exemplification goodmanienne, sans pour autant se réduire à l'approbation donnée à la bonne forme subjective – l'authenticité de l'écriture – de telle œuvre. La part de l'évaluation dans cet usage commun tient manifestement à ce que le style fonctionne comme une condition de possibilité de l'herméneutique littéraire. Ce qui n'est pas sans conséquences pratiques : situé en amont de l'étude proprement dite des textes, il sera par là impensé. Idée régulatrice du commentaire, la notion de style tend à n'être jamais véritablement interrogée comme telle.

Christelle Reggiani

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Dernière mise à jour de cette page le 8 Juin 2002 à 9h20.