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Ovide, Amores, I,3 Traduction d'Henri Bornecque , Belles Lettres, 2002 (6ème tirage)

Juste est ma prière : la femme dont je suis depuis peu la conquête doit m'aimer ou faire que je l'aime toujours. Mais j'ai trop demandé : qu'elle se laisse seulement aimer et la déesse de Cythère aura exaucé toutes mes prières. Accepte un amant qui soit ton esclave pendant de longues années, un amant qui sache aimer d'un cœur pur et fidèle. Si je n'ai pas,pour me recommander, l'illustre noblesse des vieilles familles, si mon ancêtre le plus reculé n'était qu'un chevalier, si pour retourner mes champs, je n'ai pas besoin d'innombrables charrues, si mon père et ma mère doivent régler la dépense avec économie, moi j'ai pour alliés Phébus et ses neuf compagnes et le dieu qui inventa la vigne, et l'Amour aussi qui me donne à toi, et une fidélité à nulle autre seconde, une conduite irréprochable, une franchise sans détours et la pudeur qui empourpre ma joue. Non, je n'aime pas cent femmes, je ne suis pas un voltigeur d'amour ; c'est toi, tu peu m'en croire, qui seras toujours l'objet de mes soins. C'est auprès de toi que je souhaite le bonheur de vivre les années que m'assure le fil des Parques, toi dont je veux que soit pleurée ma mort. Consens à être la matière féconde de mes poésies, et mes poésies naîtront dignes de leur sujet. C'est la poésie qui a rendu célèbres Io, effrayée de se voir pousser des cornes, et la beauté qu'un amant abusa sous la forme d'un cygne, et celle qui, passant la mer sur un faux taureau, tenait de sa amin virginale les cornes recourbées. Mes vers aussi, on les chantera par toute la terre, et toujours mon nom sera uni au tien.

Iusta precor: quae me nuper praedata puella est,
aut amet aut faciat, cur ego semper amem!
a, nimium volui—tantum patiatur amari;
audierit nostras tot Cytherea preces!
Accipe, per longos tibi qui deserviat annos;
5 accipe, qui pura norit amare fide!
si me non veterum commendant magna parentum
nomina, si nostri sanguinis auctor eques,
nec meus innumeris renovatur campus aratris,
temperat et sumptus parcus uterque parens—
10 at Phoebus comitesque novem vitisque repertor
hac faciunt, et me qui tibi donat, Amor,
et nulli cessura fides, sine crimine mores
nudaque simplicitas purpureusque pudor.
non mihi mille placent, non sum desultor amoris:
15 tu mihi, siqua fides, cura perennis eris.
tecum, quos dederint annos mihi fila sororum,
vivere contingat teque dolente mori!
te mihi materiem felicem in carmina praebe—
provenient causa carmina digna sua.
20 carmine nomen habent exterrita cornibus Io
et quam fluminea lusit adulter ave,
quaeque super pontum simulato vecta iuvenco
virginea tenuit cornua vara manu.
nos quoque per totum pariter cantabimur orbem,
25 iunctaque semper erunt nomina nostra tuis.



Sophie Rabau

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Dernière mise à jour de cette page le 20 Novembre 2005 à 11h55.