Questions de société
Universités: la revanche de l'étudiant Sarkozy ? (Mediapart & Le Monde, maj 06/03/09)

Universités: la revanche de l'étudiant Sarkozy ? (Mediapart & Le Monde, maj 06/03/09)

Publié le par Frédérique Fleck (Source : mediapart)

Médiapart:

Universités: la revanche de l'étudiant Sarkozy

Texte d'Alain Garrigou, professeur de science politique à l'université de Paris X - Nanterre

D'où vient le mépris affiché par le président de la République à l'endroit de l'Université? Car le discours du 22 janvier n'est pas un accident: il s'inscrit dans une longue série de propos montrant son contentieux personnel avec les sciences et la culture. Bulletins de notes à l'appui, Alain Garrigou, professeur de sciences politiques à Paris-X, montre que ce rapport conflictuel date du temps où le chef de l'Etat était étudiant à Nanterre justement.


Les propos de Nicolas Sarkozy sur l'université et la recherche trahissent une implication personnelle qui n'obéit pas seulement à la centralisation présidentielle du pouvoir. Il ne suffit pas de mettre en cause les conseillers et la plume du discours du 22 janvier 2009 sur « une stratégie nationale de recherche et d'innovation » alors que des passages improvisés de cette allocution prennent un ton acrimonieux et que bien d'autres interventions confirment un solide ressentiment. Pendant sa campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy s'en prenait par exemple à celui qui avait mis la princesse de Clèves au programme du concours d'administration centrale : « Un sadique ou un imbécile, choisissez, avait mis dans le programme d'interroger les concurrents sur la princesse de Clèves. Imaginez un peu le spectacle » (23 février 2007 à Lyon). Depuis, les propos méprisants se sont multipliés contre les scientifiques ou des sciences. En février 2008, la mise en place d'une commission présidée par le professeur Guesnerie, visait à donner une caution académique aux reproches adressés à un enseignement qui négligerait l'entreprise, accorderait trop de place à la macroéconomie et à la sociologie et préparerait, on le devine, à des pensées politiquement subversives. Toutefois, la commission Guesnerie conclut à une excellente qualité d'ensemble des manuels. Les attaques contre la section économique et sociale ont néanmoins continué en prenant parfois le ton du persiflage au nom d'une compétence peu évidente. Ainsi, le 27 janvier 2009, Nicolas Sarkozy ressassait-il son hostilité devant un nouveau public : « Il y a une filière économique pour vos enfants. C'est une blague. Mettez vos enfants dans la filière ES, ils ne pourront pas se permettre de se présenter dans les meilleures écoles économiques ».


Titres de compétence ? Les sociologues savent bien que les jugements en disent souvent plus sur leurs auteurs que sur les choses dont ils parlent. Or les études de Nicolas Sarkozy n'ont pas été si brillantes ni spécialisées qu'elles l'autorisent à juger de haut les questions d'orientation scolaire et de pédagogie. Par contre, elles ont été assez médiocres pour nourrir son ressentiment personnel qui, en affinité avec l'humeur anti-intellectuelle des milieux qui le soutiennent, explique largement la « petite guerre » faite aujourd'hui aux scientifiques et universitaires.

Lire la suite de l'article sur le site mediapart.

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Nanterre dément les rumeurs d'échec de Nicolas Sarkozy au DEA

Claire Ané LEMONDE.FR | 06.03.09

En pleine mobilisation des enseignants-chercheurs, un texte du professeur de sciences politiques Alain Garrigou,titré "Sarkozy et l'université – la revanche personnelle d'un cancre",s'est taillé un certain succès sur la blogosphère. Publié par le sitede la Fondation Copernic et Mediapart, il y explique la "petite guerre" livrée par le chef de l'Etat aux scientifiques et aux universitaires par ses études "assez médiocres".Il rappelle ainsi que Nicolas Sarkozy a étudié à l'IEP de Paris maisn'en a pas obtenu le diplôme, exhume un document montrant qu'il aobtenu de justesse son certificat d'aptitude à la profession d'avocat,et, principale nouveauté, jette le doute sur l'obtention de son DEA desciences politiques, suivi à Paris X-Nanterre durant l'année scolaire1978-1979, alors que la biographie présidentielle, sur le site de l'Elysée, précise, sans toutefois le dater, que le diplôme a été obtenu "avec mention".

Alain Garrigou, qui enseigne à Nanterre depuis 1992 , indique y avoir entendu des anciens dire que Nicolas Sarkozy avait été "collé".Peu avant l'élection présidentielle de 2007,  le professeur de sciencespolitiques a sollicité le président de l'université, qui a fait étatd'un document attestant du diplôme. "Mais il y a quelques mois, je suis allé cherché ce qui constituerait une véritable preuve : le procès-verbal de délibération [du jury], dans les archives de l'université, auxquelles je n'ai normalement pas accès",explique-t-il. Il y a trouvé le PV de la première session (reproduitci-dessus), où on lit que M. Sarkozy avait obtenu en séminaires lesnotes de 15, 17 et 16, mais n'avait pas passé l'épreuve écrite, ni lemémoire – comme beaucoup d'autres élèves. "Mais le PV de la deuxième session, en février 1980, est le seul qui manque sur quarante années d'existence du DEA", assure M. Garrigou.

UNE MENTION "ASSEZ BIEN"

Contactés par Le Monde.fr, plusieurs enseignants du DEA se sontdéclarés dans l'incapacité de dire si Nicolas Sarkozy avait oui ou nonobtenu son diplôme. Hugues Portelli, alors professeur à Paris X, devenudepuis sénateur UMP, se souvient d'une conversation lors de la campagneprésidentielle avec l'universitaire Pierre Avrilet Nicolas Sarkozy : le premier se rémémorait avoir été le directeur dethèse du second. Pierre Avril précise de son côté que le chef de l'Etatavait en effet projeté une thèse sur les barons du gaullisme, mais yavait renoncé après son élection à la mairie de Neuilly, en 1983. Ilajoute avoir été membre du jury de mémoire de DEA de Nicolas Sarkozy, "avec René Rémond",ancien président de l'université et directeur du mémoire. Une précisionqui surprend M. Garrigou et l'université, qui n'exclut pas uneconfusion avec René de Lacharièrre, alors enseignant du DEA. Pierre Avril se souvient en tout cas que "Nicolas Sarkozy avait obtenu une très bonne note".

L'université a de son côté indiqué au Monde.fr, après recherches,que Nicolas Sarkozy a en fait obtenu son diplôme à la sessiond'octobre-novembre 1980, en conservant le bénéfice de ses notes deséminaires de l'année précédente, et avec 6 à l'examen écrit, et 16 aumémoire. Soit une moyenne de 14, correspondant à la mention "assezbien". Alain Garrigou souligne que pour terminer son diplôme l'annéesuivante, il faut obtenir une dérogation, "ce qui n'arrive que dans des cas exceptionnels"... L'université indique pour sa part que ce n'est pas si rare. Et devait publier un communiqué sur l'affaire, vendredi 6 mars.

Claire Ané