Questions de société
Un chercheur - V. Geisser - menacé de sanctions, revue de presse, communiqués & pétitions (maj 15/06/09)

Un chercheur - V. Geisser - menacé de sanctions, revue de presse, communiqués & pétitions (maj 15/06/09)

Publié le par Bérenger Boulay

Ci-dessous:

- Liens (maj 15/06/09)

- Un chercheur menacé de sanctions : bronca au CNRS (Rue89 | 08/06/2009)

- LETTRE OUVERTE A MME VALÉRIE PÉCRESSE, MINISTRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE - Pétition

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Liens :

Site du réseau Terra:

  • Lettre ouverte à Madame Catherine Bréchignac,Présidente du CNRS, avec copie à Mme Valérie Pécresse, Ministre del'Enseignement supérieur et de la Recherche : http://www.reseau-terra.eu/article....

SLU:

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Un chercheur menacé de sanctions : bronca au CNRS

http://www.rue89.com/2009/06/08/un-chercheur-menace-de-sanctions-bronca-au-cnrs

Par Chloé Leprince | Rue89 | 08/06/2009

Des poids lourds du monde universitairefrançais tels qu'Edgar Morin, Etienne Balibar, Olivier Roy, PascalBoniface, Esther Benbassa et d'autres qui signent en vingt-quatreheures une pétition de soutien d'un chercheur CNRS sous le coup d'une procédure disciplinaire : la rapidité de la mobilisation avait de quoi interpeller.

Esther Benbassa, universitaire et par ailleurs blogueuse occasionnelle sur Rue89 , a ainsi réuni pas moins d'une cinquantaine de noms pour prêter main forte à Vincent Geisser, spécialiste de l'islam et de la diversité depuis 1991. Même l'ancienne directrice des sciences humaines au CNRS (longtemps supérieur hiérarchique de Geisser) a signé la pétition qui continue de circuler.

Cet universitaire est en effet convoqué le 29 juin devant un conseilde discipline au CNRS. Il risque un blâme, mais les pétitionnaires enont fait « une position de principe sur une mesure inadéquate », commel'a expliqué à Rue89 Edgar Morin .

Ce que son comité de soutien craint, c'est en réalité une sanctionqui ferait jurisprudence et qu'on oblige pour de bon les chercheurs audevoir de réserve.

Un « fonctionnaire défense » qui surveille certains travaux des chercheurs

A l'origine du problème, il y a un conflit entre deux personnes ausein du CNRS. L'un est chercheur, c'est Vincent Geisser. L'autre estingénieur général de l'armement et « fonctionnaire sécurité défense »au CNRS depuis 2003, après un temps à la Défense et d'autres missionsinterministérielles.

Ce « fonctionnaire défense », dontplusieurs pétitionnaires ont appris l'existence à l'occasion de ceconflit, se nomme Jospeh Illand. C'est lui qui signe par exemple lesordres de mission à l'étranger des chercheurs du CNRS, lui aussi quiest chargé officiellement de la veille sécuritaire sur le patrimoinescientifique.

En clair : protéger les recherches hexagonales d'une doubleallégeance possible ou d'éventuelles vélléités d'espionnage. Il a ainsirécemment refusé l'accueil d'une douzaine de chercheurs étrangers.

Le bras de fer entre Vincent Geisser et Joseph Illand remonte à2004. Geisser, 36 ans à l'époque, entreprend une enquête sur la placedes chercheurs maghrébins dans les travaux français.

« On m'accuse d'infiltrer le CNRS avec un “lobby islamique” »

Statistiques et fichiers à composante ethnique obligent, le projetdoit avoir l'aval de la Cnil et l'autorisation tarde. Joseph Illanddemande à rencontrer Vincent Geisser, qui raconte à Rue89 avoir passé« deux heures à lui expliquer le principe d'une enquête » :

« Et puis quand l'entretien a été terminé, il m'a ditqu'il avait d'autres questions à me poser. Il a sorti un dossier avec,notamment, des extraits de prises de position personnelles antérieures.Il m'a demandé de m'expliquer.

J'ai trouvé ce mélange des genres étrange, même si je viens d'unefamille de militaires. Puis il a envoyé à mon directeur de laboratoireun mail pour lui demander de classer mes recherches comme « sujetsensible ».

Petit à petit, j'ai compris ce qu'on me reprochait, d'infiltrer le CNRS avec un « lobby islamique ». »

L'intéressé continue de trouver cela « d'autant plus ridicule que jene suis même pas musulman ». Les choses se corsent à partir du 4 avrildernier, date à laquelle Geisser envoie un mail au comité de soutiend'une étudiante allocataire de recherche à qui le CNRS vient de supprimer son allocation parce qu'elle est voilée comme l'avait raconté Rue89.

Le chercheur reconnait avoir réagi excessivement… mais en privé

Ce texte est publié sur un blog -sans son accord, dira Geisser. Extrait :

« Le FD [fonctionnaire défense, ndlr] est un idéologuequi traque les musulmans et leurs “amis”, comme à une certaine époque,on traquait les Juifs et les Justes. Le FD constitue des dossierssécuritaires sur un nombre de chercheurs du CNRS afin de les fairesanctionner.

Sa cible privilégiée ? Les chercheurs travaillant sur le monde arabeet musulman, mais aussi les chercheurs ayant des accointances avecl'islam. »

La formule est discutable et peut inspirer une certaine prudence.D'ailleurs, le chercheur reconnaît aujourd'hui que c'est « peut-être unpeu excessif ». Mais il soutient que ce texte n'avait pas vocation àcirculer sur ce blog : « Mon numéro de téléphone figure en bas, jecommence par “bonjour”, c'est bien que c'était une correspondanceprivée. »

Pourtant, alors que Esther Benbassa y voit un relents de« maccartysme », Joseph Illand ne l'entend pas ainsi. Interview fortconcise ce lundi matin à Rue89 :

« C'est très frustrant mais je ne peux rien vous dire.Outre la procédure administrative, il y aura une procédure au pénal,vous verrez. C'est confidentiel, on me demande de ne rien dire.

Chacun son style, tout ce que je dirai, c'est que c'est la premièrefois que j'essuye une attaque aussi dure sur ma personne. D'autres casde sanctions concernaient plutôt le négationnisme, ce genre de choses. »

« Morin, Edgar Morin ? Il a signé ? C'est n'importe quoi ? »

C'est vers son avocate, Me Cousin, que le fonctionnaire défenserenvoie. Laquelle confirme à Rue89 qu'une plainte vient bien d'êtredéposée. Plutôt agacée par « l'ampleur que ça prend » :

« Morin, Edgar Morin ? Il a signé ? C'est n'importequoi, je perds mes dernières illusions. Nos intellectuels sont en trainde se fourvoyer ! »

Difficile de savoir précisément ce que le fonctionnaire défensereprochait concrètement à Vincent Geisser maintenant que la doubleprocédure est en cours. Evidemment, nul mention par téléphone d'unquelconque « lobby islamique ».

Pour le directeur de l'Iris, Pascal Boniface , qui connaît bien Geisser, c'est « tout simplement ridicule » et « caricatural pour l'armée » :

« Même si je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'ilécrit, dire que Vincent Geisser crée un lobby islamique est grotesque.J'ose croire qu'il s'agit d'un acharnement individuel de la part d'unfonctionnaire un peu obtus et à contre-temps qui se laisse emporter.

Pas d'une quelconque politique digne de ce nom. Ce serait beaucouptrop grave et beaucoup trop stupide, alors que le gouvernement estplutôt pluss ouvert à l'opinion issue de la diversité. »

A lire aussi sur Rue89 et sur Eco89

Ailleurs sur le Web

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LETTRE OUVERTE A MME VALÉRIE PÉCRESSE, MINISTRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE - Pétition
L'influence des savants et desintellectuels est certes quelque peu en déclin dans notre nouveaumodèle de société. Chercheurs, universitaires et intellectuels n'encontinuent pas moins de creuser leur sillon, faisant fi du bruit et dela fureur extérieurs. Ce qui ne signifie pas qu'ils vivent dans desbulles hors du monde. Au contraire, ils sont plus investis que jamaisdans la mission qui est la leur : contribuer avec d'autres à apporter àleurs concitoyens cet élément de pensée critique indispensable à lapréservation de la démocratie. Grâce aux réseaux qu'ils tissent par lacirculation de leur pensée et de leur parole, au-delà des préjugés, desmythes ou des frayeurs en vogue et de leur instrumentalisation, ilsn'ont de cesse d'agir au nom de la liberté et de l'impartialité,quelles que puissent être par ailleurs leurs éventuelles appartenancesreligieuses ou affinités politiques. Nos sociétés, trop souventsoumises aux diktats des médias et de l'internet, ont besoin de cetteparole libre, au seul service des principes de la démocratie, évoluantsans entraves et produisant du savoir, de la connaissance et de laréflexion. Il se trouve que dans notre pays la majorité desintellectuels appartient à la fonction publique, ce qui ne signifie pasqu'ils soient de quelque façon inféodés à des institutions ou aupouvoir politique, même s'il existe certes parmi eux des intellectuelsorganiques. Si la liberté est nécessaire pour penser et écrire, il vade soi que l'obligation de réserve qui s'applique en général àcertaines catégories de fonctionnaires ne peut aucunement s'appliquer àleur cas, sauf à n'attendre d'eux que la reproduction d'une doctrineofficielle et stérile. Aujourd'hui, la convocation devant unecommission disciplinaire, de notre collègue Vincent Geisser, chercheurau CNRS, accusé de n'avoir pas respecté cette « obligation », constitueun signe supplémentaire et particulièrement alarmant de l'idée que lesinstitutions de notre pays semblent désormais se faire de notre rôle.Devrons-nous donc soumettre nos articles, nos livres, nos prises deposition publiques à l'approbation de leur censure, alors qu'aucuneconsigne ne devrait émaner d'elles si ce n'est celle de la rigueurintellectuelle et de la créativité qui accompagne toute recherche ?Quels compromis honteux devrons-nous accepter pour échapper àl'humiliation d'un conseil de discipline ? La France, pays des droitsde l'homme et de la liberté d'expression, est-elle en train de perdreson âme ? Comment continuer à faire notre travail, à assumer pleinementnotre vocation, sous la menace constante de la sanction ? Quesommes-nous ? De simples courroies de transmission des idées qui ontl'agrément de nos dirigeants et des institutions qui nous emploient, oudes hommes et des femmes autonomes exerçant leur métier librement, entoute responsabilité, en toute honnêteté, et au service d'unerecherche, d'une pensée et d'un savoir libres de tout carcanidéologique, n'ayant d'autre limite que la considération du bien commun? L'obligation de réserve ne peut en aucun cas valoir pour lesintellectuels, y compris lorsqu'ils sont fonctionnaires. Les ysoumettre revient purement et simplement à les faire disparaître commeintellectuels, c'est ruiner la liberté dont ils ont besoin pourcontinuer leur oeuvre salutaire, indispensable à la vie normale d'unpays politiquement sain, et qui a besoin d'eux pour son équilibre. Cequi arrive à notre collègue Vincent Geisser, qui a le malheur detravailler sur l'islam, sujet brûlant s'il en est, est d'une extrêmegravité et interpelle tous les citoyens de ce pays. Le traitementindigne auquel il est soumis est une honte pour la profession et pourla France.
Pour signer : http://petition.liberteintellectuelle.net/

COLLECTIF POUR LA SAUVEGARDE DE LA LIBERTÉ
INTELLECTUELLE DES CHERCHEURS ET ENSEIGNANTSCHERCHEURS
DE LA FONCTION PUBLIQUE


COMITÉ DE LANCEMENT

1. Ghislaine ALLEAUME, directrice de recherches au CNRS, directrice de l'IREMAM
2. Jean-Christophe ATTIAS, directeur d'études à l'Ecole pratique des hautes études
3. Etienne BALIBAR, professeur émérite à l'Université de Paris 10 Nanterre
4. Nicolas BANCEL, professeur à l'Université de Strasbourg, détaché à l'Université de Lausanne
5. Jean BAUBEROT, professeur émérite de la chaire Histoire et sociologie de la laïcité à l'Ecole pratique des hautes études
6. Esther BENBASSA, directrice d'études à l'Ecole pratique des hautes études
7. Daniel BENSAÏD, professeur de philosophie à l'Université de Paris 8
8. Pascal BONIFACE, géopolitologue, Université de Paris 8
9.Marie-Françoise COUREL, directrice d'études à l'Ecole pratique deshautes études,présidente honoraire de l'EPHE, ancienne directricescientifique du département SHS du CNRS
10. Denis CROUZET, professeur à l'Université Paris-Sorbonne (Paris 4)
11.Alain DE LIBERA, professeur d'histoire de la philosophie médiévale àl'Université de Genève, directeur d'études à l'Ecole pratique deshautes études
12. Christine DELPHY, directrice de recherche émérite au CNRS
13. Éric FASSIN, enseignant-chercheur à l'École Normale Supérieure
14. Nacira GUENIF, sociologue, maître de conférences à l'Université Paris Nord
15. Edgar MORIN, directeur de recherche émérite au CNRS
16. Laurent MUCCHIELLI, directeur de recherche au CNRS
17. Denis PESCHANSKI, directeur de recherche au CNRS, ancien directeur adjoint du département SHS du CNRS
18. Roshdi RASHED, directeur de recherche émérite au CNRS, professeur honoraire à l'Université de Tokyo
19. Olivier ROY, directeur de recherche au CNRS
20. Vincent TIBERJ, chercheur au Centre d'Etudes Européennes de Sciences Po et maître de conférence à Sciences Po
21. Tzvetan TODOROV, directeur de recherche honoraire au CNRS
22. Jérôme VALLUY, enseignant-chercheur, science politique, Université Panthéon-Sorbonne (Paris 1, CRPS, TERRA)

PREMIERS SIGNATAIRES

23. Amin ALLAL, Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC), Tunis
24.Françoise ASSO, écrivain, maître de conférences de littératurefrançaise à l'Université de Lille 3, membre du collectif “UNIvers.Cité”
25. Francis BAILLEAU, sociologue, directeur de recherche au CNRS
26. Hélène BELLOSTA, directeur de recherche honoraire, CNRS
27. Maïté BOUYSSY, maître de conférences (HDR) en histoire contemporaine à l'Université de Paris 1-Panthéon-Sorbonne
28. Noëlle BURGI, chercheure CNRS
29. Hélène CLAUDOT-HAWAD, directrice de recherche au CNRS
30. Albano CORDEIRO, retraité, CNRS
31. Michèle CREMOUX, Toulouse
32. Catherine CURRAN VIGIER, maître de conférences d'anglais, Université de Rouen
33. Laurence DE COCK, professeur agrégée d'histoire, formatrice à l'IUFM de Versailles
34. François DESPLANQUES, maître assistant retraité de l'Université de Nice Sophia Antipolis
35. Fabrice DHUME, sociologue, chercheur à l'ISCRA
36. Maryse ESTERLE HEDIBEL, enseignante-chercheure à l'IUFM Nord Pas de Calais, Université d'Artois, chercheure CESDIP
37.Colin FALCONER, formateur d'anglais à la retraite, actuellementintervenant à l'université de Paris 3 (Département de la FormationContinue)
38. VINCENT FOUCHER, CR1 CNRS - CENTRE D'ETUDE D'AFRIQUENOIRE 39. Yvan GASTAUT, maître de conférences en histoire contemporaineà l'Université de Nice
40. Charles GIRARD, allocataire-moniteur en philosophie, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
41. Jean-François HAVARD, maître de conférences en science politique, Université de Haute Alsace - Mulhouse
42. Christine HUGUET, maître de conférences en littérature anglaise à l'Université Charles-de-Gaulle Lille 3
43. Florence HULAK, ATER en philosophie à l'Université Paris 1
44.Moritz HUNSMANN, doctorant en Recherches Comparatives sur leDéveloppement, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS),Paris, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg, Allemagne
45. Rada IVEKOVIC, professeure des universités, Université de Saint-Étienne & Collège international de philosophie, Paris
46. Liêm-Khê LUGUERN, professeur d'histoire-géographie, doctorante EHESS-IRIS
47. Sami MAHBOULI, doctorant, Université Montpellier 1, CEPEL
48. Antoine MATH, chercheur à l'Institut de Recherches Economiques et Sociales (IRES)
49. Gilbert MEYNIER, professeur émérite à l'Université de Nancy 2
50. Soulé NGAIDE, Cimade
51. Olivier NOËL, sociologue, ISCRA-INED
52.Alexandre PIETTRE, doctorant "sociologie du pouvoir" - CSPRP,Université de Paris 7, Ater science politique - DCS, Université deNantes
53. Gildas RENOU, Université Rennes-1
54. Alain RUSCIO, chercheur indépendant
55. Jean SALEM, philosophe, professeur à l'Université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne)
56. Pierre SALY, maître de conférences honoraire en histoire contemporaine à l'Université de Paris 1
57. Aude SIGNOLES, maitre de conférences en science politique, Université de Galatasaray, Đstanbul (Turquie)
58. Bahram SOLTANI, Maître de conférences, directeur de recherche, Université de Paris 1 Sorbonne
59. Sylvie THENAULT, chargée de recherche, CNRS (Centre d'histoire sociale du XXe siècle, UMR 80 58)
60. Claire VISIER, maître de conférences en science politique


Pour signer : http://petition.liberteintellectuelle.net/