Questions de société

"Triste CIR" et "grande truanderie": polémique autour du Budget Supérieur-Recherche 2011 (01/10/10)

Publié le par Bérenger Boulay (Source : SLU)

Sur le blog de Sylvestre Huet, le 01 octobre 2010:

Polémique sur le budget 2011 de V. Pécresse

Hier la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse a présenté son budget 2011. Il donne lieu à une vive polémique puisque la ministère y voit un «budget (qui) conforte l'augmentation inédite des moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche depuis 2007

Tandis que ses critiques l'analysent comme «une grande truanderie» (SNCS FSU), ou «un exercice de communication qui ne peut tromper» pour le Parti Socialiste.

...lire la suite

Sur le site de SLR:

La ministre et le triste CIR. Par Emmanuel Saint-James, le 1er octobre 2010

La ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche revient comme chaque automne pour son numéro de prestidigitation budgétaire.Alors que l'OCDE ne voit aucun effort budgétaire de notre pays en matière de recherche depuis son arrivée au ministère, elle continue à faire croire que des milliards se déversent sur notre activité. La première année nous avions eu droit au transfert des retraites de son personnel dans le budget de son ministère, auparavant alloué au ministère de la fonction publique, jeu à somme nulle permettant de gonfler un budget sous les projecteurs sans rien débourser de plus au final. Cette année nous avons droit à la métamorphose d'un emprunt en un crédit, à savoir les partenariats-public-privé qu'il faut immédiatement commencer à rembourser. Ce mauvais calcul ajouté à celui du Grand Emprunt qui emprunte ici pour placer là et promet de distribuer une différence aléatoirement positive, emmène notre pays vers la mésaventure qu'a connue la Grèce. Après moi le déluge. Seul vrai effort financier, le Crédit Impôt Recherche, pour lequel la ministre choisit la « stabilité du dispositif jusqu'en 2013 (sic) pour que l'impact de la réforme 2008 sur la R&D des entreprises puisse être évalué dans de bonnes conditions ». La Cour des Comptes, qui voit dans le CIR une colossale niche fiscale à l'efficacité douteuse, appréciera la disqualitification implicite de son travail et de celui des trois rapports parlementaires concluant dans le même sens.

Tout cela serait risible si les grands perdants de l'histoire n'étaient nos jeunes docteurs : la ministre exalte la revalorisation des carrières de nos métiers en omettant soigneusement de rappeler que son ministère ne crée aucun emploi. Mais qu'importe, du moment qu'on aligne de grands chiffres. L'année prochaine nous aurons certainement une grille indiciaire mirifique, pour des fonctions qui n'existent pas. Plus c'est gros, plus ça marche.

Budget 2011: la grande truanderie - SNCS-HEBDO - 30 septembre 2010

Pour lire le communiqué du MESR sur le budget 2011.

C'est un véritable feu d'artifice, où elle a enfilé les mensonges comme on enfile les perles, qu'a lancé Valérie Pécresse lors de sa conférence de presse ce jour, le 30 septembre, sur le budget 2011 de l'ESR. Ce ne sont plus des milliards qui pleuvent mais un véritable tsunami qui s'est abattu sur l'enseignement supérieur et la recherche (ESR) : 4,702 milliards rien que pour 2011. Excusez du peu !

Par Henri Audier, membre du Bureau national du SNCS-FSU

Les Crédits budgétaires en récession en € constants

Peu avant Pécresse, le ministre du budget Baroin avait annoncé : « les crédits pour la MIRES [crédits budgétaires ESR] progressent de 505 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) (+ 2 %) et de 892 millions d'euros en crédits de paiement (CP) (+ 3,6 %) … pour la période 2010-2013, faisant de la mission la première priorité du gouvernement » [! !!]. L'inflation, tournant autour de 1,5 % actuellement, se situera probablement entre 6 et 8 % sur les 4 ans. Chacun peut voir qu'il y aura, au mieux, une baisse significative en € constants.Pour 2011, il faudra attendre les documents budgétaires pour avoir une idée précise. Mais on peut donner quelques lignes-forces. En effet, il ressort des chiffres publiés par l'AEF hier qu'à périmètre constant, la ligne « Formation Supérieure, recherche universitaire » s'accroîtrait d'environ 1 % en CP, en € courants. Mais la ligne « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » [dont CNRS, INSERM, IRD] baisserait du même pourcentage. Le chiffre donné par Pécresse pour le CNRS, + 0,8 % en € courants, est donc peut-être même une vue optimiste.

L'emploi au mieux en stagnation

La recherche et l'E-S sont des activités de « matière grise ». On ne peut développer durablement un secteur sans nouveaux personnels. Or, il n'y aura au mieux aucune création d'emploi ; probablement des suppressions via la procédure de « fongibilité asymétrique » au niveau des établissements. Mais beaucoup de CDD en plus.

Petits et grands truandages

Comme à l'habitude, Pécresse mélange tout, les AE et les CP, les crédits et les emprunts (PPP), sans tenir compte des changements de périmètre. Un seul petit exemple : « bâtir les campus de demain ». Dans ce chapitre, Pécresse additionne :
puce-32883.gif 270 millions qui sont les intérêts de l'opération campus (venant des 5 milliards en capital) ; à condition d'être utilisés en 2011 (on n'en a aucune preuve pour la totalité), ce sont de vraies ressources, même si elles ne sont pas budgétaires ;
puce-32883.gif 238 millions de partenariats publics-privés qui ne comptent pas car ce sont des emprunts qu'il faudra rembourser chaque année sur 30 ans.Elle arrive ainsi à un total flatteur de 508 millions, auquel il faut en fait retirer 182 millions de « remboursement » du plan de relance et, comme déjà expliqué, les PPP. En fait la progression réelle est 88 millions. Pas la peine de faire tant de chichis pour une somme si modeste : il suffisait d'envoyer Eric Woerth chez Bettencourt, et il les ramenait.

Crédit d'impôt recherche (CIR) à 5 milliards

Par contre ce qui est vrai c'est que le CIR atteint 5 milliards. Malgré la Cour des comptes, malgré le rapport de l'Assemblée nationale, malgré celui du Sénat, malgré l'avis unanime de la Commission des finances de l'Assemblée, le gouvernement refuse de faire le moindre geste ne serait-ce que pour moraliser les aspects les plus scandaleux de cette procédure. Il n'y a pas 400 millions pour créer 5000 emplois dans l'ESR, mais il y a 5 milliards de CIR qui ne servent qu'à alimenter les profits.

La grosse ficelle de l'emprunt

Au-delà des gros et petits truandages, c'est grâce à l'emprunt que Pécresse arrive à cette fantastique progression des moyens de l'ESR en 2011. En crédits consumptibles et en intérêts de l'emprunt, le ministère affirme que 3,5 milliards seront dépensés. Il se peut que ces sommes soient potentiellement disponibles. Mais c'est totalement illusoire car vu le temps nécessaire pour évaluer les appels d'offre puis le temps des démarches administratives, puis celui nécessaire pour utiliser de l'argent, il est impossible que cette somme (ou une fraction significative de celle-ci) soit dépensée en 2011. Dépensée est un grand mot car, dans beaucoup de cas, il faudrait dire gaspillée : il suffit de prendre l'exemple du gâchis, en milliards, du plateau de Saclay.

Rappelons que depuis que Valérie Pécresse déverse ses milliards sur la recherche, l'OCDE n'a pas toujours pas détecté le moindre soubresaut de l'effort financier français.

Syndicat National des Chercheurs Scientifiques (SNCS-FSU)1, place Aristide Briand - 92195 Meudon CedexTél. : 01-45-07-58-70 / Fax : 01-45-07-58-51sncs@cnrs-bellevue.frhttp://www.sncs.fr