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Translations médiévales: du roman au roman (séminaire Translations)

Translations médiévales: du roman au roman (séminaire Translations)

Publié le par Bérenger Boulay

Séminaire « Translations » - équipe « Anachronies »

Séminaire transversal DSA - LILA (ENS), en collaboration avec l’Atelier de théorie littéraire de Fabula.

 

Vendredi 6 novembre 2015 : Translations médiévales : du roman au roman

ENS, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris, salle Cavaillès

Intervenants : Nathalie Koble, Amandine Mussou

 

Roman : le substantif, dès ses premières attestations en français, désigne une réalité linguistique (la langue romane, par opposition au latin, mais aussi au tudesque, depuis le Concile de Tours), un processus de transfert textuel (la traduction de textes d’une langue étrangère en français), et une forme fictionnelle, d’abord fondée sur un texte source, avant de s’émanciper en un genre autonome.

Translatio imperii. C’est dans un contexte politique et linguistique particulier (le royaume d’Henri II Plantagenet, le Français d’Angleterre), dans les années 50 du XIIe siècle, qu’émerge cette polysémie, liée à une intense activité de traduction suscitée par le pouvoir. Un corpus volumineux, expérimental et sûr de ses effets voit le jour. Ce corpus est constitué d’une trilogie de récits qu’on dit précisément antiques en raison de leur contenu : le Roman de Thèbes (vers 1150), le Roman d’Eneas (vers 1155), et le Roman de Troie un peu plus tardif (vers 1165). Cette trilogie puise sa matière dans la mythologie de la Grèce antique en translatant, dit l’ancien français, des textes latins : la Thébaïde de Stace pour le premier, l’Enéide pour le second, tous deux anonymes ; pour le Roman de Troie, signé Benoit de Saint-Maure, la translation amplifie en vers deux récits en prose, l’Ephemeris Belli Trojani de Dictys de Crète (IVe siècle), censé avoir fait partie du camp des grecs, et l’Historia de excido Trojae de Darès le Phrygien, censé avoir combattu du côté Troyen. Les trois romans, qui cumulent un ensemble de plus de 40 000 couplets d’octosyllabes à rimes plates, sont souvent rassemblés par la tradition manuscrite, et associés à une autre traduction, d’une chronique latine du 12e siècle, le Roman de Brut du clerc anglo-normand Wace. L’ensemble tire sa cohérence d’un contexte politique et idéologique particulier et bien connu : le roman est ici un genre où se joue un triple transfert - linguistique, fictionnel et politique. La séance reviendra sur les modalités de cette écriture transférentielle et sur les fondements théoriques qu’elle s’approprie pour penser la traduction et sa dynamique inventive, à la naissance du « roman ».

Translatio studii. Conçue sur le modèle de la translatio imperii, la translatio studii fait de la traduction une activité d’écriture qui s’affranchit de la sphère du politique pour transmettre un héritage antique en actualisation permanente. A partir du corpus ovidien, du XIIe au XVe siècle, trois modalités de translation seront examinées.

 

Bibliographie :

Silvère Ménégaldo, « De la traduction à l’invention. La naissance du genre romanesque au XIIe siècle », in Translations médiévales. Cinq siècles de traduction en français au Moyen Age, Cl. Galderisi (dir.), Brepols, 2011, p. 295-323.

Cl. Galderisi, « Silences et fantômes de la translatio studii. La traduction empêchée », ibidem, p. 433-457.

NB : La bibliographie est restreinte à dessein pour que les participants puissent prendre connaissance de l’ensemble de ces textes, qui serviront de base commune à la discussion.