Actualité
Appels à contributions
Spectre - Objet et méthode

Spectre - Objet et méthode

Publié le par Pierre-Louis Fort (Source : Laura Naudeix)

GRIHF : Groupe de Recherche Interdisciplinaire Histoire et Fiction
(IALH-UCO Angers)


Appel à contribution
Journée d'études pluridisciplinaire


Vendredi 3 décembre 2010
Le spectre : objet et méthode – Seconde journée


Le GRIHF organise une seconde rencontre à partir des hypothèses, des questions et des acquis issus du croisement méthodologique et disciplinaire de la première journée d'études qui s'est déroulée le 3 décembre 2009.
La proposition de notre groupe de recherche, intrinsèquement pluridisciplinaire, est de réfléchir à des croisements méthodologiques entre les sciences et leurs concepts propres, de manière à nourrir les expériences de recherche individuelles dans chacun des champs représentés.

Rappel terminologique
Le terme « spectre » utilisé ici ne renvoie pas au fantôme – notamment théorisé par Jacques Derrida (Spectres de Marx, 1993) – mais est directement issu du vocabulaire de la musique contemporaine qui, lui-même, puise cette métaphore dans le lexique de la physique. Il est utilisé par Gérard Grisey (1946-1998) pour expliquer une nouvelle perspective sur la composition musicale, qui n'a pas pour enjeu de partir d'une mélodie mais de l'« harmonie » : la « musique spectrale » se donne pour objet la décomposition acoustique d'un son. La notion est empruntée au vocabulaire de l'optique, et apparaît pour la première fois chez Isaac Newton à la fin du XVIIe siècle (Lettre à Oldenbourg du 6 février 1672) : il venait d'observer que la lumière, passant au travers d'un prisme en verre, se diffracte en séquences colorées qui correspondent aux composantes électro-magnétiques de la lumière blanche. Il baptise cet éventail multicolore «spectre».
C'est donc le spectre newtonien, première métaphore visuelle, qui elle-même bouge vers le matériau sonore, qui à son tour est appliquée aux objets d'étude matériels ou immatériels, des sciences dures ou des sciences humaines, qui est l'objet de notre rencontre.


Acquis
Les disciplines représentées lors de la première journée étaient les suivantes : musicologie, statistique, biologie, histoire, histoire de l'art, littérature, arts plastiques.
Il apparaît que le concept de spectre est opérant dans un objectif de saisie du réel. La différence fondamentale entre sciences subtiles et sciences exactes est que le spectre est pour les premières un moyen d'explorer une instabilité (on peut parler d'une «esthétique des formes instables»), tandis que pour les secondes il sert au contraire à se rapprocher d'un objet dont on reconnaît a priori l'instabilité, de manière à la réduire en maîtrisant des paramètres différents de manière simultanée.
Si l'on observe donc en commun la décomposition initiale en éléments segmentables, il s'agit nettement dans un cas de maintenir ou d'obtenir une vibration qui permette d'atteindre une meilleure puissance d'évocation ou de représentation (on l'observe par exemple en peinture dans le divisionnisme de Seurat, ou encore lors de la mise en présence d'un phénomène surnaturel au sein d'un espace rituel, ou, dans le cas de l'écriture littéraire, lorsqu'on souhaite faire entrer un élément non-verbal, a-temporel, dans le langage et dans la linéarité de l'écriture), dans l'autre, d'enclore un phénomène indescriptible ou mettant en jeu un nombre potentiellement infini de paramètres.
On constate alors l'importance de l'opérateur : la différence fondamentale réside dans la position de l'objet par rapport à l'analyse. Si l'on peut évoquer en sciences humaines un mouvement de spectralisation, où l'interprétation fait entrer en jeu une décision, une hypothèse, en somme un facteur humain, on revient à une hypothèse d'objectivité en sciences dures, où l'instrument de saisie prévaut, qui contamine notamment l'historiographie. A ce titre, la science historique se situe plus que jamais à la charnière des deux espaces épistémologiques.


Questionnements
Il est bien entendu que les propositions peuvent et doivent émaner de tous les champs disciplinaires. Nous nous permettons simplement de décrire des pistes de travail, qui visent à explorer les ressources de ce concept dans la prise en compte de nouveaux objets, ou dans l'hypothèse de constituer une méthodologie renouvelée :

*Autour de la notion même d'objet : creuser la différence entre une conception dispersante ou au contraire une pensée de l'unité du multiple.

*En quoi la mise à distance – des affects, du social – est-elle nécessaire pour saisir une totalité de l'objet ? est-ce une illusion méthodologique ? On pense en particulier aux opérations de sélection et d'isolement des phénomènes et des témoignages historiques. Le fait de réintégrer certains micro-phénomènes entraîne-t-il un brouillage ou au contraire plus une grande subtilité – au risque de la désintégration de la connaissance des faits ?

*La notion de simultanéité ou ‘temps réel' interroge le déroulement et les rapports entre les natures différentes d'objets envisagés. Elle permet de penser le rapport entre description et narration, entre portrait et récit. La notion de biographique et ses outils peuvent ainsi être interrogés sur de nouveaux frais.


La journée se déroulera à l'Université Catholique de l'Ouest, place André Leroy, Angers. L'entrée est libre.
Les communications et débats seront publiés en ligne, sur la page Internet du GRIHF.


Merci d'envoyer vos questions, inscriptions, suggestions et propositions d'intervention à Laura Naudeix, laura.naudeix@uco.fr avant le 1er novembre 2010.