Référence bibliographique : Serbica, n° 11, février 2015, Dossiers consacrés à Branimir Šćepanović, Emir Kusturica et Danilo Kiš, Université Bordeaux Montaigne, 2015. EAN13 : 22683445.
Serbica, n° 11 :
Dossiers consacrés à Branimir Šćepanović, Emir Kusturica et Danilo Kiš
Sommaire
1. Sous la loupe : Branimir Šćepanović
Une « étoile filante » ou un « messager » pour la postérité, par Milivoj Srebro
La Bouche pleine de terre : extrait, traduit par Jean Descat
Un homme poursuivi et qui va mourir découvre "l'extase matérielle", par Jean-Baptiste Mauroux
Malone meurt (S. Beckett) et La Bouche pleine de terre (B. Šćepanović), ou comment finir, par Françoise Genevray
Voies du récit, voix du silence, la nécessité de la parabole dans La Bouche pleine de terre, par Claude Lesbats
Une métaphore du monde sans Dieu, par Milivoj Srebro
L’homme de bronze de Šćepanović, par Georges Nivat
Les lumières et « les ombres » d’un chef d’œuvre : Branimir Šćepanović vu par la critique française, par Milivoj Srebro.
2. Emir Kusturica : un artiste aux talents multiples
Kusturica est un miracle !, par Ivan Negrišorac
Emir Kusturica : Étranger dans le mariage – extrait, traduit du serbe par Alain Cappon
La peur et les jeans ne passent jamais de mode, par Emir Kusturica.
3. Danilo Kiš aurait eu 80 ans aujourd’hui
Ecrire pour survivre, par Milivoj Srebro
Qu'est-ce qu'un écrivain yougoslave à Paris?, entretien avec Danilo Kiš, La Quinzaine littéraire, n° 317, le 16 janvier 1980
Souvenir de Danilo Kiš, par Alain Cappon.
4. Atelier de traduction
Un flaubertien serbe postmoderne : Slavoljub Marković, par Boris Lazić
Slavoljub Marković : Ma ville – extrait, traduit par Boris Lazić.
5. La Serbie dans la grande guerre (supplément au n° 8/9)
Les Balkans, les grandes puissances et la Grande Guerre. De cause à effet, par Boško I. Bojović
Milovan Vitezović : Les Chaussette du roi Pierre – extrait, traduit par Amalija Vitezović
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Un extrait du N° 11 :
En hommage aux victimes des attaques terroristes qui ont secoué la France au mois de janvier, Serbica publie un article d’Emir Kusturica paru dans le quotidienne belgradois Politika le 10 janvier 2015.
La peur et les jeans ne passent jamais de mode
par Emir Kusturica
[…] Après la Seconde Guerre mondiale, le sang est apparu dans un petit documentaire projeté avant le début du film où un violoniste gisait dans une mare de sang après la chute de Berlin. Les spectateurs effrayés ont alors vu pour la première fois du sang à l’écran. Depuis, ce liquide est devenu le plus désiré dans les médias. Le meurtre des caricaturistes ne vise pas uniquement à effrayer ceux disposés à rire même à leurs propres dépens (Charlie Hebdo se moquait très souvent du Christ), il nous a simplement remis en mémoire l’insupportable légèreté avec laquelle, partout dans le monde, on fait couler le sang. À l’écran et dans la vie. […]
Pâtissent le plus souvent des victimes innocentes, désemparées, désarmées comme l’étaient les caricaturistes de Charlie Hebdo ! En vertu de quoi s’arroge-t-on le droit de leur ôter la liberté de railler ? Et pas uniquement cette liberté-là, mais aussi la vie. La vidéo qui montre les assassins en action paraît extraite d’un film contemporain, mais ce n’est là qu’une impression superficielle. Le meurtre très effrayant des caricaturistes reflète une orientation durable du contenu de la dramaturgie hollywoodienne qui n’est pas simplement une expression cinématographique mais, nous le voyons bien désormais, un dessein stratégique et politique. Cette stratégie uniformise la vie réelle, l’écran de cinéma et de la télévision. Le sang se déverse sur nous du même bidon … […]
Si ceux qui conduisent l’Europe contemporaine ont suffisamment d’intelligence, ils pourraient faire de l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo un nouveau 11 septembre européen…