SEMINAIRE DOCTORAL DE SOCIOCRITIQUE
INALCO (Université Sorbonne Paris Cité)
Sous la direction de Patrick Maurus
Salons de l'INALCO, 2 rue de Lille, Paris 75005
20 février 2015, 4 et 11 mai 2015
Pour sa troisième année d'existence, le « Séminaire doctoral de sociocritique » de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) a prévu trois séances, qui, dans l'optique du « Deuxième Symposium International de Sociocritique » qui aura lieu à Montréal en décembre 2015, interrogeront toutes, peu ou prou, la question du réalisme.
La sociocritique sait pertinemment qu'elle a pris forme dans les réflexions de spécialistes du XIXe siècle (Claude Duchet le premier), héritant de travaux qui se penchaient majoritairement sur ce même siècle, perçu comme « le siècle du réalisme » (György Lukàcs), ou qui questionnaient la notion même de « réalisme » (Bertold Brecht), en exigeant d'elle qu'elle soit à la hauteur de ses intentions. Lorsqu'il a fallu ensuite se doter d'un corps de doctrine, c'est sur une nouvelle définition des rapports du texte au monde que les débats ont fait fond et que les hypothèses fondatrices se sont appuyées. Refusant la clôture du texte, on le sait, mais aussi bien toute conception réduisant le texte à une quête de légitimité sociale ou à un rôle de reflet contextuel, la sociocritique s'est dégagée de ses ambiguïtés sociologiques du début pour se consacrer « au rôle du social dans le texte et non au rôle social du texte ». Il s’ensuit que la sociocritique ne peut pas et ne pourra jamais se désintéresser du « dire vrai », d'une part parce que tout texte, à sa façon, « dit vrai », d’autre part et surtout parce que, au-delà des querelles sur l'idéologie, sans doute à revoir, le texte entretient un dialogue avec l'imaginaire social, qui n'a pas de propriétaire.
En fait, et Pierre Popovic l'a montré avec autorité, « l'imaginaire social est ce rêve éveillé que les membres d'une société font à partir de ce qu'ils voient, lisent, entendent […], il est ce que ces membres appellent la réalité. » Il va de soi que dans ce cadre général, des textes baignant dans l'adhésion, la douleur partagée, le souvenir commun occupent une place particulière, de même que ceux qui se proposent de « simplement » décrire le monde, ou de le transformer.
Dans cette optique, il n'est que trop évident que, même si certains dispositifs sémiotiques ou certains genres paraissent appeler plus que d'autres le témoignage, la mémoire et « l'effet de réel », c’est toute la littérature et toute la lyre qui sont concernées par la question du « rapport au monde ». Et ce n'est pas parce que la sociocritique (ainsi que d’autres approches du siècle désormais passé) a mis en cause le caractère problématique de ce rapport sur des romans dits « réalistes » que tous les types de textes et de créations culturelles ne méritent pas un traitement ou des interrogations particulières. Ces interrogations sont d'autant plus vitales qu’elles favorisent l’élargissement actuel des champs d'intérêts de la sociocritique.
Le séminaire abordera et développera l’ensemble de ces questions, leur trouvant des prolongements nombreux tant sur le plan théorique que sur ceux des pratiques de lecture et des modes de transformation des textes et des discours (détournements et recyclages des formes littéraires, interdiscursivité et sociogrammaticalité textuelle, hétéroculturalité et hétéromédialité des textes, procédures de traduction, élaboration du travail mémoriel, etc.).
Éléments de bibliographie :
Bittinger, Nathalie, 2046 de Wong Kar-Wai, Paris, Armand Colin, 2007, 128 p.
Duchet, Claude, et Patrick Maurus, Un Cheminement vagabond, Nouveaux entretiens sur la sociocritique, Paris, Honoré Champion, 2011, 266 p.
Hamel, Yan, L'Amérique selon Sartre, Montréal, PUM, 2013, 360 p.
———, La Bataille des mémoires – la seconde guerre mondiale et le roman français, Montréal, PUM, 2006, 410 p.
Lamarre, Mélanie, Ruines de l'utopie. Antoine Volodine, Olivier Rolin, Presses universitaires du Septentrion, 2014, 416 p.
Maurus, Patrick, La Corée dans ses fables, Paris, Actes Sud, 2010, 174 p.
———, et Pierre Popovic (dir.), Actualité de la sociocritique, Paris, L’Harmattan, 2013, 260 p.
Popovic, Pierre. « La sociocritique. Définition, histoire, concepts, voies d’avenir », dans Pratiques, n° 151/152, décembre 2011, p. 7-38.
———. Imaginaire social et folie littéraire. Le second Empire de Paulin Gagne. Montréal, PUM, 2008, 377 p.
———. La Mélancolie des Misérables. Essai de sociocritique, Montréal, Le Quartanier, 2013, 314 p.
Robin, Régine. Le réalisme socialiste : une esthétique impossible. Paris, Payot, 1986, 347 p.
———, Le Mal de Paris, Paris, Stock, 2014, 344 p.
Programme
Vendredi 20 février 2015 :
- Nathalie Bittinger (Université de Strasbourg) :
« L'imaginaire du réel dans le cinéma contemporain (du found footage au cinéma de la durée en passant par le cinéma du genre) »
- Patrick Maurus (INALCO) :
« La sociocritique au risque de l'image » (avec Adrien Gombeaud)
Lundi 4 mai 2015 :
- Sarah Sindaco (Université de Liège) :
« Michel Houellebecq : un antimoderne du XXIe siècle »
Mélanie Lamarre (Université Charles-De-Gaulle/Lille 3) :
« Rabelais à Rabelaisland : la commémoration selon Philippe Murray »
- Pierre Popovic (Université de Montréal) :
« La sociocritique est un sport de plein air. Démonstrations pratiques »
Lundi 11 mai 2015
Djemaa Maazouzi (Université Charles-De-Gaulle/Lille 3) :
« Appelés et contingence dans la guerre d'Algérie. Une scénographie mémorielle de la solidarité »
Yan Hamel (Télé-Université du Québec/TELUQ) :
« Sartre et l'Amérique, littérature, philosophie, politique »
Pierre Popovic (Université de Montréal) :
« Présentation du CRIST et du « chantier des réalismes » »
Une bibliographie de la sociocritique sera disponible lors des séances.
Pour toute information sur la sociocritique, voir le site : http://www.sociocritique-crist.org
Ce séminaire doctoral international bénéficie du soutien financier de l'École doctorale de l'INALCO.