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Séminaire de Marc Escola (Paris 8 & Fabula): Critique & création.

Séminaire de Marc Escola (Paris 8 & Fabula): Critique & création.

Publié le par Alain Brunn

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Séminaire de Master 1 & 2 : Critique & création

La critique littéraire est-elle vouée par nature etfonction à rester un « discours second » entièrement subordonné à untexte premier qui peut seul prétendre à la dignité d'un discourscréateur ? Si l'activité critique est régulièrement raillée, par lesauteurs eux-mêmes, comme une pratique « parasite », commentcomprendre, d'une époque à l'autre et en dépit de la diversité des formes prisespar la critique littéraire, la permanence d'une caste de commentateurs distinctde la catégorie des lecteurs auxquels les écrivains voudraient seuls avoiraffaire ? Peut-on imaginer une forme de critique authentiquementcréatrice ?

On réunira d'abord une petite anthologie de textesthéoriques qui tentent de dire la fonction du discours critique — ou d'imaginerpour elle une vertu créatrice (Wilde, Brunetière, Thibaudet, Steiner, Dubois,Bayard, etc.).

On s'intéressera ensuite à deux« petites querelles du Grand Siècle » pour observer dansles textes polémiques produits lors de la parution du Cid (1637) et de La Princesse de Clèves (1678) une hésitation (pour nous) curieuseentre posture de lecteur critique et gestes de récriture — les critiques de l'âgeclassique n'hésitant pas à suggérer aux auteurs telle ou telle correction, entransgressant régulièrement la frontière entre texte littéraire et discourssecond, ou plus simplement entre réception et production.

On se demandera alors s'il n'est pas possible, voiresouhaitable, de conjuguer au plus près récriture et commentaire pour concevoirdélibérément le discours critique comme production de « variantes ».On s'y essaiera pour finir sur une ou deux pièces du répertoire classique (LeMisanthrope au moins, pourlequel Rousseau a donné l'exemple dans la Lettre à d'Alembert…).

Dates : 16 oct., 23 oct., 30 oct.

6 nov., 13 nov., 20 nov., (pas de cours le 27 nov.)

4 déc., 11 déc., (pas de cours le 18 déc.)

8 janv., 15 janv., 22 janv., 29 janv.

salle B. 135 (bâtiment B2)

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— Bibliographie —

La lecture (ou relecture) du texte intégral du Misanthrope de Molière est vivement recommandée (éd. deréf. : éd. C. Bourqui, LGF, Le Livre de Poche, 2000).Facultativement : La Princesse de Clèves et Le Cid.

Des extraits de la plupart des ouvrages ici retenus figurentdans les documents ci-dessous.

Les références signalées par un (*) sontpartiellement ou intégralement accessibles sur Fabula ; les pagescorrespondantes ont été pour la plupart regroupées dans l'entrée « Textespossibles » de l'Atelier de théorie littéraire du site Fabula :http://www.fabula.org/atelier.php?Textes_possibles.

Bayard, P. (1998) Qui a tué RogerAckroyd ? Paris, Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe ».

Bayard, P. (2000) Comment améliorer les oeuvresratées ? Paris, Éditionsde Minuit, coll.« Paradoxe ».

Bayard, P. (2002) Enquête sur Hamlet. Le dialogue desourds. Paris, Éditions deMinuit, coll.« Paradoxe ».

Bayard, P. (2007) Comment parler des livres que l'on n'apas lus ? Paris, Éditionsde Minuit, coll.« Paradoxe ».

Bayard, P. (2008), L'Affaire du chien des Baskerville. Paris, Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe ».

[Surl'ensemble des ouvrages de Bayard, consulter aussi les comptes-rendus et débatscritiques auxquels ils ont donné lieu dans Acta Fabula, revue des parutions du site www.fabula.org,tous regroupés dans la page *« P. Bayard sur Fabula »]

*Bayard, P. (2002) « Le plagiat par anticipation »,[in :] B. Clément (éd.), Écrivains lecteurs, P.U. Reims, p. 75-85. *Analyse par M. Escola, « Le temps de l'histoirelittéraire est-il réversible ? ».

*Bénichou, P. (1967) « Traditions et variantes entragédie », L'Écrivain et ses travaux. Paris, Corti.

[sur Fabula, page : « La notion de varianteà l'âge classique »].

Béhar, H. (1981) « La réécriture comme poétique ou lemême et l'autre », Romanic Review, LXXII : 56-65.

[partiellement cité dans S. Rabau, 2001]

*Butor, M. (1968) « La critique et l'invention », RépertoireIII. Paris, Éditions deMinuit.

[partiellement cité dans S. Rabau, 2001 ;*Analyse par M. Escola,« Existe-t-il des oeuvres que l'on puisse dire achevées ? ».

Borges, J. L. Fictions. trad. fr : Paris, Le Seuil. [un exempleclassique de rencontre entre le commentaire, la théorie littéraire etl'écriture de fiction]

La Case blanche. Théorie littéraire et textespossibles, textes réunis parM. Escola & S. Rabau, éd. L'Improviste, 2006.[différentes contributions sur la notion de possible en littérature]

Charles, M.(1985) L'Arbre et la source. Paris, Le Seuil, coll.« Poétique ».

Charles, M. (1995) Introduction à l'étude des textes. Paris, Le Seuil, coll.« Poétique ».

Citton, Y. (2007) Lire, interpréter, actualiser. Pourquoiles études littéraires ?Paris, Amsterdam.

[Texte intégral de la préface sur Fabula : http://www.fabula.org/actualites/article20663.php]

Clément, B. (1999) Le Lecteur et son modèle, Paris, Puf,coll. « Écriture ».

[Compte rendu sur Fabula : http://www.fabula.org/revue/cr/4.php]

Clément, B. (2000) L'Invention du commentaire, Paris, Puf,coll. « Écriture ».

[Compte rendu sur Fabula : http://www.fabula.org/revue/cr/2.php]

Dubois, J. (2004), « Pour une critique fiction »,dans : La Critique et l'invention, Éditions Cécile Defaut/Villa Gillet, 2004, p.111-135.

Dubois, J. & Baethge,C. (2006), « Fictions critiques. Érotique et politique dans LaChartreuse de Parme et LaCousine Bette »,[in :] Stendhal. Balzac. Dumas. Un récit romantique ?, sous la dir. de C. Dumasy, C. Massol &M.-C. Corredor, P.U. du Mirail, p. 283-299.

*Escola, M. (2001) : « De l'éclair de génie au bonà tirer : la génétique des textes et les possibles textuels »[compte-rendu dans Acta fabula d'un ouvrage de P.-M. de Biasi]

*Escola, M. (2002), « Récrire Horace », Dixseptième siècle, 216,juill-sept. 2002, p. 445-467 ; [Ébauche d'une réécriture critique d'Horaceen fonction « des possibles du sujet »] ; partiellementrepris de : Escola,M. (2001) « RefaireHorace » [in:] Corneille, Horace. GF-Flammarion,2001.

Escola, M. (2003), Lupus in Fabula. Six façons d'affabuler La Fontaine. Paris, Presses Universitaires de Vincennes,coll. « L'Imaginaire du texte ».

*Escola,M. (2003), « Rousseau juge d'Alceste. Généalogie d'un malentendu »,[in :] B. Clément & M. Escola (éds.), Le Malentendu. Généalogie dugeste herméneutique, PressesUniversitaires de Vincennes, coll. « La Philosophie hors de soi », p.147-178.

Escola, M. (2005), Commentaires des Contes de Perrault, Gallimard, « La Foliothèque ». [chap.VI, « Des contes à régler. Cinq mécomptes de Charles Perrault, p. 130 sq.]

*Escola,M. & Rabau, S. (2008),« Comme des cochons. La bibliothèque de Circé », Acanthe (revue de l'USJ-Beyrouth), vol. 24-25 (daté2006-2007), p. 1-26.

[texte intégral sur Fabula : http://www.fabula.org/atelier.php?Biblioth%26egrave%3Bque_de_Circ%26eacute%3B]

Fish, S. (2007), Quand lire, c'est faire. L'autoritédes communautés interprétatives.Paris, Les Prairies ordinaires, coll. « Penser/Croiser » (trad. fr.de Is there a text in this class ?).

[Compte rendu sur Fabula : http://www.fabula.org/revue/document3780.php]

*Gefen, A. (2001) « Théorie des possibles, possibles dela théorie » ; compte-rendu sur Fabula de : Valincour, Lettres à Madame la Marquisede *** sur la Princesse de Clèves, éd. Christine Montalbetti, GF-Flammarion, 2000.

Genette, G. (1969a), « Rhétorique etenseignement », in : Figures II, Paris, Le Seuil, rééd. coll.« Points ».

Genette, G. (1969b), « Vraisemblanceet motivation », in : Figures II, Paris, Seuil, rééd. coll.« Points ».

*Genette, G. (1982), Palimpsestes. La littérature au second degré, Paris, Le Seuil, coll.« Poétique » ; rééd. coll. « Points-Seuil ». [pour unetypologie des relations hypertextuelles, *extrait disponible sur Fabula, page« L'intertextualité, réflexions et documents »].

L'Invention critique, Nantes, Cécile Defaut/Villa Gillet, 2004. [*extraitde l'art. de J. Dubois,« Pour une critique fiction », disponible sur Fabula :http://www.fabula.org/atelier.php?Pour_une_critique%2Dfiction]

Montalbetti, C. (1998), Gérard Genette. Une poétiqueouverte, Paris, BertrandLacoste, coll. « Références », 1998, p. 120-123.

Moretti, F. (2008), Graphes, cartes et arbres. Modèlesabstraits pour une autre histoire de la littérature. Paris, Les Prairies ordinaires, coll.« Penser/Croiser ».

[Compte rendu sur Fabula : http://www.fabula.org/revue/document4291.php]

Perrone-Moisés, L. (1976) « L'intertextualité critique »,Poétique, 27, p. 372-384.[partiellement cité dans S. Rabau,2001]

Rabau, S. (2001) L'Intertextualité. Paris, Flammarion, coll.« GF-Corpus » [voir en particulier la section V].

Thibaudet, A. (1930) Physiologie de la critique, Paris, Éd. de la Nouvelle Revue Critique,coll. « Les Essais critiques », vol. 21, 1930 [chap. dernier, p.213-243 : « La création en critique »]

Horizons —

1. « S'ily a un sens du réel, et personne ne doutera qu'il ait son droit à l'existence,il doit bien y avoir quelque chose qu'on pourrait appeler le sens du possible.

L'homme qui en est doué, par exemple, ne dirapas : ici s'est produite, va se produire, doit se produire telle ou tellechose ; mais il imaginera : ici pourrait, devrait se produire telleou telle chose ; et quand on lui dit d'une chose qu'elle est comme elleest, il pense qu'elle pourrait bien être autre. »

R. Musil,L'Homme sans qualité,trad. P. Jacottet, Le Seuil, 1956, t. I, p. 20.

2.« Tout enfant — c'était entre 1850 et 1860, l'Alsace appartenait encore àla France — il [i.e. mon grand-oncle] avait répondu à un curieux qui demandait “ce qu'ilferait plus tard” : “Je travaillerai à l'Académiefrançaise”. — Que diable y feras-tu ? — Il y aurait M.Victor Hugo, M. de Lamartine, M. Cuvier, M. de Balzac… — Et toi ? —Moi, je serais derrière le pupitre. — Que diable ferais-tu derrière lepupitre ? — Moi ? Je leur dirais : “Recommencez-moiça !” »

A. Malraux,Antimémoires, Gallimard,coll. Folio, p. 28.

3.« C'est aussi un inédit, un inécrit dont la poétique, entre autres, par la généralité deson enquête, découvre et désigne la virtualité, et qu'elle nous invite àréaliser. Qui est ce « nous », Qui est ce nous, l'invitations'adresse-t-elle seulement au lecteur, ou le poéticien doit-il lui-même passerà l'acte, je n'en sais trop rien, ou si l'invite doit rester invite, désirinsatisfait, suggestion sans effet — mais non toujours sans influence : cequi est sûr, c'est que la poétique en général, et la narratologie enparticulier, ne doit pas se confiner à rendre compte des formes et des thèmes existants. Elle doitaussi explorer le champ des possibles, voire des « impossibles », sans trop s'arrêter à cettefrontière, qu'il ne lui revient pas de tracer. Les critiques n'ont faitjusqu'ici qu'interpréter la littérature, il s'agit maintenant de latransformer. Ce n'est certes pas l'affaire des seuls poéticiens, leur part sansdoute y est infime, mais que vaudrait la théorie, si elle ne servait pas aussià inventer la pratique ? »

G. Genette, Nouveau discours du récit, Le Seuil, coll. « Poétique », 1983, p. 109.

4.« Il n'est pour les textes littéraires que deux façons d'assurer leurpérennité : leur constitution en hypotexte qui les fait revivre dans unhypertexte, le renouvellement de leur signification dans des interprétationsneuves. On voit mal qu'on puisse distinguer rigoureusement les deux dynamiques,au prétexte que l'une relève de “la littérature” et requiert d'authentiques“auteurs” tandis que l'autre intéresse la “réception” et demande seulement derigoureux interprètes. Ces deux procès sont en réalité étroitement solidaires :réécritures et commentaires s'élaborent dans un espace commun — celui des possibles du texte source. Ne peut-on imaginer detraiter dans les mêmes termes les transformations hypertextuelles et lestransformations métatextuelles — comme autant de variantes délivrées dans le texte considéré ? Commenterun texte ou le réécrire, c'est toujours instituer autour de lui le complexestatique des textes possibles dont le libre jeu ouvre le texte à l'historicité: ses sources avérées ou les textes dont il se souvient simplement, lespossibles qu'il écarte ou ceux qu'il ménage au profit d'autres textes encore ànaître, mais aussi les textes à venir et la série des commentaires auxquels ilpourra donner lieu et qui viseront à faire lever dans sa lettre le texte d'unautre texte. »

M. Escola,Lupus in fabula. Six façons d'affabuler La Fontaine, Presses Universitaires de Vincennes, 2004, p. 240.

5. Dansun chapitre de son Enquête sur Hamlet intitulé « Il n'y a pas d'oeuvre complète »,Pierre Bayard écrit :

« Un texte ne se réduit pas au texte seul. […] Le propre dela lecture, et a fortiori de la lecture critique, est d'ouvrir desespaces supplémentaires autour de l'oeuvre, en jouant de son incomplétude. »(Enquête sur Hamlet. Un dialogue de sourds, Minuit, 2002, p. 46& 55).