Essai
Nouvelle parution
S. Morlet, Symphonia

S. Morlet, Symphonia

Publié le par Nicolas Geneix

Sébastien Morlet, Symphonia

Paris : Les Belles Lettres, 2019.

496 p.

EAN 9782251449531

39,00 EUR

Présentation de l'éditeur :

Très tôt dans la littérature grecque apparaît l’idée que certains textes « résonnent » entre eux et que d’autres, au contraire, sont en dissonance. Les commentateurs des Classiques postulent leur harmonie parfaite pour les éditer ou pour les interpréter, tandis qu’ils s’interrogent sur leur accord ou leur désaccord avec d’autres auteurs. Dans l’écriture de l’histoire, l’accord des sources est souvent allégué comme un critère de vérité. Les philosophes réfléchissent à la concorde ou au dissentiment qui règnerait chez les grands maîtres, dans les écoles qu’ils ont fondées, ou entre courants philosophiques. Les juifs puis les chrétiens poursuivent ce questionnement sur la concorde des textes et des doctrines en l’appliquant au texte biblique, dans son rapport à lui-même ou aux textes non bibliques.

À la volonté d’interpréter, de comprendre et de juger s’ajoute au cours du temps un souci de systématisation qui s’impose de plus en plus aux lettrés de l’Antiquité, mais qui ne fera jamais disparaître l’intention profonde de ces réflexions sur l’accord : établir la vérité des textes ou des idées qu’ils sont censés exprimer.

Cet axe fondamental de la pensée grecque, qui culmine dans l’œuvre du chrétien Origène (v. 185-v. 254), n’est donc pas seulement au cœur de la genèse du comparatisme et du concordisme comme attitudes intellectuelles. Lié à une certaine représentation de la vérité, pensée comme fille du consensus, il constitue une page essentielle dans l’histoire de nos pratiques de véridiction, écrite par des « païens », des juifs puis des chrétiens, qui, au-delà de leurs divergences religieuses, étaient tous des auteurs grecs.

Ce livre est consacré à la préhistoire d’une histoire plus longue. Il s’arrête juste avant l’apparition du néoplatonisme et quelques décennies avant le « siècle d’or » de la patristique, deux traditions qui, l’une du côté païen, l’autre du côté chrétien, écriront une autre page des rapports entre concorde et vérité.

Sébastien Morlet est Maître de conférences HDR à Sorbonne Université (UFR de Grec). Il a publié plusieurs ouvrages sur les textes et les idées à la fin de l’Antiquité, dont Christianisme et philosophie : les premières confrontations (2014), Les chrétiens et la culture : conversion d’un concept (2016), et Symphonia. La concorde des textes et des doctrines dans la littérature grecque jusqu'à Origène (2019).

Tables des matières :

PREMIÈRE PARTIE. ΣΥΜΦΩΝΊΑ ET ΔΙΑΦΩΝΊΑ DANS LA LITTÉRATURE GRECQUE


I. – Συμφωνεῖν – διαφωνεῖν : du sens musical au sens figuré
A. L’harmonie musicale
B. Le monde comme harmonie
C. Les applications anthropologiques des notions de concorde et d’harmonie

II. – De l’anthropologie à l’épistémologie : la concorde des opinions
A. La notion de concorde en général
B. Concorde des hommes, concorde des opinions
C. Accord et vérité

III. – De l’accord des opinions à l’accord des textes : genèse de la réflexion grecque sur la συμφωνία des textes
A. La critique grammaticale des textes classiques
B. La tradition historique et géographique
C. Συμφωνία-διαφωνία dans la philosophie à l’époque impériale
D. Prolongements de la réflexion grecque sur l’accord et le désaccord des textes à l’époque impériale
Conclusion


DEUXIÈME PARTIE. ΣΥΜΦΩΝΊΑ ET ΔΙΑΦΩΝΊΑ CHEZ LES AUTEURS JUIFS DE LANGUE GRECQUE

I. – Aristobule
A. Qui est Aristobule ?
B. L’accord des Grecs et de l’Écriture
C. L’explication de la dépendance des Grecs à l’égard de la Loi
Conclusion

II. – Philon d’Alexandrie
A. La συμφωνία du monde
B. L’harmonie de l’homme
C. Συμφωνία et διαφωνία des opinions
D. La συμφωνία du texte biblique
E. La συμφωνία de la Bible et de la sagesse grecque
Conclusion

III. – Flavius Josèphe
A. La διαφωνία des historiens
B. La συμφωνία biblique
C. L’argument de la dépendance des auteurs grecs par rapport à la Bible
Conclusion

TROISIÈME PARTIE. ΣΥΜΦΩΝΊΑ ET ΔΙΑΦΩΝΊΑ DANS LA LITTÉRATURE CHRÉTIENNE JUSQU’À CLÉMENT D’ALEXANDRIE

I. – Le Nouveau Testament : « Conformément aux Écritures »

II. – Justin
A. L’accord de la foi et de l’hellénisme
B. Le désaccord des philosophes
C. La concorde de l’Écriture
D. Dissentiment et hérésie
Conclusion

II. – Athénagore
A. La concorde des auteurs Grecs et de l’Écriture
B. Les limites de la concorde des Grecs et de l’Écriture
C. L’explication de la concorde des Grecs et de l’Écriture
Conclusion

III. – Théophile d’Antioche
A. L’ἀσυμφωνία des Grecs
B. La συμφωνία de l’Écriture, signe de son inspiration, et donc, de sa vérité
C. La συμφωνία des Grecs et de l’Écriture
Conclusion

IV. – Irénée de Lyon
A. Du Dieu unique à l’oeuvre unique de Dieu
B. L’unité des Écritures : raisons exégétiques et philologiques
C. L’exégèse symphonique dans le commentaire de l’Écriture
D. Συμφωνία et διαφωνία dans la dénonciation de l’erreur
E. Usages de la συμφωνία dans l’établissement de la vérité
Conclusion.

V. – Clément d’Alexandrie
A. La vérité comme harmonie
B. L’application concrète de cette conception de la vérité : la confrontation de la philosophie et de l’Écriture
C. L’harmonie dans l’Écriture
Conclusion


QUATRIÈME PARTIE. ΣΥΜΦΩΝΊΑ ET ΔΙΑΦΩΝΊΑ CHEZ ORIGÈNE

I. – La συμφωνία et la διαφωνία dans l’oeuvre d’Origène
A. Συμφωνία, vérité, vertu
B. La concorde dans le monde et dans l’histoire du salut
C. Une approche nuancée de la διαφωνία

II. – La συμφωνία dans le commentaire de l’Écriture
A. La συμφωνία de l’Écriture : les textes théoriques
B. La conception origénienne du témoignage
C. La pratique concrète de l’exégèse symphonique
D. La dimension confirmative de la lecture symphonique : les cas de pratique cumulative
E. L’arrière-plan intellectuel de la lecture symphonique
F. La diversité dans l’Écriture
G. Un cas particulier : la question des états du texte

III. – La philosophie et l’Écriture
A. Avant le Contre Celse : les Stromates
B. L’argument du Contre Celse : la philosophie comme contresens de l’Écriture
C. Récapitulation : philosophie et christianisme
Conclusion

Conclusion

Appendice 1 – Comparaison des citations philosophiques du Contre Celse avec Eusèbe et Clément
Appendice 2 – À propos du terme « harmonisation » en histoire des idées